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Budget 2022 : où est passé le niveau de dépenses publiques ?

Le 9 septembre 2021, Bercy a présenté les sous-jacents macroéconomiques du futur budget 2022. Mais il manque l'essentiel dans ce cadrage : le niveau de dépenses publiques. Après des reports de crédits jamais vus entre 2020 et 2021, nous assistons à une nouvelle méthode : celle de voter des milliards de dépenses publiques… par amendement. Inédit.

Premièrement, le gouvernement conserve une prévision de croissance très prudente, à 6% en 2021 et à 4% en 2022 (en volume), alors même que l'INSEE indique désormais 6,25%… ce qui conduit à penser que l'exécutif se ménage à nouveau des marges de manœuvre afin d'annoncer de bonnes nouvelles sur le plan des finances publiques en fin d'année.

Ensuite, si Bercy précise la plupart des indicateurs fondamentaux des finances publiques, il ne livre pas le niveau des dépenses publiques prévu pour 2022… le gouvernement se réservant ainsi le droit d'en réaliser par amendement au cours de la discussion budgétaire : on parle ici d'une dérive qui pourrait représenter 11 milliards à l'issue des arbitrages de juillet mais pourrait s'y ajouter 5 milliards par amendements pour financer le revenu d'engagement (entre 0,6 et 1 milliard d'euros) et boucler le plan d'investissement 2030 (de 3 à 4 milliards d'euros). D'autres seraient d'ores et déjà budgétisées : les dépenses comme le Beauvau de la Sécurité, les annonces faites à la Ville de Marseille pour un montant encore inconnu.

Le niveau de déficit 2021 est révisé à la baisse de 9,4% à 8,4%, et pour 2022 à 4,8%. Mais celui-ci devrait être en réalité plus élevé, autour de 5% du PIB, suite à l'adoption des amendements de dépenses. Par ailleurs, ne figurera dans le budget 2022 aucune dépense d'urgence car des crédits 2021 déjà financés (par endettement) mais non consommés seront reportés en 2022. En 2022, la dette s'élèverait selon Bercy à 114% du PIB. Un niveau d'endettement qui pourrait être aussi sous-estimé après 116% annoncés pour 2021.

Acrobaties budgétaires

Le Haut Conseil des finances publiques aura bien du mal à cerner ce cadrage budgétaire. Comment vérifier la crédibilité du déficit public alors que l'on ne connaît pas le niveau total des dépenses ? Alors qu'on ne peut pas comparer les dépenses au niveau de recettes totales ? Et si l'on ne parvient pas à juger de la cohérence du déficit, comment le faire s'agissant de la dette, le premier rétroagissant sur le second (hors flux de créances) ?

Bref, en ne donnant pas – une fois de plus – les informations permettant à la vigie des finances publiques de se prononcer sur le sérieux du cadrage budgétaire en toute connaissance de cause, l'exécutif ne respecte pas les droits du Parlement. Il faudra donc attendre la présentation des documents budgétaires, au mieux début octobre ou au pire atteindre le milieu de la discussion budgétaire pour en avoir une idée un peu plus précise voire… attendre la présentation du projet de loi au Sénat, afin d'intégrer l'ensemble des arbitrages gouvernementaux intervenus en séance à l'Assemblée. À la veille de l'élection présidentielle, ces acrobaties budgétaires inédites sont préoccupantes.