Actualité

SNCF : 700 millions de surcoûts sans compter les retraites

Dans son rapport sur la gestion des ressources humaines du groupe ferroviaire public, la Cour des comptes passe au crible les différents éléments de la politique sociale pour dénoncer les surcoûts. Le temps de travail dérogatoire ? 200 millions d'euros. La rigidité du système de rémunération ? 350 millions d'euros. Quant à la politique d'aide sociale, les avantages, nombreux, ne sont pas tous valorisés mais on retient 155 millions d'euros pour les seules "facilités de circulation", les billets de train gratuits pour les agents et leur famille.

Au total c'est plus de 700 millions d'euros qui sont identifiés, sans compter le surcoût des retraites. Ce que la Cour avait déjà dénoncé dans son précédent rapport de juillet sur les régimes spéciaux, soit 600 millions d'euros pour la cotisation T2 censée financer les avantages spécifiques du régime spécial de la SNCF.

Il faut reconnaître à la Cour des comptes un certain sens du timing : ainsi la Cour avait publié un rapport sur les avantages des régimes spéciaux des entreprises publiques seulement trois jours avant la remise du rapport Delevoye. Et cette fois c'est quinze jours avant la grande grève du 5 décembre que la Cour décide de sortir son rapport sur la gestion RH à la SNCF. La presse s'est emparée du sujet : les problèmes soulevés sont nombreux et leurs conséquences compte tenu de la taille de l'entreprise se chiffrent en M€. Effectifs, salaires, primes, temps de travail, avantages, toute la politique RH de la SNCF est passée au crible.

La direction se défend dans sa réponse en arguant que durant la période observée (2012-2017) de nombreuses transformations ont été à l'œuvre entre la loi de 2014 créant le groupe public ferroviaire (GPF) et ses trois structures – holding de tête, SNCF Réseau, SNCF Mobilités - et actant le passage à une convention collective pour les salariés de la branche et la loi de 2018 qui met fin au recrutement au statut à partir de 2020.

Mais les adaptations toujours en cours sont nombreuses alors même que l'ouverture à la concurrence s'accélère puisque les transports nationaux (TGV) seront concernés à partir du 1er janvier 2020 et les Intercités et TER à partir de 2023. Sans une amplification de la réforme, la SNCF risque de décrocher. La Cour a donc raison dans un contexte de tension liée à la réforme des retraites qui tétanise le gouvernement et la direction de l'entreprise de rappeler l'urgence des mutations à achever.

Concernant les effectifs...

La Cour des comptes commence par la question des effectifs en rappelant que l'entreprise ferroviaire est avant tout une entreprise de main d’œuvre employant environ 150.000 salariés pour gérer l’infrastructure et opérer le transport de voyageurs et de marchandises. Tout dérapage sur les dépenses de personnel a donc des conséquences directes sur la productivité de l'entreprise. Ce que Jean-Cyril Spinetta dans son rapport de 2018 résumait ainsi : « la situation statutaire de la SNCF, les frais de structure et les excédents de personnel génèrent un écart potentiel de compétitivité d’au moins 30% par rapport aux règles du marché ».

Les effectifs ont été réduits de 4,6% entre 2013 et 2017, soit près de 7.000 ETPT. La baisse a concerné principalement les effectifs statutaires (-10.350 ETPT soit -7,4%), les contractuels ayant augmenté sensiblement. Le groupe a surtout baissé les effectifs des personnels d’exécution, notamment les personnels d’accueil et de vente, principalement chez SNCF Mobilités. Inversement, les effectifs de SNCF Réseau ont progressé assez sensiblement en raison d'une remise à niveau de l'infrastructure. La Cour note que la politique d’externalisation a été particulièrement utilisée par SNCF Réseau pour assurer un plan de charge très élevé. Mais bien que cette politique d’externalisation monte en puissance, la réduction des effectifs dans les métiers de maintenance n’apparait pas.

Le Groupe ferroviaire considère qu’un des premiers axes de réduction des effectifs doit concerner les fonctions support, au regard des comparaisons avec ses principaux concurrents. Pour l’activité TER de SNCF Mobilités, les coûts de structure rapportées au chiffre d’affaires sont de 12% alors qu’ils seraient de 6% pour ses principaux concurrents. L’objectif pour le GPF de ramener à l’horizon 2026 les effectifs des fonctions transverses à 6% de l’ensemble des effectifs du groupe exige d’importants efforts (réduction de 4.000 ETP sur 10 ans).

