Heures travaillées par an : il manque plus de 7 milliards d'heures à la France

Selon les chiffrages de la Fondation IFRAP, en partant des données Eurostat, aligner le temps de travail sur la moyenne de la Zone Euro permettrait de gagner près de 7,6 milliards d’heures travaillées par an, et près de 7,4 milliards en s’alignant sur le modèle allemand. Les données d’Eurostat indiquent que les Français ne sont pas réfractaires au travail, mais que la moyenne d’heures effectives travaillées par an reste inférieure à celle de la Zone Euro, principalement en raison du faible temps de travail des salariés du secteur non marchand. Les solutions les plus pertinentes aujourd’hui seraient d’augmenter le temps de travail des salariés du secteur public, d’accroître le taux d’emploi dans le pays et de pousser l’âge de départ à la retraite.
État des lieux
Quand on parle d’heures annuelles effectives travaillées, on entend le nombre d’heures effectivement réalisées au cours d’une période de référence : cela inclut toutes les heures travaillées, y compris les heures supplémentaires, qu’elles soient rémunérées ou non, mais exclut les heures non travaillées pour cause de congés, jours fériés, maladie, maternité, etc.
Heures effectives travaillées en 2023
En 2023, la France se situe en dessous de la moyenne de la zone euro en termes d’heures annuelles effectives par travailleur avec un total de 1 487 heures par an contre 1 545 heures en Zone Euro. Les temps complet et temps partiel sont regroupés ici pour donner la moyenne, ce qui explique le niveau relativement bas des Allemands, qui ont davantage recours au temps partiel que la France. En termes d’heures travaillées dans le secteur marchand, la France est très proche de la moyenne de la Zone Euro avec 1 589 heures en France contre 1 603 heures. En revanche, la quantité de travail du secteur non marchand français est nettement à la traîne en comparaison avec nos voisins. Le secteur non marchand français affiche l’une des durées annuelles effectives les plus basses de la Zone Euro avec en moyenne 1 238 heures en France contre 1 370 heures en moyenne dans la Zone Euro.
Le graphique numéro 2 nous permet d’analyser en profondeur le travail réalisé au sein du secteur non marchand. On remarque que les non-salariés du secteur non marchand (médecins, infirmiers, consultants du public, etc.) font remonter la moyenne d’heures travaillées avec 1 727 heures par an en moyenne. Cependant, la moyenne chute drastiquement en raison de la très faible quantité de travail des salariés du secteur non marchand avec 1 202 heures en moyenne par an, l’un des plus bas d’Europe, alors que la moyenne de la zone euro s’établit à 1 353 heures.
Heures effectives travaillées annuellement du secteur non marchand en 2023
Comparaison avec l’Europe et l’Allemagne
La Fondation IFRAP s’est interrogé sur le nombre d’heures travaillées perdues par rapport à nos voisins. Pour ce faire, nous avons ramené les indicateurs économiques de la Zone Euro et de l’Allemagne à l’échelle de la France afin d’évaluer le nombre d’heures de travail perdues. Nous avons pris en considération le nombre d’heures effectives travaillées annuellement par secteur et par type d’emploi, c’est-à-dire les salariés et non-salariés des secteurs marchand et non marchand, ainsi que le taux d’emploi et l’âge de la retraite. Les indicateurs de la France et de la Zone Euro en 2024 sont détaillés ci-dessous:
Allemagne :
La Fondation IFRAP a appliqué les indicateurs allemands à la France, il en résulterait un gain de près de 7,4 milliards d’heures travaillées en France dans ce scénario.
En appliquant le taux d’emploi allemand, qui entraînerait l’embauche d’un plus grand nombre de Français, le volume total d’heures travaillées augmenterait de 5,4 milliards d’heures. Le faible taux d’emploi en France, comparé à celui de ses voisins, lui coûte un nombre considérable d’heures travaillées. Si la France s’alignait sur l’âge de la retraite allemand, cela accroîtrait le volume annuel d’heures travaillées de 1,3 milliard d’heures. En appliquant les durées effectives annuelles allemandes aux Français, seuls les salariés du secteur non marchand travailleraient davantage, ajoutant 666 millions d’heures au volume annuel travaillées français. Cela montre que le secteur marchand et les non-salariés français travaillent déjà beaucoup comparés aux Allemands, et que l’effort en termes de durée effective travaillée ne devrait pas leur être demandé.
Zone euro :
La Fondation IFRAP a appliqué les indicateurs de la Zone Euro à la France, il en résulterait un gain de près de 7.6 milliards d’heures travaillées en France dans ce scénario.
En appliquant à la France les indicateurs moyens de la Zone Euro, on obtient un gain d’heures effectives de près de 7,6 milliards, très proche du résultat obtenu pour l’Allemagne. Cela montre qu’il est préférable de privilégier une durée annuelle effective élevée en augmentant le taux d’emploi et en relevant l’âge de départ à la retraite. L’augmentation des heures effectives pour atteindre la moyenne de la Zone Euro repose principalement sur les salariés du secteur non marchand (+ 1,2 milliard d’heures) et ceux du secteur marchand (+ 919 millions d’heures), les non-salariés étant déjà très actifs.
Conclusion
Pour augmenter le nombre d’heures travaillées en France, il est nécessaire de s’inspirer de nos voisins européens. Le modèle allemand et les données moyennes de la Zone Euro indiquent clairement la voie à suivre. La priorité est de repousser l’âge de départ à la retraite (65 ans en moyenne dans la zone euros et 67 ans en Allemagne) et d’accroître le taux d’emploi dans le pays. La durée annuelle effective de travail doit également être augmentée. Cet effort est particulièrement recommandé dans le secteur public, notamment pour les salariés du public qui travaillent nettement moins que les autres actifs français. Ces résultats montrent également que le secteur privé, en particulier les non-salariés (indépendants, entrepreneurs, auto-entrepreneurs...), porte une part importante du volume de travail des Français.