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«Ce délit d'écocide qui va causer tant de mal à l'économie française...»

Faire reconnaître le crime d'écocide, tel est le rêve des associations écologistes depuis les années 1990. Ce «crime» figurait parmi les propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Un concept rejeté par le Sénat en mai 2019, car trop flou et trop large. Et à cela, s'ajoutait un potentiel risque d'inconstitutionnalité.

Finalement, deux nouveaux délits vont être introduits : un délit général de pollution et un délit de mise en danger de l'environnement. La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a annoncé triomphalement : «le glaive de la justice va s'abattre enfin sur les bandits de l'environnement».

Et les condamnations vont être rudes. Même non intentionnels, ces délits seront condamnables et les sanctions prévues seront lourdes. Même l'imprudence ou l'accident seront punissables : particuliers, entreprises et État pourront être lourdement condamnés. Déjà aujourd'hui, les activités et atteintes à l'environnement sont pénalement sanctionnables, avec des peines allant d'un à deux ans de prison et de 75.000 à 100.000 euros d'amende.

Pour le «délit de pollution», demain les amendes pourront être prononcées de 375.000 à 4,5 millions d'euros avec des peines de 3 à 10 ans d'emprisonnement. Pour le «délit de mise en danger de l'environnement», les amendes seront de 100.000 euros et les peines, d'un an de prison. Une obligation de réparation sera aussi demandée.

Si la Russie, la Géorgie, l'Ukraine, le Kazakhstan ou le Vietnam ont inscrit l'écocide dans leur loi, aucun pays européen ne l'a fait. Il y a bien la Belgique qui y pense, mais uniquement pour que les pays membres de la Cour pénale internationale examinent «la possibilité d'introduire les crimes dits d'écocide» dans le traité.

Ajouter de la norme à la norme

La France est donc clairement en train d'ajouter de la norme à la norme dans le pays qui en compte le plus. Qui va vouloir implanter dès lors une usine en France ? Y construire un immeuble ? Sous peine de se retrouver en prison pour écocide ? Nous sommes déjà selon le classement 2018 du Forum économique mondial, en termes de fardeau administratif pour implanter une usine, 107ème sur 140 pays…

Un nombre conséquent d'enquêtes est déjà exigé, en fonction du terrain, de la faune et de la flore. Les futures usines doivent respecter la biodiversité des lieux et assurer l'ambition environnementale de la France. Cela se traduit dès l'autorisation d'urbanisme, et le permis de construire et les travaux ne débutent qu'une fois l'enquête environnementale menée et le diagnostic d'archéologie préventive accordé, ce qui peut prendre environ 12 mois, contre 3 à 6 aux Pays-Bas ou en Espagne. Avec les délits d'écocide, vont ajouter de nouvelles contraintes et craintes.

On le voit, ce concept d'écocide est trop flou et ses sanctions trop lourdes mais, surtout, son impact sur l'économie française va être considérable. Ce n'est ni plus ni moins qu'une extension «criminalisée» du principe de précaution qui cause déjà beaucoup de dégâts à notre économie. Le délit d'écocide va nécessairement brider encore un peu plus l'innovation et l'emploi en France alors même que le sujet de la réindustrialisation est dans tous les discours. De surcroît, le dispositif ne prévoit pas de principe de réciprocité pour protéger les produits français des produits des pays ne respectant pas le même niveau d'exigence sur le plan concurrentiel. À quel point l'écocide sera-t-il économicide ?