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Retraites complémentaires : les vrais chiffres de la chute

Des chiffres du Conseil d'orientation des retraites révélés par le quotidien Le Figaro cette semaine ont provoqué pas mal de remous. En cause, la baisse des retraites qui serait à attendre des dernières mesures prises dans le cadre de l'accord interprofessionnel de l'automne dernier par les partenaires sociaux pour sauver les régimes complémentaires. Les chiffres publiés méritent quelques explications.

Dans son édition de mardi, le Figaro révélait avoir eu accès à une note du COR indiquant que selon les simulations effectuées, les mesures prises en octobre dernier par les partenaires sociaux devraient entrainer une baisse de 4,5% à 18% des future pensions. Très précisément les chiffres selon les générations étaient les suivants :

  • 14,5% de perte sur la retraite complémentaire pour un cadre né en 1959 "malgré la mise en place du malus",
  • 16,3% de perte sur la retraite complémentaire pour un cadre né en 1975 "malgré la mise en place du malus",
  • 17% de perte sur la retraite complémentaire pour un cadre né en 1990 "malgré la mise en place du malus".

Il est précisé que la perte sera un peu plus lourde encore pour un salarié non cadre, de l'ordre de 18% pour la génération 1990.

Les explications données à ces chiffres ne sont pas très claires :

  • "plusieurs mesures prises dans le cadre de l'accord du 30 octobre paraphé par les syndicats réformistes CFDT, CFTC et CFE-CGC ainsi que par le patronat, expliquent la baisse relative des pensions des futurs retraités. La première consiste en une décote de 10% de la pension durant  trois ans pour les salariés et cadres qui veulent continuer à partir selon les conditions des régimes de base (62 ans pour l'âge légal). Ce coefficient disparaît si l'assuré attend un an de plus" ;
  • "si le cotisant préfère travailler plus longtemps pour l'éviter [le malus], la perte sera plus faible mais persistera. Elle atteindra 4,5% pour un cadre né en 1959 et jusqu'à 8% pour la génération 1990. Ces pensions seront atrophiées du fait des mesures de baisse du rendement des cotisations retraite Agirc et Arrco".

Si ces chiffres sont exacts ils sont à relativiser :

Comme le montre le tableau ci-dessus, recalculé par Maximis Retraite, il est possible de retrouver les chiffres des simulations du COR. Pour un cadre (première partie du tableau : retraite annuelle de 47.000 euros) de la génération 1990, on observe une perte de l'ordre de celle calculée par le COR, soit 15% (dernière colonne). Mais ce chiffre n'est en fait que la perte sur la retraite complémentaire pendant les 3 ans que dure la décote (en supposant que le cadre ne décale pas son départ à la retraite). L'impact sur une durée moyenne de retraite (25 ans) ne sera que de 7,43% et de 5,7% si l'on calcule l'impact sur l'ensemble de la retraite (RT) et non la seule retraite complémentaire. 

Certes, il ne s'agit pas d'une baisse anecdotique mais l'explication se trouve surtout dans la baisse du rendement décidée par les partenaires sociaux. Rappellons qu'actuellement la part de la pension complémentaire représente 60% de la retraite totale perçue par un cadre contre 30% pour un non cadre. Cette baisse des rendements (sans oublier les différentes hausses de cotisations prises dans le cadre de l'accord) va permettre de sauver, pour encore quelques années, les régimes complémentaires en attendant le retour d'une meilleure cojoncture. 

En attendant la publication définitive des simulations du COR qui auront donné lieu à de nombreux commentaires, il est essentiel de rappeler que les pertes que connaîtront les futures générations ne touchent pas les agents publics. En effet, avec un mode de calcul de la retraite de 75% du traitement brut des 6 derniers mois, il n'est pas question de baisse de rendement. On pourrait même dire que celui-ci est garanti (comme dans les régimes à prestations définies) . Ces révélations du Figaro devraient donc remettre sur la table l'inévitable débat d'une réforme des retraite des fonctionnaires car au rythme où vont les choses plus personne ne pourra soutenir que privé/public, les taux de remplacement sont les mêmes.