La France subit une perversion fiscale du débat budgétaire
          Dans cette atmosphère crépusculaire que nous subissons, la folie fiscale ne semble plus avoir de limites. Tout ce qui n'était pas encore taxé doit l'être et tout ce qui était déjà taxé le sera encore plus. Quand on en est à vouloir taxer les tickets resto à 8 % et l'épargne fétiche des Français, à savoir l'assurance-vie, pour… financer la suspension de la réforme des retraites, on est vraiment dans l'illustration de la foire à la saucisse fiscale et du cul-de-sac budgétaire. Tout cela va nous mener à une impasse déjà testée sous le mandat Hollande : les taux d'impôts montent mais les recettes ne sont pas au rendez-vous. Et la purge fiscale ne peut avoir que des effets délétères sur la croissance.
| Cet article a été publié dans le journal Les Echos le 03 novembre 2025 | 
Championne en prélèvements obligatoires, la France est déjà plus taxée de 2,5 points de PIB sur le capital et ses revenus par rapport à la moyenne de la zone Euro. La France est déjà aussi surtaxée sur les successions et donations avec 0,5 point de PIB de fiscalité en plus par rapport à la moyenne de l'Union. Sur les transmissions d'entreprises (malgré le pacte Dutreil), son taux d'imposition oscille autour de 11 % contre environ 5 % en moyenne en Europe et tandis que beaucoup de pays taxent à 0 %, a minima en ligne directe (Suède, Autriche, Portugal, Luxembourg… ). Idem sur l'immobilier où notre pays affiche un surplus de taxes de 30 milliards d'euros par rapport à nos voisins européens.
Le mur des faillites
Nous n'avons pas en France un problème de recettes, nous avons un problème de dépenses. Sur quel ton le déclamer pour que cela soit compris par nos politiques et nos administrations ? En 2025, la dépense publique était censée baisser de 56,6 % du PIB à 56,4 % ? C'est officiel, c'est l'inverse qui s'est produit avec une hausse à 56,8 % ! Pour 2026, on nous refait le coup et on nous dit qu'on va baisser la dépense publique à 56,4 % du PIB. Mais qui y croit encore ? Du côté des impôts, ce n'est guère mieux : ils continuent de croître vers les 44 % du PIB. Résultat ? Le Haut conseil des finances publiques vient de reconnaître qu'en 2025, il y aura eu 0 euro de baisse de dépenses structurelles et 24 milliards d'euros de hausses d'impôts. Pour un pays qui devait faire deux tiers de baisses de dépenses un tiers de hausses d'impôts, faire 100 % de hausses d'impôts, reconnaissons que c'est fort !
Notre croissance potentielle est atone, bloquée à 1,2 % jusqu'en 2028, les recettes ne seront donc pas dynamiques. D'où le concours Lépine fiscal actuel qui va nous précipiter dans le cercle vicieux de la baisse d'attractivité économique et des investissements, du plus d'épargne et in fine du encore moins de croissance et surtout, encore moins de recettes. La France a déjà perdu 38 sites industriels sur les six premiers mois de 2025. Le tissu entrepreneurial se délite sous nos yeux. En 2024, le nombre de faillites était de 66.420, un record depuis 1993. En 2025, nous allons largement dépasser ce chiffre et tangenter le mur des faillites.
Certains balaient le sujet d'un revers de main en disant que, post-Covid, il est normal d'avoir un rebond des défaillances d'entreprises, mais 150 % de hausse des faillites depuis 2021 en France alors que la moyenne de hausse dans la zone euro est de 75 %, cela fait beaucoup. Dès lors, à quel saint se vouer ? Face à l'hystérie fiscale, il faudrait garder le cap de la lucidité économique, loin du pathétique théâtre parlementaire. Les commissions mixtes paritaires vont devenir les précaires juges de paix d'un exercice budgétaire qui court sinon à la catastrophe. Ensuite resteront les outils de la loi spéciale et des ordonnances dans un scénario sans panache ni vision, ni pour les partis politiques ni pour la démocratie. On aura encore perdu du temps. En attendant, les dépenses continueront inexorablement de monter.