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Réforme des retraites : l’âge d’équilibre, cette règle d’or à renforcer

On ne parle plus que du sort de l’âge pivot qui devait équilibrer les comptes des retraites avant la mise en place du régime universel de retraites, mais qui a été provisoirement retiré par le Premier ministre. On évoque beaucoup moins l’âge d’équilibre qui figure à l’article 10 du projet de loi dans le nouveau système et qui, lui, n’a pas été retiré.

Comme l’âge pivot, l’âge d’équilibre est « un mécanisme de bonus/malus » qui a vocation à équilibrer les comptes entre les recettes et les dépenses des retraites.

Le nouveau système devrait basculer vers un système par points. Un type de régime au demeurant déjà très fréquent et très répandu en France (Agirc-Arrco) et en Europe. Dans le futur système, la seule notion qui vaille pour savoir si on pourra liquider sa pension, est l’âge d’ouverture des droits, actuellement fixé à 62 ans et auquel le président de la République s’était engagé durant la campagne à ne pas toucher.

La règle d’or de l’équilibre, une belle avancée

Exit donc la notion de durée d’assurance, qui avait subi de très nombreuses modifications jusqu’à la dernière loi Touraine sur les retraites qui devait l’allonger pour la porter jusqu’à 43 ans de durée de cotisation pour la génération 1973. Avec un âge légal qui reste fixé à 62 ans et sans plus de référence au nombre de trimestres cotisés, on ne rétablit donc pas les comptes.

En effet, le rapport démographique se dégrade régulièrement avec l’augmentation de l’espérance de vie. D’où l’idée d’introduire une nouvelle référence, l’âge d’équilibre différent de l’âge d’ouverture des droits, et un pilotage financier avec la mise en place d’une règle d’or, ce qui constitue une belle avancée en matière d’équilibre des comptes sociaux.

En Suède ou en Allemagne, contrairement à la France, les comptes sociaux sont équilibrés depuis plusieurs années. En matière de retraite, les Suédois y arrivent grâce à un âge d’équilibre qui progresse automatiquement en fonction de la démographie et de l’espérance de vie. C’est donc un âge pivot à partir duquel on peut prendre sa retraite moyennant un coefficient de conversion fonction de l’espérance de vie à la retraite de la génération. L’âge de la retraite s’accroît ainsi automatiquement en Suède (les Suédois partent en moyenne à la retraite à plus de 66 ans).

Cet équilibre automatique contribue à une deuxième différence d’importance avec le système par points en préparation en France : le pilotage ne nécessite pas de se réunir régulièrement pour réexaminer les paramètres d’équilibre du régime.

Pour sa part, l’Allemagne a placé au cœur de son système de retraites le sujet de la compétitivité de ses entreprises : le taux de cotisation pesant sur le travail ne doit pas excéder 20% jusqu’en 2020 et 22% jusqu’en 2030. L’âge d’ouverture des droits à pension est repoussé de manière quasi automatique en prenant en compte le ratio démographique : 65 ans pour la génération née en 1953 (progressivement augmenté jusqu’à 67 ans pour la génération née en 1964 et les générations suivantes).

L’âge d’équilibre est donc un principe sain qui participe à la règle d’or d’équilibre des comptes, ce dont on peut se féliciter pour le futur régime. Dans le projet de loi, l’âge d’équilibre est censé évoluer par génération à hauteur des deux tiers de l’évolution des prévisions d’espérance de vie à la retraite des assurés.

Difficiles négociations avec les syndicats

En revanche, il manque à cet âge d’équilibre l’automaticité eu égard aux difficultés que rencontre le gouvernement avec les syndicats sur l’âge pivot à 64 ans avant 2027. En effet, il risque d’être difficile dans les prochaines années d’accorder les partenaires sociaux lors de conférences périodiques pour aller à 66 ou 67 ans d’âge d’équilibre…

Et il manque aussi au pilotage financier du système l’interdiction d’augmenter la pression fiscale pour équilibrer les comptes. Il n’y a pas en effet dans la loi, contrairement à la lettre envoyée par le Premier ministre aux syndicats (point n°8) d’obligation d’équilibre sans augmenter les impôts ou les cotisations.

Gageons que certains parlementaires proposeront ces deux garde-fous par amendement dans le projet de loi. Cela sécuriserait grandement l’avenir de nos retraites comme de la compétitivité de la France.