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Fonction publique, des effectifs en hausse de +62.000 personnes en 2023

L’INSEE vient de mettre à jour son suivi annuel de l’évolution des effectifs de la fonction publique, en exploitant son enquête annuelle SIASP. Il ne faut pas confondre cette enquête avec celle de l’emploi trimestriel qui nous permet en quelque sorte d’avoir un indicateur avancé de l’emploi dans le secteur public pour l’année en cours. Les chiffres sont plus élevés, car on ajoute aux effectifs d’agents publics (y compris contrats aidés) sur emplois principaux, également les emplois secondaires ou non permanents (vacations, etc.). L’étude de l’INSEE conclut qu’en 2023 l’emploi public total s’accroît de 61 900 personnes, portant le nombre total d’agents publics à environ 5,8 millions. Depuis 2011, la fonction publique s’est accrue de +297 300 agents (+5,4%), avec une augmentation lente, mais progressive du nombre des contractuels (+48% sur la période), qui représentent désormais 23,3% des effectifs contre 16,7% en 2011, la montée en puissance de la fonction publique hospitalière (38% de l’effort total soit +23,300 agents) par rapport aux deux autres versants, etc. Une impression s’en dégage : il n’y a toujours pas d’inflexion à la baisse de l’emploi public en 2023.

Une fonction publique qui augmente de +61.900 agents en 2023, +297.300 depuis 2011 :

En 2023 la fonction publique emploie environ 5,8 millions de personnes (effectifs physiques), soit une augmentation de +1,1% en un an (avec ou sans contrats aidés, estimés à 28.700 en 2023 contre 29.900 en 2022, soit une baisse de 4% sur un an. L’augmentation globale des effectifs y compris des contrats aidés s’explique d’abord pour 38% par la poussée des recrutements dans la fonction publique hospitalière (38% de l’effort total soit +23,300 agents) dont la croissance sur un an atteint +1,9%, suivie par celle de la fonction publique d’État (32% de l’effort total soit +19.800 agents) dont la croissance des effectifs est cependant plus lente que celle des la FPT (+0,8% contre +0,9%), mais dont le dynamisme tient avant tout aux effets de structures (une masse plus grande des effectifs de +27,6%). La FPT ferme la marche avec une croissance de ses effectifs de +18,500 agents (soit 30% de l’augmentation globale). 

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Source : INSEE, SIASP, mai 2025, calculs Fondation iFRAP mai 2025

Sur plus longue période, entre 2011 et 2023, la fonction publique a néanmoins augmenté ses effectifs d’environ +297.300 agents, soit une croissance globale des effectifs de 5,4%. On s’aperçoit alors de la croissance ultra-rapide des effectifs de la FPH qui font jeu égal avec les autres versants : une croissance des effectifs de la FPE de +3,7% (92,500 agents), contre 107,500 dans la FPT (+5,6%) et 97,400 dans la FPH (+8,5%).

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Source : INSEE, mai 2025.

Exprimées en niveaux, les augmentations d’effectifs les plus en croissance de façon récurrente deviennent les effectifs hospitaliers, devant la fonction publique territoriale (en pause en 2022) et les effectifs de l’État (malgré la montée en puissance des lois de programmation sectorielles (Santé (Ségur), Défense, Intérieur, justice, enseignement supérieur et recherché). 

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Source : INSEE, SIASP, mai 2025, calculs Fondation iFRAP mai 2025

Une lente contractualisation « en marche », +48% entre 2011 et 2023 :

L’INSEE publie également un tableau des entrées/sorties des effectifs[2] permettant de suivre sur deux ans les mouvements de personnel par fonction publique et par catégories juridiques d’emploi. Sur ce segment, les contractuels présentent un solde positif de +156.700 agents en 2023 contre +133.500 agents en 2022 (+17,4%). À l’opposé, les agents titulaires présentent un solde déficitaire (plus de sorties que d’entrées) de -107.700 agents en 2023, un niveau quasiment stable par rapport à l’année précédente (+107.800). Les autres catégories et statuts (hors militaires) présentent un solde positif de 8.000, contre +3.100 l’année. Les bénéficiaires de contrat aidé augmentent à nouveau, avec +4.300 cette année contre -2.100 l’année précédente. 

