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Hommage à Bernard Zimmern

Bernard Zimmern, ingénieur et polytechnicien était aussi entrepreneur dans l’âme. Il avait fondé l’iFRAP en 1985, un think tank militant pour une meilleure gestion des politiques publiques. Les membres de la fondation lui rendent hommage dans une tribune collective*.

C’était d’abord un ingénieur, polytechnicien. Il voulait tout comprendre, savoir comment fonctionnaient les moteurs, les centrales nucléaires, le corps humain, les administrations... Et il fourmillait d’idées dans tous les domaines. Inventeur de talent, il a déposé plus de 500 brevets dans sa carrière, et révolutionné la technologie des compresseurs. Des milliers de personnes ont travaillé à travers le monde grâce à ses inventions.

Lauréat du concours de physique et de version latine, il fut le directeur du département Recherche et Développement pendant 10 ans de la Cegos. Il fut également président-fondateur de la société OMPHALE et de Single Screw Compressor Inc.

Pour sa contribution au prestige de la mécanique française, il avait reçu en 1989 la Médaille Giffard de la Ville de Paris.

Il était également auteur d’ouvrages de référence comme Développement de l’Entreprise et innovation paru en 1970 ainsi que Des profiteurs de l’État chez Plon, et, en 2003, de La dictature des syndicats, aux éditions Albin Michel. Des livres, qui ont connu un grand succès, et demeurent des références.

Il est parti à 90 ans et il avait le regard qui pétillait, plein d’intelligence et de malice. Heureux de côtoyer toutes les générations, toutes les nationalités, Bernard Zimmern était infatigable. Il faisait plusieurs fois le tour du monde par an, il était à New-York ou à Sydney ou à Tokyo ou à Paris... Amoureux des nouvelles technologies, il envoyait ses e-mails à 2 heures du matin, moderne globe-trotteur, créateur de start-up avec 40 ans d’avance.

Entrepreneur dans l’âme, amoureux des défis, il a décidé de fonder l’iFRAP en 1985, un think tank. C’était une idée totalement novatrice: la société civile qui réfléchit sur la gestion publique. Combien de personnes lui ont dit à quel point c’était saugrenu: «pourquoi créer une entité privée pour réfléchir sur la gestion de l’État et des administrations? Alors que tous les meilleurs cerveaux phosphoraient déjà dans le secteur public…».

Il était ingénieur d’abord mais aussi énarque. Il savait combien les administrations françaises sont difficiles à bouger de l’intérieur. Il croyait si fort en la démocratie, dans le sens noble du terme: l’État, la France, appartiennent aux Français pensait-il. Une idée simple au fond mais qui l’a amené à développer des concepts totalement précurseurs dans notre pays:

Évaluer l’action publique et confier ce rôle aux parlementaires qui doivent contrôler l’utilisation des fonds publics. Il ne s’agissait pas simplement de juger le respect de la norme mais bien d’améliorer les politiques publiques, leur efficacité au bénéfice de tous.

Rendre leur place aux entrepreneurs qui ont un rôle à jouer dans le rayonnement de notre pays: développer leurs entreprises pour créer des emplois, améliorer le niveau de vie des Français et le prestige de la France.

Il était également très admiratif des hommes qui avaient su non seulement concevoir mais surtout fabriquer des machines et respectueux des artisans qui dans leurs ateliers savaient transmettre leur savoir aux plus jeunes.

Enfin, il défendait ardemment l’idée que l’État ne peut pas tout et en particulier ne peut pas se substituer aux investisseurs privés qui ont un rôle à jouer: financer les projets nouveaux, les entreprises, les start-ups pour financer l’emploi de demain. Il a popularisé le terme de business angels encore inconnu en France en insistant sur le rôle fondamental de la fiscalité pour faciliter le financement des entreprises. Beaucoup d’emplois ont été créés en France grâce à lui, car il est à l’origine de nombreuses mesures pour financer la création d’entreprises.

Au-delà des entreprises, il croyait à la générosité privée et défendait le mécénat comme une responsabilité de celui qui a réussi à œuvrer pour son pays.

Quel précurseur!

Quelle générosité aussi de celui qui a financé la recherche sur les administrations publiques de ses propres deniers pendant des années. La création de la Fondation iFRAP en 2009 était, disait-il, sa légion d’honneur, il en était fier car il savait que son travail continuerait après lui. Il aura également permis l’éclosion de nombreuses structures œuvrant pour le débat d’idées.

Il s’est battu sans relâche pour ses idées. Il a ainsi contribué à redonner espoir à beaucoup sur les possibilités de redressement de notre pays.

Rendons ici hommage à ce grand esprit parti en cette année de crise 2020 après être venu au monde en 1930, autre année de crise. Jamais il n’est resté passif face au mauvais temps.

Bernard Zimmern peut, dans sa dernière demeure, avoir confiance en ceux qui l’ont aimé, suivi, soutenu. Son action sera perpétuée, les fondations qu’il a créées sont solides.


*Cette tribune est signée par Daniel ARNOUX, le président du Conseil d’Administration de la Fondation iFRAP ; les membres du bureau, Charles-Marie JOTTRAS ; Olivier TARDY ;  Jean-Pierre LAGAY et Isabelle DE KERVILER ; les membres du Conseil, Agnès VERDIER-MOLINIÉ ; Sandrine GORRERI ; Monique OLIVET ; Samuel-Frederic SERVIÈRE ; Manon MEISTERMANN ; Pierrette et Philippe FRANÇOIS, ainsi que toute l’équipe de la Fondation iFRAP.