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Etablissements publics sous tutelle : pistes d'économies pour le ministère des Armées

Les 19 établissements publics sous tutelle et 7 établissements sous co-tutelle gérés par le ministère des armées tombent sous le coup de la circulaire du 5 juin 2019 pronant une réforme administrative des agences publiques et qui fait suite aux circulaires précédentes de 2010 et en 2014 qui, si elles ont généré quelques résultats, ne sont pas à la hauteur des objectifs définis au préalable. Des pistes existent pourtant concernant le ministère des armées (MINARM).

On compte 24 établissements publics sous tutelle et sous cotutelle du ministère des Armées (MINARM). Ils dont à distinguer selon leur nature et leurs missions :

  • EPA : établissement public à caractère administratif disposant d'une certaine autonomie administrative et financière afin de remplir une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'État ou d'une collectivité territoriale ;
  • EPIC : établissement public à caractère industriel et commercial ayant pour but la gestion d'une activité de service public ;
  • EPSCP : établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel concernant en grande partie les établissements d'enseignement supérieur et bénéficiant d'une autonomie importante.

Etablissement

Sous tutelle unique du MINARM

Sous cotutelle du MINARM et d'autres ministères

Total

EPA

13

4

16

EPIC

3

3

5

EPSCP

3

0

3

Total

19

7

24

Type de mission

Sous tutelle du MINARM

Sous cotutelle du MINARM et d'autres ministères

Total

Formation initiale et complémentaire de très haut niveau de personnels civils et militaires (écoles : DGA, Marine, Air)

6

0

6

Recherche scientifique (ONERA, SHOM, CNES, CEA, IRSN)

2

3

5

Etudes stratégiques de défense (IHEDN)

0

1

1

Soutien médical sur le territoire national (INI et CNMSS)

1

1

2

Soutien logistique sur le territoire national et outre-mer (EDA)

1

0

1

Soutien social (IGESA et Foyer de la légion étrangère) sur le territoire national

2

0

2

Soutien financier au profit des familles des militaires décédés lors de missions opérationnelles et d’entraînement

1

0

1

Activité culturelle (Musées des 3 armées et Académie de la Marine)

4

0

4

Information et communication (EPCAD)

1

0

1

Mémoire des anciens combattants (ONAC)

1

0

1

Total

19

5

24

La liste complète des établissements sous tutelle est à télécharger en pièce jointe en bas de note. A cette liste, il y a lieu de rajouter les EPA à vocation sociale et culturelle et sans but lucratif des forces armées. On y trouve le cercle national des armées1, les cercles-mess et les foyers2dont le Foyer d'entraide de la Légion étrangère3. L'Institut Saint-Louis se distingue aussi : il est régi par la convention franco-allemande de 1959, placé sous la double tutelle du MINARM et du Bundesministerium der Verteidigung allemand. Cet institut est spécialisé dans les technologies de la Défense, la sécurité des populations et la lutte antiterroriste, en partenariat avec de nombreux industriels et organismes de recherche académique.

Une lente rationalisation... alors que des pistes existent

Depuis une dizaine d'années, une lente rationalisations des établissements publics sous tutelles a été menée.

En 20074, l’Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace (ISAE-SUPAERO) a été créé. Il est issu de la fusion de l'ENSAE SupAéro créée en 1909 et de l'ENSICA créée en 1945.

En 2019, l’Institut polytechnique de Paris a été transformé en un EPSCP expérimental5 qui regroupe l'École polytechnique, l’École nationale supérieure des techniques avancées, le Groupe des écoles nationales d'économie et statistique et l'Institut Mines-Télécom en tant qu'établissements-composants et qui conservent leur personnalité morale.

