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Endettement français : une piste pour le freiner une fois pour toutes

Les règles budgétaires européennes sont constamment critiquées. Les 60 % de dette par rapport au PIB, les 3 % de déficit seraient obsolètes ? Il faudrait aussi revoir entièrement les dispositions du pacte de stabilité ? Et laisser filer les comptes dans le rouge ? Rien n'est plus dangereux.

Cette tribune a été publiée dans les pages des Echos, le lundi 15 mars 2021. A voir, en cliquant ici.

Mais qui pense comme ça ? Souvent les mêmes qui sont dans le déni de la dette et peuplent la catégorie des « dépensiers ». « Se fixer des trajectoires crédibles », c'est le leitmotiv du gouvernement. Mais attention, vouloir casser les thermomètres n'a jamais aidé à réformer un pays. Ce ne sont pas les 3 % ou les 60 % qui sont de mauvaises règles, c'est juste qu'on s'en sert mal.

Penser les règles différemment

Au lieu de conspuer les règles européennes, nous devons les penser différemment pour les prochaines années. Se doter d'une règle en zone euro d'un maximum de dépenses publiques par rapport au PIB avec un pourcentage qui pourrait être de 50 % et d'un maximum de taux de prélèvements obligatoires par rapport au PIB qui pourrait être de 40 %. Voilà la clé pour réussir à faire converger la gestion des pays de la zone.

Cela demanderait - certes - à la France de baisser de 6 points de PIB ses dépenses ainsi que ses impôts, ce qui la ferait revenir dans la moyenne de nos partenaires. C'est tout à fait possible à condition de le vouloir. Rien qu'en coût administratif de notre sphère publique, nous dépensons chaque année 84 milliards d'euros de plus que nos partenaires européens. Donc environ 4 points de PIB. Ainsi, la France (pays le plus taxé comme chacun le sait) arrêterait définitivement d'ajuster le déficit par des augmentations d'impôts ce qui entame à la fois la compétitivité de nos entreprises et la croissance potentielle.

Une règle budgétaire pour la France

Au-delà des règles européennes, le ministre de Economie, Bruno Le Maire, a indiqué dernièrement réfléchir à une règle budgétaire pour la France, c'est une très bonne nouvelle. Enfin ! Pourrait-on dire.

Pendant que la dette baissait dans les pays du nord de la zone euro, notre dette nationale augmentait tous les ans. Passant d'environ 60 % du PIB - comme en Allemagne - au début des années 2000, à maintenant 120 % du PIB (moins de 80 % en Allemagne).

Selon ce qui fuite de Bercy, on serait sur un système de norme de dépense inspiré de l'objectif national de dépense pour l'assurance maladie qui n'a jamais démontré sa pertinence. Cela n'est pas à la hauteur.

Un cadrage non respecté

Alors que les pays du nord de la zone euro, l'Allemagne en tête, ont compris les enjeux budgétaires depuis la crise de 2008 en freinant la dépense, en baissant les impôts et en se désendettant patiemment année après année grâce à des systèmes de frein à l'endettement, la France a cherché à jouer avec les flexibilités de ces règles, n'a pas baissé ses dépenses publiques tout en foulant allègrement le traité de stabilité européen. Le déficit structurel ne doit pas dépasser 0,5 % du PIB ? La France est avant-crise à plus de 2 % de déficit structurel et après-crise à… encore environ 4 %.

La dernière loi de programmation des finances publiques 2018-2022 avait bien défini des objectifs d'évolution du taux de croissance des dépenses publiques en volume. Mais, las, ce cadrage n'a pas non plus été respecté. Et on attend toujours la nouvelle loi de programmation.

Bruno Le Maire doit aller au bout de sa démarche et faire adopter au niveau de la Constitution un système de frein à l'endettement pour la France. Ce système est très simple : quand la croissance est là, pas d'endettement hors investissements. Cela donnerait déjà un cadre raisonnable opposable à tous les inconscients qui ont la gâchette fiscale facile et qui plombent notre économie depuis trop longtemps.