Faire haro sur les holdings est une sottise

Après la taxe Zucman, le débat fiscal se concentre sur les holdings. Les dividendes qu'elles contiennent sont déjà davantage taxés et surveillés que dans le reste de l'Europe.
Cet article a été publié le 30 septembre 2025 dans le journal Les Echos |
Après la déferlante sur la taxe Zucman, la poussière est en train de retomber. Une grosse partie du débat s'est focalisée sur les holdings et leurs dividendes non distribués… Tout vient encore d'une note de l'Institut des politiques publiques qui n'a de cesse depuis 2023 d'introduire dans le calcul du pourcentage d'impôts payés par les ménages les plus aisés des dividendes non distribués qui sont détenus dans les holdings.
Ce sujet hystérise d'autant plus que les chercheurs de l'IPP ont travaillé sur des données de l'année 2016, année d'un pic de dividendes non distribués (près de 1.600 milliards d'euros) stockés alors dans les holdings à cause de l'imposition au barème de l'impôt sur le revenu des revenus du capital votée sous le mandat de François Hollande.
Pas de « suroptimisation »
Dès 2017, avec l'instauration du prélèvement forfaitaire unique, on voit la baudruche des holdings se dégonfler dans les comptes nationaux et retomber autour de 300 milliards d'euros pour être aujourd'hui dans les 200 milliards. Les dividendes non distribués de l'époque ont été bel et bien largement distribués. Et ce grâce à une taxation plus normale des revenus du capital (30 %) quand nos voisins allemands sont autour de 28 %.
Aujourd'hui, avant d'arriver dans les holdings, les dividendes ont déjà été taxés à l'impôt sur les sociétés (IS) à 25 % et, quand on fait le tour d'Europe des législations, la France est ensuite un des pays qui taxe le plus à l'IS les dividendes des holdings puisqu'ils ne sont exonérés qu'à 95 % alors qu'ailleurs en Europe c'est souvent 100 % et ce en vertu de la directive européenne qui vise à éviter la double imposition des dividendes versés entre sociétés d'un même groupe.
L'administration fiscale française surveille déjà activement les holdings pour éviter les abus de trésorerie « parquée » sans réinvestissement. La requalification pour trésorerie excédentaire existe et entraîne d'ores et déjà des taxes supplémentaires (succession, fortune). De même, il existe une pratique visant à n'admettre les actifs non professionnels dans une holding que dans une limite de 10 % à 20 %. On a pourtant entendu récemment la ministre des Comptes publics démissionnaire vitupérer contre la « suroptimisation » du patrimoine non productif logé dans des holdings. Mais comment définir la trésorerie excédentaire sans tomber dans l'usine à gaz ? Mystère.
De son côté, le rapporteur général du Budget, Charles de Courson, a proposé un « précompte de 15 % » sur les dividendes reçus par ces holdings mais non distribués. La question du champ d'application n'est pas connue à ce jour : s'agirait-il de frapper le flux ou le stock ? Là encore, mystère.
Par ailleurs, au-delà des dividendes non distribués, les pourfendeurs des holdings en veulent au pacte Dutreil parce qu'il permet des transmissions en les purgeant des plus-values. Ils ne voient pas que de plus en plus de pays en Europe exonèrent les transmissions d'entreprises, dont la Suède a 100 %…
Au risque de faire fuir nos entrepreneurs
Encadrer les holdings, taxer les dividendes non distribués, imposer l'excédent de trésorerie, limiter les pactes Dutreil… Tout cela procède de la même réflexion : récupérer de la recette fiscale sur nos entrepreneurs. Sans se soucier du fait que nos entreprises ne sont pas plus riches en trésorerie qu'ailleurs en Europe. L'obsession est maintenant d'aller chercher l'argent là où il est car les caisses publiques sont vides. Ce sujet des holdings ne serait même pas évoqué si nous n'avions pas de l'ordre de 160 milliards de déficit public au compteur.
Alors que 50 % des entreprises familiales françaises vont être transmises dans les dix ans qui viennent, est-il vraiment urgent de vouloir complexifier et alourdir l'environnement fiscal existant au risque de faire fuir nos entrepreneurs ? Ceux qui font haro sur les holdings le font pour de mauvaises raisons. Quant à l'administration fiscale, elle se dit que tout est bon à prendre pour forcer à distribuer plus les dividendes pour toucher plus de recettes fiscales et sociales. Et tant pis si cela fragilise les entreprises.