Il faut aussi évoquer :

  • Le transfert de l’Établissement public d'insertion dans l'emploi (EPIDE), anciennement appelé Établissement d'insertion de la défense et créé en 2006 sur initiative du ministère de la Défense sous la cotutelle des ministères de la cohésion des territoires et du travail ;
  • La quasi autonomie financière de fonctionnement du Foyer d'entraide de la Légion étrangère avec différentes recettes : vente de produits agricoles de qualité (vins, huile d'olive...), d'articles de tradition et d'artisanat (ébénisterie, reliures de livres, sculptures...), cotisations et main d’œuvre gratuite des légionnaires d'active et retraités, accueil tarifé des permanents et passagers dans les centres d'accueil ;
  • L'intégration financière en 1996 par voie législative de la CNMSS au régime général de Sécurité sociale, son rôle de caisse pivot en 2001 pour les hôpitaux d'instruction des armées (HIA)6 et sa reprise en 2010 de la gestion des soins médicaux gratuits au bénéfice des anciens combattants et victimes d’attentats.

Néanmoins, beaucoup d'autres pistes de rationalisation pourraient être utilisées dans un cadre ministériel et interministériel. Dans ce cadre, la Fondation propose les modifications suivantes :

  • La fusion effective administrative des 3 grands musées de la Défense (Armée, Marine et Air) comme cela a déjà été envisagé par le ministre de la Défense7 mais qui a échoué en 2010. Une piste serait de suivre le modèle de la fusion8 de Réunion des musées nationaux (RMN) et du Grand Palais dans un EPA unique qui assure la gestion de 2 musées parisiens (Le Grand Palais et le Musée du Luxembourg) et collabore avec 16 musées partenaires répartis sur l'ensemble du territoire9 ;
  • L'intégration de l'Académie de la Marine au sein de l'Institut de France10  à l'instar des académies suivantes : Académie française, Académie des inscriptions et belles-lettres, Académie des sciences, Académie des beaux-arts et Académie des sciences morales et politiques ;
  • L'intégration dans le service de santé des armées (SSA) des activités des services de l'INI qui sont les suivantes : le centre médico-chirurgical11 qui assure des soins à différents patients  (pensionnaires de l'INI, anciens combattants, blessés militaires et civils), le centre d'études et de recherche sur l'appareillage des handicapés (CERAH12) situé sur 3 sites (direction basée à Woippy, laboratoire d’orthèse-prothéses à Paris et antenne à Créteil) et le centre des pensionnaires qui accueille des anciens combattants blessés et les victimes de guerre dont le niveau d’invalidité et de dépendance est reconnu dans le cadre du code des pensions militaires.

En outre, les missions de l'IHEDN et de L’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) présentent bien souvent un caractère commun notamment dans le domaine de la formation des thèmes suivants : gestion civilo-militaire de crises, protection du territoire national, des entreprises et du patrimoine, intelligence et sécurité économiques, souveraineté numérique et cybersécurité... Une proximité qui pourrait justifier la création d'un EPA unique.

De plus, il existe des possibilités de rationalisation de l'organisation de l'IGESA. Créée en 1966 en vue de regrouper les nombreux organismes sociaux hérités d’initiatives passées (colonies de vacances, maisons familiales, centres d’accueil, crèches, institutions médico-sociales...), elle est devenue un EPIC en 2004 chargé notamment des missions suivantes : versement des aides, délivrance des secours, exécution des titres de paiements relevant de la politique sociale du MINARM et sutout, de la gestion de nombreux établissements de différentes natures (loisirs, sociaux, hébergement, éducation...) :

