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Balance commerciale de la France : vers les 154 milliards de déficit en 2023

Après un déficit commercial (biens) de 84,8 milliards d'euros pour la France en 2021, on enregistre à nouveau pour les trois premiers trimestres 2022, un déficit de 81,3 milliards qui pourrait atteindre en fin d'année 156 milliards d'euros. Pire, 2023 ne se traduirait pas par une amélioration de la situation, puisque les documents budgétaires annexés au PLF 2023 évoquent un déficit commercial (biens) de 154 milliards "sous l’hypothèse d’une stabilisation des prix des imports d’énergie à leur niveau (...) de 2022". Si l'on élargit la focale en y ajoutant les services et en retenant la définition de la Banque de France, la France a connu sa dernière balance commerciale des biens et services positive en 2005. Depuis, on observe un inexorable déclin alors que nos principaux partenaires sont en excédent. Biens et services confondus, le solde commercial au sens de la balance des paiements atteindrait -73 milliards en 2022 et toujours -65 milliards en 2023. 

Source : Eurostat  [NAMQ_10_GDP]

Source : Eurostat [NAMA_10_GDP]

En ce qui concerne les biens, les données disponibles ne fournissent pas les mêmes montants suivant le périmètre retenu. En retenant les chiffres des comptes nationaux  nous avons un déficit de 74,2 milliards en 2021.

Source : Eurostat [NAMA_10_GDP]

En retenant les comptes du commerce intra et extra-UE par État membre et par groupe de produit CTCI, le déficit de la France passe à 110,3 milliards

Source : Eurostat [EXT_LT_INTRATRD]

Les chiffres de l’Insee donnent :

Du côté des douanes, le solde commercial FAB/FAB (Le prix FAB est le prix d'un bien à la frontière du pays exportateur ou prix d'un service fourni à un non-résident.) affichait un déficit de 84,8 milliards d'euros en 2021 tandis que le déficit, sur les trois premiers trimestres 2022, est déjà de 81,3 milliards.

Quoiqu’il en soit, et même si la conjoncture actuelle aggrave le phénomène, la situation est particulièrement inquiétante pour le commerce extérieur des biens. La tendance de long terme de notre balance commerciale sur les biens depuis 1995 est nettement à la baisse et traduit un problème plus structurel que conjoncturel.

Source : Eurostat, Commerce UE depuis 1988 par CPA 2008 [DS-057009]

Les deux effets combinés pourraient, si le rythme actuel perdure, nous conduire à un déficit de plus de 180 milliards à la fin de cette année. Les excédents que fournissent le commerce extérieur des services ne permettent pas de compenser cela. En effet, sur la base de l’excèdent record du deuxième trimestre 2022 (11,7 milliards), notre déficit resterait de l’ordre de 140 milliards au mieux.

Source : Eurostat [NAMQ_10_GDP]

Le déclin industriel

On ne peut exporter que ce que l’on produit. La baisse de l’industrie manufacturière en France explique notre déficit extérieur. La part de l’industrie manufacturière dans la valeur ajoutée totale est passée de 16,6% en 1995 à 10,6% aujourd’hui. Plus généralement la part des produits exportables (y compris les productions agricoles) baisse aujourd’hui 12,3% de la valeur ajoutée totale, 19,4% en 1995.

Source : Eurostat [NAMQ_10_A10]

Ce déclin s’explique par :

Les faibles marges du secteur marchand non financier.

Source : Eurostat [NASQ_10_NF_TR]

Une faible efficience de la main d’œuvre (la valeur ajoutée pour 1 euro de rémunération versée).

Source : Eurostat [NASQ_10_NF_TR]

Et des impôts sur la production qui n’ont cessé d’augmenter et sont trop élevés

Source : [GOV_10Q_GGNFA]

Redresser une situation qui se dégrade depuis plus de vingt ans suppose une politique stable sur au moins une décennie visant à redresser la profitabilité des entreprises manufacturières par une baisse des coûts de production et une simplification administrative à l’instar du plan Schröder qui a conduit l’industrie allemande à devenir une des plus performantes au monde.