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Arrêts maladie : les fonctionnaires privilégiés et plus souvent malades

Le taux d'absentéisme dans le public est deux fois plus élevé que dans le privé à environ 12 % quand il est de 6 % dans le privé. Une bonne raison pour contrôler les arrêts maladie dans le public. Pour l'instant, ils ne sont quasiment jamais contrôlés. Les fonctionnaires en arrêt maladie continuent d'être payés par l'Etat (ils ne cotisent pas pour les arrêts) et n'ont pas les 3 jours de carence qui existent pour les salariés du privé.

Les fonctionnaires ont trois types d'arrêts maladie :

Le Congé maladie ordinaire (CMO) prévu pour les maladies ordinaires, qui ne peut dépasser 12 mois, est pris en charge par l'Etat à 100 % du salaire les 3 premiers mois et 50 % les 9 mois suivants.

Le Congé de longue maladie (CLM) d'une durée maximale de 3 ans pour maladie à caractère invalidant. Le fonctionnaire en CLM conserve l'intégralité de son salaire pendant un an et la moitié de son salaire pendant les deux années suivantes.

Le Congé de longue durée (CLD) pour la tuberculose, maladie mentale, cancer, poliomyélite, déficit immunitaire grave acquis, les fonctionnaires peuvent bénéficier d'un congés de 5 ans avec 100 % du traitement sur trois ans et 50 % les deux années suivantes. Si la maladie a été contractée dans l'exercice des fonctions de l'agent public, il bénéficie de cinq ans de plein traitement et de trois ans de demi-traitement.

Le temps passé en CMO, en CLM ou en CLD est pris en compte pour l'avancement et la retraite. La plupart des mutuelles de la fonction publique complètent le demi-traitement par des allocations journalières qui permettent, le plus souvent, de conserver environ 75 % du traitement net (hors les primes). Ces allocations ne sont pas imposables.

Pour les salariés dépendant de l'Assurance maladie pour le remplacement de leur traitement, les conditions sont bien plus drastiques. En effet, lorsqu'un assuré du régime général est en arrêt maladie, il doit le déclarer sous 48h à la Caisse Nationale d'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS). Après un délai de carence de trois jours durant lequel l'assurance maladie ne versera pas d'IJ, indemnités journalières (sauf exceptions comme pour les ALD, affections de longue durée), l'assuré pourra bénéficier des IJ en compensation de sa perte de salaire.

Les indemnités journalières maladie sont égales à 50 % du salaire journalier de base. Celui-ci est calculé sur la moyenne des salaires des trois derniers mois travaillés précédant l'arrêt de travail. Au 1er janvier 2008, le montant maximum accordé au titre de l'indemnité journalière par l'Assurance Maladie était de 46,22€. Pour les Affections de longue durée (ALD), la maladie doit correspondre à l'une des 31 maladies répertoriées par la Sécurité Sociale pour un arrêt de travail depuis plus de 6 mois.
L'ALD permet : la prise en charge à 100% des soins par la Sécurité Sociale (c'est ce qu'on appelle l'exonération du ticket modérateur) et de percevoir des indemnités journalières dans les conditions évoquées précédemment. L'indemnité journalière peut être revalorisée si l'assuré a plus de 3 enfants à charge ou si l'arrêt-maladie se prolonge au-delà de trois mois.

Bref, quand on regarde en détail les deux régimes, on comprend pourquoi le taux d'absentéisme est plus élevé dans le public. Constatant que ce taux est environ deux fois plus élevé dans la fonction publique, le gouvernement a décidé une expérimentation pour faire contrôler les arrêts maladie des fonctionnaires d'Etat par les médecins inspecteurs de l'Assurance maladie. Une convention de partenariat a été signée sur le sujet entre le directeur de la CNAMTS et le ministre de la fonction publique. Cela ne se fera qu'à titre expérimental dans 6 régions.

Gageons que cela n'aura pas grand résultat et que ce ne sera pas étendu aux autres régions. Une méthode simple serait plutôt de mettre en vigueur dans le public trois jours de carence comme pour le secteur privé et d'aligner les indemnités journalières du public sur celles du privé (soit 46,22 euros par jour), un taux de remplacement à 100 % du salaire pour 3 mois, 1 an, voire 3 ans est peut-être par trop alléchant ?

[(Le cocktail explosif

Continuer à être payé quand on est malade est évidemment très souhaitable. Des entreprises ont mis en place des systèmes mutualisés qui assurent tout ou une partie de ces salaires au moins pendant une certaine durée, moyennant une cotisation de l'employeur et du salarié. Même les 3 jours de carence peuvent être pris en charge par une telle assurance. Face à un système aussi généreux, le risque d'abus existe dans le privé comme dans le public.

Dans les entreprises, c'est l'évaluation régulière des salariés et l'évolution des salaires et des carrières au mérite qui constituent le contrepoids à cette mesure sociale. Les personnes qui sont systématiquement en congés maladie pour agrandir les ponts du mois de mai, ou qui prennent exactement chaque année le maximum de congés maladie payés par l'assureur sont, en général, peu performantes et donc sanctionnées par leur employeur.

Dans la fonction publique, l'absence de cotisation salariée explicitement consacrée au financement du paiement des congés maladie est déjà déresponsabilisante. Mais c'est l'absence de gestion individualisée des ressources humaines qui conduit une mesure sociale positive à des abus inimaginables dans le secteur privé. Surtout quand il s'agit, comme dans la fonction publique d'Etat et notamment à l'Education Nationale, de personnels de niveau cadre. Dans le public, les carrières à l'ancienneté et des systèmes sociaux généreux mais irresponsables forment un cocktail explosif. )]