  • Une trentaine de structures de villégiature (de 40 à 750 lits) qui ont reçu 74.000 clients en 2016 (taux d'occupation : plus de 90 %). Cette mission pourrait être reprise par les secteurs privé, voire associatif (exemple : Union nationale des centres sportifs de plein air - UCPA) ;
  • Une quarantaine de structures d'accueil de petite enfance (un peu moins de 3.000 enfants) basées sur le territoire national et en Allemagne. Cette mission pourrait être reprise par les collectivités territoriales (communes et communautés de communes) ;
  • 7 résidences relais = 4 en région parisienne, 2 à Toulon et 1 à Bourges qui, pour certaines, hébergent des célibataires géographiques du MINARM. Cette mission pourrait être reprise par les cercles-mess des garnisons ;
  • 4 centres sociaux implantés auprès de bases militaires qui proposent aux conjoints de militaires différentes actions (cours de cuisine, soutien scolaire, apprentissage du français, accompagnement dans les démarches administratives...) : Calvi (25 adhérents), Nouvelle Calédonie (La Tontouta = 11 adhérents, Nandaï = 32 adhérents, Plum = 45 adhérents). Cette mission pourrait être reprise par les cercles-mess et foyers des garnisons.
  • 2 maisons d'accueil d’enfants et adolescents (La Roche-Guyon - 95 et Sathonay - 69) dont la vocation13 est de les accueillir en cas de difficulté familiale et sociale. Une mission qui pourrait être reprise par le secteur associatif spécialisé dans ce domaine ;
  • 1 lycée professionnel sous contrat « La Colette » (166 élèves dont 33 ressortissants du MINARM en 2016) à Toulon qui prépare au certificat d’aptitude professionnelle (CAP) petite enfance et agent polyvalent de restauration. Ce lycée pourrait être repris par le ministère de l'éducation nationale ou le secteur privé sous contrat ou non ;
  • 1 centre de santé à Saclay (91), survivance du passé, qui propose des consultations dentaires : 2.869 actes réalisés en 2016 au profit de 1.745 patients dont la grande majorité n’est pas ressortissante du MINARM. Cette mission pourrait être reprise par le secteur médical privé (conventionné ou non) ou le SSA ;
  • L’hôtel-restaurant Furtado-Heine14 dont la gestion relève depuis la dissolution de la fondation Furtado-Heine en 2012 de l'IGESA avec un équilibre budgétaire précaire (tarification des prix inférieure aux coûts de revient réels) qui justifie la cession de cet établissement au secteur privé.

Ainsi, l'IGESA pourrait se recentrer sur sa mission de guichet-payeur de prestations sociales tout en transférant les missions et les moyens de ces centres (dont l'entretien nécessite des subventions du MINARM) à des opérateurs privés et publics spécialisés. Il conviendra alors d'établir des protocoles précisant la nature des prestations et les tarifs visant à satisfaire les besoins des ressortissants du MINARM dans les meilleures conditions. Enfin, compte tenu des doublons relatifs à la fonction alimentation des forces armées entre le service du commissariat des armées (SCA) et l'EDA, cet EPIC devrait assurer la totalité de cette mission, notamment la gestion de tous les organismes de restauration et l'approvisionnement des différentes rations de combat dont les composants sont fournis par le secteur marchand.


1Confer l'article de l'IFRAP du 25 septembre 2014.

2Confer le décret n° 2008-1219 du 25 novembre 2008 et l'article R3412 du Code de la défense.

3Confer le décret n° 2014-562 du 30 mai 2014, les articles L3418 – 1 et 2 du Code de la Défense.

4Confer le décret n° 2007-1384 du 24 septembre 2007 et l'Ordonnance n° 2018-1131 du 12 décembre 2018.

5Confer le décret n° 2019-549 du 31 mai 2019.

68 HIA qui sont ouverts à tous les assurés sociaux même sans lien avec le MINARM.

7Confer l’article du journaliste, Jean-Dominique Merchet sur son blog défense sur le site « L’Opinion » des 19 juillet 2010 et 28 janvier 2015.

8Confer le décret n° 2011-52 du 13 janvier 2011.

9Outre les 3 musées (Armée, Marine et Air et Espace), le MINARM a 18 musées de tradition (17 pour l'armée de terre et 1 pour le SSA).

10Confer le décret n° 2007-810 du 11 mai 2007 portant approbation du règlement général de l'Institut de France et des académies.

11Capacité d’accueil de 80 lits sur 3 dispositifs : services de médecine physique et de réadaptation et de soins de suites post Opératoires  et l’unité sensori-cognitive.

12Qui était avant 2010 rattaché à l'ONAC.

13Instruction n° 19634/ARM/SGA/DRH-MD relative à l'organisation et au fonctionnement des maisons d'enfants favorisant un accueil avec responsabilité éducative du ministère des armées du 13 avril 2017.

14Cédé au ministère de la guerre par l’acte de donation du 17 octobre 1895 sur décision d'une riche héritière Cécile Charlotte Furtado-Heine.