Actualité

Hervé Le Bras : Agir d'urgence contre la déprime française

"Se sentir mal dans une France qui va bien"

Sorti ce mois-ci, ce document d’actualité chaude cherche visiblement à comprendre le phénomène des « gilets jaunes », mystérieux compte tenu de la situation française. La plupart de ces données extraites souvent d’Eurostat, de l’INSEE, de l’OMS ou de la DREES sont connues, mais leur rassemblement dans un seul livre provoque un choc et constitue un document de référence très utile.

Sur les sujets objectifs et quantifiables des revenus, inégalités, retraites, durée de vie, santé, prestations sociales, sécurité, temps de travail et de nombreux autres, les cent-cinquante cartes, tableaux et diagrammes en couleurs, et les commentaires ramassés qui les accompagnent, montrent une France presque toujours au-dessus (meilleure) de la moyenne des pays européens. Un contraste qui justifie le titre choisi par Hervé Le Bras. 

Les principales notes négatives mesurables concernent le nombre de juges, le niveau de chômage et le taux de suicides. Sur le plan qualitatif, les Français sont les plus négatifs en Europe quand on les interroge sur leur réussite par rapport à celle de leurs parents et grands-parents, et  très pessimistes sur leur perception de l’ascenseur social, sur l'estime qu'ils portent à leurs concitoyens, et sur leur perception de leur propre état de santé. Sur ce dernier point, les écarts entre la France et les autres pays sont « confondants » terme utilisé par l’auteur : la France serait avant-avant-dernière en Europe, très loin des pays comparables, signe incontestable d’un pessimisme injustifié.    

L’auteur revendique de n’aborder ni le chômage ni l’immigration qu’il ne considère pas comme à la source de la dépression française. L’iFRAP ne partage pas cette opinion en ce qui concerne le chômage, ce problème désespérant les familles, minant les quartiers difficiles, décourageant les élèves (A quoi bon travailler à l'école ?) et bloquant la progression des revenus et l’ascenseur social. Il n'aborde pas non plus les sujets des déficits, de la dette et du niveau des prélèvements obligatoires, qui pèsent pourtant sur le moral des Français, conscients de leur conséqunce inévitable à terme sur leurs futurs impôts. 

Pourquoi ?

L’ensemble du livre est focalisé sur des résultats, et sur des comparaisons européennes, un parti-pris justifié pour aborder le phénomène des « gilets jaunes », plus que sur des causes. L’auteur ne consacre que quelques pages de conclusion au « pourquoi » de cette dépression française et laisse globalement le débat ouvert. Au détour du texte, page 130, Hervé Le Bras élargit pourtant l’horizon avec des données stupéfiantes de l’Eurobaromètre sur les croyances idéologiques des Français. Elles confirment exactement celles mises en avant en 2017 au niveau mondial par le Professeur Roland Bénabou, croyances dont on doit se demander si elles ne sont pas à la racine du mal être des Français :

World opinion survey

Espagne

Etats-Unis

Allemagne

Royaume- Uni

Italie

France

L’éducation est-elle importante pour progresser ?

71 %

62 %

61 %

53 %

39 %

24 %

Travailler dur est-il important pour progresser ?

47 %

73 %

49 %

60 %

35 %

25 %

La libre entreprise et l’économie de marché libre sont-elles le meilleur système sur lequel baser le futur du monde ? 

63 %

71 %

65 %

66 %

59 %

36 %