Face aux politiques de réductions d’effectifs, le groupe doit aussi anticiper les conséquences sur les besoins en personnel, au risque d'affronter des pénuries sur certains métiers (conducteurs) tandis que pour de nombreux agents touchés par des réorganisations, il y aura des surnombres et des difficultés de reclassemen

Sur le temps de travail

Il s'agit là d'un des chantiers que le GPF doit affronter en priorité. Pour réaliser sa trajectoire de réduction des effectifs, le GPF ne s'est pas véritablement attaqué au temps de travail souligne la Cour, alors que d’importants gains de productivité existent.

Reconnaissons au groupe ferroviaire d'avoir entamé une mue avec le passage à un système de convention collective applicable à la branche et la négociation d'accords d'entreprise. Une révolution qui a permis de sortir du carcan du statut. Mais au moment de l'adoption de la convention collective et de l'accord d'entreprise, les concessions ont été trop nombreuses.

L'accord d'entreprise qui devait être l'occasion de remettre en cause un certain nombre de règles d’organisation du travail, a conduit à conserver en quasi-totalité l’ancien règlement (RH0077), dont le GPF estime le surcoût par rapport à l’accord collectif de branche à 200 M€ pour l’ensemble des personnels, roulants et sédentaires.

De surcroît, le GPF souffre d’un nombre important d’accords locaux au niveau des directions régionales ou le plus souvent des établissements, négociés dans le passé, et qui viennent peser encore plus sur la productivité que le RH0077.

  • Pour les conducteurs, le nombre de journées de service (JS) consacrées à la conduite n’est que de 179, soit environ 85% de l’ensemble des journées de service en 2017 (211). 
  • Le temps de conduite effectif dans une journée est également faible. Alors que la durée de travail effectif est de 6h40mn dans la journée, la durée de conduite se situe à environ 3h40mn. L’explication réside dans l’impossibilité de faire effectuer un temps de conduite proche du temps de travail effectif, du fait des contraintes du plan de transport mais aussi des rigidités liées à l’organisation. 
  • La prise en compte dans le temps de travail des temps de déplacement entre la résidence de travail et le lieu de prise de poste, constitue une perte de potentiel humain qui peut être significative.

Pour les sédentaires, on constate des écarts significatifs défavorables à la SNCF :

  • La durée annuelle du temps de travail diffère de 32 heures pour les sédentaires « continuité du trafic » (aiguilleurs, maintenance et travaux) et de 11 heures pour les autres sédentaires entre l’accord d’entreprise et la convention collective, ce qui correspond à un coût équivalent à environ 1.200 ETP.
  • Le nombre de jours non travaillés est supérieur de 8 à 24 jours à la SNCF par rapport à la convention collective. Le temps de travail journalier devrait donc être plus élevé à la SNCF ce qui semble effectif en théorie54 pour les personnels sédentaires dans les fonctions administratives. Mais ce n’est pas toujours la réalité pour les autres personnels sédentaires du fait d’une organisation du travail contrainte par la production (par exemple les plages des chantiers sont fixées en fonction des impératifs de circulation des trains, conduisant à de fortes différences selon la période de la journée ou de la nuit ou selon les régions).

Concernant les carrières

Actuellement, les emplois sont décrits sur la base d’un dictionnaire des filières qui a été construit sur le principe de la spécialisation des tâches. Le dictionnaire des filières est de moins en moins adapté à la réalité des métiers. Au total, le GPF dispose de 250 grades articulés autour de 26 spécialités et 11 filières. Cette rigidité entraine de véritables surcoûts pour la SNCF, qui les estime à environ 350 M€, soit plus que le surcoût de l’accord d’entreprise sur l’organisation du temps de travail et des accords locaux. La Cor souligne que ce sujet est un enjeu important dans le cadre de la négociation de la future convention collective de branche, les concurrents de SNCF Mobilités ne souhaitant pas se voir imposer un modèle proche de celui du GPF.

Et l'absentéisme ?

L’absentéisme a progressé de 10% en 5 ans passant de 17,62 jours d’arrêt par agent en 2012 à près de 19 jours en 2017, progression qui repose sur l'augmentation des arrêts maladie (avec une amélioration en 2017), qui restent cependant au même niveau que les congés pour raison de santé comptabilisés dans la fonction publique d’État (12,3 jours). Ce qui est plus surprenant c'est que le nombre de jours d’arrêt de maladie en 2017 est faible pour les agents de maitrise et les conducteurs (environ 0,75 arrêt par agent). En revanche, il est particulièrement élevé pour les sédentaires et les roulants non conducteurs (proche de 1,5 arrêt par agent). Les taux les plus faibles concernent les métiers opérationnels, y compris ceux dont la pénibilité est avérée (exemple des agents de maintenance et travaux), alors que les métiers les plus sédentaires sont les plus touchés par l’absentéisme. La Cour explique que cet absentéisme est lié à une faible motivation pour ces métiers, sujet par ailleurs à une réorganisation et qui sont souvent maintenus à la demande des exécutifs régionaux pour assurer une présence dans les lieux de vente.

