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Fiscalité : les effets pervers du plafonnement

En France, on fabrique des législations complexes, souvent en fonction d’impératifs idéologiques et, lorsque les effets pervers apparaissent, on ne revient pas sur la législation en cause mais on ajoute une nouvelle complication… et de nouveaux effets pervers.

Ainsi en matière fiscale le plafonnement joue à l’encontre des incitations fiscales voulues par le législateur.

Le plafonnement est issu de l’instauration de l’ISF et est censé éviter que la superposition de l’impôt sur le revenu, de la CSG et de l’ISF  devienne confiscatoire ; actuellement il limite l’ISF pour que le total prélevé chaque année ne dépasse pas les ¾ du revenu du contribuable.

Les taux de l’ISF sont restés presque les mêmes depuis son instauration sous forme de l’IGF en 1982 et pendant le même temps l’inflation qui était à deux chiffres est tombée presque à zéro, entraînant avec elle la chute des taux de rendement des biens assujettis à l’ISF. Ainsi de plus en plus de biens ont un rendement après impôts sur le revenu et CSG qui ne suffit plus à payer l’ISF, ce qui rend plus fréquente l’application du plafonnement.

Mais le plafonnement est calculé en comparant le total des impôts au « total des revenus réalisés, imposables ou exonérés... sans considération des exonérations, des seuils, réductions et abattements prévus par le CGI (à l’exception des frais professionnels) ».

Sous réserve de quelques cas particuliers (assurance vie..) pour lesquels le Conseil d’État ou le Conseil Constitutionnel ont donné tort à l’administration, cela veut dire qu’un contribuable qui bénéficie du plafonnement doit éviter de réaliser des revenus exonérés ou de faire des opérations que le législateur a voulu encourager par une réduction d’impôt !  

Ainsi par exemple la réalisation d’une plus-value exonérée d’impôt de 100 euros, entraîne une majoration de 75 euros du plafond d’imposition (qui est donc mécaniquement repoussé vers le haut et se déclenchera plus tardivement) et peut donc se traduire par une majoration de 75 euros de l’ISF à payer après plafonnement, c’est-à-dire qu’économiquement cette plus-value que le législateur a souhaité encourager par une exonération, se trouve en fait taxée à 75%, c’est-à-dire à un taux supérieur au maximum de l’IR !

Si le contribuable réalise un investissement ou un don encouragé par une réduction de l’impôt sur le revenu, cette réduction sera totalement récupérée par une augmentation de l’ISF puisque le total IR+CSG +ISF restera constant.

Dans l’état actuel de la jurisprudence, un contribuable bénéficiant significativement du plafonnement doit s’abstenir de toute vente immobilière si le prix de vente est supérieur au prix d’achat (notamment dans l'ancien), soit il doit savoir qu’une action philanthropique de sa part ou un investissement de type Madelin dans une entreprise ne lui procurera aucune réduction d’impôt !