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Source : INSEE, SIASP, mai 2025

Le suivi des contractuels sur moyenne période permet de bien prendre la mesure du phénomène :

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Source : INSEE, SIASP, mai 2025 et présentation Fondation iFRAP mai 2025

Entre 2011 et 2023, les effectifs de contractuels ont augmenté de près de 48% passant de 918.200 agents à près de 1.358.500. Désormais, les contractuels représentent en 2023 près de 23,3% du total de l’emploi public contre 16,7% en 2011 (+6,6 points en 12 ans). Cette très forte poussée est d’abord celle des effectifs de contractuels de l’État. On constate en effet que les effectifs de contractuels de la FPE augmentent sur la période de quasiment 60%, tandis que ceux de la FPT augmentent de 42% et de la FPH de 37%. 

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Source : INSEE, SIASP, mai 2025 et présentation Fondation iFRAP mai 2025

Cette augmentation sans précédent tient pour la FPT à l’ouverture renforcée des emplois territoriaux aux contractuels dans le cadre de la loi pour la Transformation de la fonction publique du 6 août 2019, mais aussi dans la FPH en lien avec le développement des établissements sociaux et médico-sociaux. Pour la FPE la très forte croissance des effectifs contractuels résulte certes de la dynamique des « agences » de l’État (opérateurs/ODAC et autres établissements publics) – 37% de l’augmentation, mais surtout des ministères (63,1% de l’augmentation, soit +127,6%). 

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Source : INSEE, SIASP, mai 2025 et présentation Fondation iFRAP mai 2025

Conclusion : aucun effort n’est fait pour ralentir la croissance des effectifs publics

Cette nouvelle publication de l’INSEE montre qu’il n’y a aucun effort perceptible pour ralentir la croissance des effectifs de la Fonction publique. Faute de remise en cause de certaines missions (opérateurs/ministères), de baisse de l’émiettement territorial (aucune rationalisation des strates locales n’est à l’œuvre[3]) ni de l’éparpillement des structures hospitalières sur les territoires[4], il n’y a pas à attendre de réduction du nombre d’agents publics. Or sans rationalisation des emplois publics consistant en une « stabilisation » des effectifs actuels a minima, en dépit de l’augmentation des postes régaliens (sécurité intérieure, défense, justice) – mais aidé par le départ massif à la retraite des Baby Boomers surtout dans la FPT, la cinétique actuelle pourrait se poursuivre sans inflexion notable dans les prochaines années. 


 


[1] Nous avons dû recalculer les effectifs annuels à partir des variations publiées par l’INSEE dans ses documents joints, en effet, entre 2022 et 2023 les enquêtes SIASP ne sont plus comparables à cause du passage à la DSN (déclaration sociale nominative) des agents publics. Il en résulte des modifications statistiques rendant les comparaisons avec les publications antérieures malaisées. À titre d’exemple entre la publication de juillet 2024 sur les effectifs de la FP en 2022 et la mise à jour de ces mêmes effectifs dans l’actuelle publication, les écarts sont de +44.000 au global dont +34.100 rien que pour la FPT. Si l’on utilise les anciennes séries et les chevauchements entre 2020 et 2022, voir INSEE, https://www.insee.fr/fr/statistiques/2493501

[2] Personnels civils uniquement – hors militaires. 

[3] Les propositions visant à fusionner départements et régions autour du conseiller territorial ou la réduction du nombre de communes via la promotion de la commune-communauté… ne sont toujours pas prises à bras le corps dans le débat public, malheureusement. 

[4] Voir à ce propos les analyses courageuses de Nicolas Revel, directeur de l’APHP dans une note récente pour Terra Nova https://tnova.fr/societe/sante/la-sante-des-francais-sortir-de-limpasse/