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Où est la clause du grand-père des fonctionnaires ?

Mardi prochain va commencer la grève reconductible dans les transports publics… Pourquoi ? Parce que des agents payés en partie par nos impôts grâce aux subventions que nous versons à ces entreprises ne veulent pas travailler jusqu'à 54 à 59 ans alors que les salariés du privé travailleront jusqu'à 64 ans ? Cela ressemble à une plaisanterie. L'iniquité est flagrante entre les salariés du secteur privé et les salariés des régimes spéciaux qui partent plus jeunes en retraite (56 ans à la RATP et à 60 ans à EDF) et avec de bien meilleures pensions en moyenne !

Clairement, les sénateurs ont raison de poser la question qui fâche : pourquoi attendre 2066 (et la clause du grand-père) pour que les agents de la RATP, de la Banque de France ou d'EDF partent aussi en retraite à 64 ans ? Le surcoût annuel n'est pas négligeable : plus de 3 milliards d'euros par an selon la Cour des comptes. Avec la clause du grand-père, le gouvernement ne fait que la moitié du chemin en ne modifiant pas l'écart d'âge actuel entre régimes spéciaux et régime privé.

21 % de plus à carrière identique

C'est symétriquement la même chose pour les agents publics : report de l'âge à 64 ans pour les agents de l'Etat, des territoires et des hôpitaux, mais sans changer les modes de calcul, même pour les nouveaux embauchés. Là encore, la réforme ne fait que la moitié du chemin. Se pourrait-il qu'à la fois au gouvernement et au Parlement, tout le monde ait oublié que les agents titulaires des fonctions publiques bénéficient aussi d'un régime spécial totalement dérogatoire avec un calcul sur les 6 derniers mois avec 75 % du dernier salaire ?

C'est difficile à croire, d'autant plus qu'avec 4,6 millions d'agents titulaires, nos fonctionnaires sont beaucoup plus nombreux que les 42.000 agents RATP et les 135.000 agents concernés des industries électriques et gazières. Ces titulaires des trois fonctions publiques, et tous ceux qui seront embauchés dans les années qui viennent, vont donc continuer à bénéficier d'une retraite beaucoup plus généreuse (21 % de plus à carrière identique hors primes) que leurs collègues du privé qui pourtant font souvent exactement le même travail : enseignant dans une école privée sous contrat, infirmier dans une clinique privée…

Des régimes sont très très spéciaux

Alors, qui va proposer - enfin ! - que l'on adopte aussi la clause du grand-père dans les trois fonctions publiques ? Soulignons qu'un million d'agents contractuels ont déjà des retraites avec un mode de calcul identique au privé et nul n'y trouve à redire. Alors que les déficits cachés des pensions publiques sont de l'ordre de 30 milliards d'euros par an, l'application de la clause du grand-père pour les fonctionnaires permettrait entre 10 et 15 milliards d'euros d'économies par an à terme.

On n'entend aucune voix non plus évoquer le régime très spécial de retraite des agents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Et il faut dire que le sujet est particulièrement confidentiel puisque l'on a des données uniquement pour les agents de l'Assemblée grâce à un rapport de 2018. Ce rapport explique que les agents de l'Assemblée peuvent partir après seulement quinze années de service avec une pension proportionnelle pour jouissance immédiate. Et que ceux du Palais-Bourbon de plus de 55 ans, à l'exception des cadres, pouvaient aussi travailler à mi-temps pendant cinq ans avant leur retraite avec 80 % de leur traitement.

Au nom de l'équité, les embauches avec de tels systèmes de pensions doivent cesser. Aussi bien à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, dans les ministères, les collectivités ou les hôpitaux publics.