Budget 2026… Et si la France s’en passait ?

Et si la France n’avait pas de budget pour 2026, serait-ce si grave ? Ne serait-ce pas même préférable pour notre économie, avec moins de dépenses et moins de hausses d’impôts ? La réponse n’est pas si simple. Il y a des avantages et des inconvénients, selon le scénario envisagé.
Cet article a été publié le 16 octobre 2025 dans le journal Valeurs Actuelles |
Les risques que la France ne dispose pas d’un budget classique voté au Parlement d’ici au 31 décembre 2025 sont élevés. Et si un budget est effectivement voté, il risque fort de comporter encore plus de hausses d’impôts que le texte initial – taxation des entreprises et des entrepreneurs – ainsi que des dépenses supplémentaires, notamment avec la suspension de la réforme des retraites.
Le budget 2026 préparé par Bercy s’annonce déjà particulièrement décevant. L’ajustement du déficit public se ferait essentiellement par des hausses d’impôts plutôt que par des baisses de dépenses. La dépense totale augmenterait encore de 29 milliards d’euros entre 2025 et 2026, tandis que le déficit serait réduit de 17 milliards grâce à 13 à 14 milliards de hausses d’impôts : gel du barème de l’impôt sur le revenu et de la CSG, reconduction de la taxe différentielle à 20 % sur les hauts revenus, taxe anti-optimisation sur les holdings familiaux, rabot de la niche de 10 % sur les retraites, baisse des allègements de charges, taxe sur les mutuelles, etc.
Quasiment aucune économie n’est prévue au-delà des économies qui viennent en compensation de nouvelles dépenses. Du côté de l’État et de ses opérateurs, il faut compenser la hausse des crédits militaires (+ 6,7 milliards), la hausse de la charge de la dette (+ 8 milliards) et l’augmentation de la contribution française au budget européen (+ 5,7 milliards).
Un budget ou rien ?
Face à cette avalanche de hausses d’impôts, une petite musique commence à monter : il vaudrait peut-être mieux ne pas avoir de budget du tout. Concrètement, que ce projet avec sa pluie de hausses d’impôts ne soit pas adopté, et que l’on reconduise les “services votés” de 2025.
Une loi spéciale, comme en 2024, permettrait de prélever les impôts et de relever le plafond de la dette, tandis que les dépenses ordinaires de l’État seraient reconduites à leur niveau de l’année précédente en attendant l’adoption d’un budget.
Mais cette solution ne vaut que pour l’État, pas pour la Sécurité sociale. Du côté des dépenses sociales, il n’existe ni loi spéciale ni services votés. Sans projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) adopté, les dépenses continueraient de filer : indexation automatique des retraites, revalorisation des minima sociaux, dépenses de santé non pilotées puisque l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) et ses régulations budgétaires ne seraient pas adoptés.
La direction du Trésor avait d’ailleurs conclu cet été à un déficit de 6 % du PIB si rien n’était fait en 2026. Les dépenses de l’État et des collectivités locales seraient bridées, mais pas les dépenses sociales. Cela plaiderait pour faire passer, si le PLFSS n’était pas adopté dans les temps, des mesures de désindexation des pensions et des aides sociales, ainsi que des mesures sur les transports sanitaires.
On est donc face à une situation complexe : pour qu’il vaille mieux ne pas avoir de textes adoptés, il faudrait à la fois les services votés en 2025 et une loi spéciale pour l’État, et des ordonnances de freinage des dépenses pour la Sécurité sociale. Un mix sur lequel il n’est pas facile d’atterrir. Et qui demandera l’an prochain de faire ratifier les ordonnances sur la Sécurité sociale par le Parlement et faire voter un projet de budget 2026. À condition de faire respecter le principe de non-rétroactivité fiscale, on pourrait avoir là moins de dépenses et moins d’impôts. Ou comment passer par le chas d’une aiguille…