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Plan de relance : quand l'administration est seule à la barre...

Le marathon budgétaire se présente mal. Le président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Éric Woerth, appuyé par le rapporteur général du budget LREM Laurent Saint-Martin, a envoyé une lettre au ministre de l'Économie et des finances pour se plaindre de l'étroitesse de la fenêtre de tir budgétaire accordée au Parlement cette année. L'Assemblée nationale devait avoir cette année deux jours seulement pour amender le projet de budget 2021 en commission. Finalement, le gouvernement accorde deux jours de plus. Soit quatre… En 2019, c'était six jours, en 2018, onze.

Certes, la période est exceptionnelle, mais le budget sera lui aussi exceptionnellement complexe cette année puisqu'il porte le déploiement du plan de relance de 100 milliards d'euros. Plan de relance qui se présente de façon particulièrement «trapue».

D'une part, il devrait être isolé dans une mission spécifique séparée des crédits ordinaires dans une enveloppe dont le fléchage pourrait évoluer au fil du temps entre les ministères attributaires. Il est de surcroît bien difficile de savoir quels seront les crédits qui auront un impact sur le solde budgétaire en 2021, étant donné que le plan de relance sera composé de dépenses budgétaires classiques, mais aussi de programmes d'investissement d'avenir (nouveaux ? PIA4 ou recyclés des programmes antérieurs non consommés ?) pour 20 milliards d'euros, de subventions de la Commission européenne (40 milliards), de prêts, garantis et fonds propres en direction de la Caisse des dépôts et consignations (20 milliards), de baisses fiscales (20 milliards de fiscalité locale compensés par l'État).

Bref, une véritable «usine à gaz» qu'il faudra ensuite reventiler sur la durée de programmation et, pour nos députés. Un vrai casse-tête budgétaire qui demande au moins 10 jours pour en amender le texte correctement.

Par ailleurs, la loi de programmation des finances publiques qui aurait dû être présentée lors du budget 2020, déjà repoussée, a été reportée l'an dernier puis repoussée en avril avant que la pandémie n'empêche sa présentation avec le Programme de stabilité européen. Nos parlementaires sont laissés dans le brouillard quant à l'évolution des finances publiques entre 2021 et 2024.

La solidité de notre démocratie parlementaire est donc engagée par cette épreuve. La théorie parlementaire repose sur l'autorisation du budget. Comme le disent les Anglo-Saxons, «no taxation without representation». Cette année, le droit d'amendement au Parlement sera réduit à sa plus simple expression.

Nous entrons ici dans une gestion administrative du budget qui ne dit pas son nom et qui s'aggrave d'année en année.