Le système de rémunération...

La Cour décrit un système complexe de qualification position, niveau et échelon pour décrire la progression des carrières. Pour calculer le traitement de base, il convient de prendre en compte, en plus de la position dans la grille salariale, un critère d’ancienneté pure, défini par un certain nombre d’échelons. La majoration afférente peut atteindre en fin de carrière près de 24%.

Cet élément entièrement indépendant de la fonction occupée et de la grille salariale, qui se rajoute à l’effet naturel de l’ancienneté sur l’avancement des carrières, en fait, là encore, une disposition singulière parmi les règles d’évolution des salaires dans les grandes organisations tant publiques que privées. Il a pour conséquence que deux agents exerçant les mêmes fonctions et situés aux mêmes positions, niveau et qualification peuvent percevoir des rémunérations légèrement différentes. Ce mécanisme a même été renforcé et complété, la réforme des retraites de la SNCF s’accompagnant, en 2008, de la création d’un échelon supplémentaire, dans le souci de prendre en compte l’allongement des carrières qui devait en résulter.

Au final, en 2017, 52% des agents du cadre permanent ont bénéficié d’une augmentation individuelle à un titre ou un autre, la part des seuls changements d’échelon atteignant 40%. La Cour relève enfin que la direction de la SNCF a parfois dû reculer alors qu’elle tentait de réformer cette grille salariale et ses règles pour renforcer le rôle des promotions au mérite, les organisations syndicales défendant le critère de l’ancienneté au détriment de la notation au choix, assimilé à un « arbitraire patronal ».

Et les accessoires de rémunération

Les primes sont nombreuses et d'une efficacité limitée.  On compte notamment :

  • L’indemnité de résidence égale à un pourcentage du traitement qui dépend de l’affectation géographique à l’une des trois zones géographiques suivantes : la région parisienne (taux de 2% du traitement), les grands centres de province (taux de 1%) et le reste du territoire qui ne donne pas lieu au paiement de cette indemnité.

La différenciation ainsi introduite en fonction du lieu de résidence ne permet pas de compenser les écarts de coûts du logement et d'améliorer le recrutement en Ile-de-France et la Cour précise que les salariés de province aspirent majoritairement à rester ou retourner dans leur région d’origine, non seulement pour des raisons personnelles, mais aussi parce que la rémunération, en particulier au bout d’une dizaine d’années d’ancienneté, est jugée généralement attrayante au regard des niveaux de prix locaux.

  • Une prime de travail calculée en fonction de la position de rémunération et, dans certains cas, de la nature du travail exercé. Elle représente en moyenne 10% de la rémunération totale. Les personnels ayant exercé des emplois à pénibilité avérée pendant une durée minimale de 20 ou 25 ans touchent une majoration de cette prime de, respectivement, 15 ou 25 € mensuels.

Ce dernier avantage a été négocié là aussi dans le cadre des mesures financières d’accompagnement de la réforme des retraites de 2008. Les agents de conduite touchent, pour leur part, une prime de traction, notamment en fonction du nombre de kilomètres parcourus.

  • Les agents bénéficient, en outre, d’une gratification de vacances, d’un montant uniforme de 400 € augmentée d’un supplément familial, et d’une gratification annuelle d’exploitation égale à 8% de la rémunération fixe du mois de juin (traitement mensuel + indemnité de résidence), sous condition d’un minimum de 140,25 €, toutes deux versées au mois de juin.
  • En décembre, ils touchent une prime de fin d’année (PFA) équivalente au total mensuel du traitement, de l’indemnité de résidence et de la prime de travail.

La partie des rémunérations intrinsèquement liées aux postes occupés (salaire de base, primes non modulables) représente donc environ 86% du total ; celle qui varie en fonction des horaires et de l’organisation du travail, 10%, les éléments dépendant d’une forme de performance (primes modulables, intéressement), un peu plus de 3%, ce qui est peu.

La liste complète de ces primes, indemnités et gratifications en comprend plus de 70, parfois pour des montants très faibles, alors qu'il s'agit de sujétions particulières (2,70 € d’indemnité horaire de nuit, auxquels peuvent s’ajouter 0,20 € en « milieu de nuit ») mais dans plusieurs cas, leur objet semble consister à rémunérer les salariés pour avoir fait ce qu’ils sont censés faire (prime pour détection de rails défectueux dans le cas des personnels chargés du contrôle des voies, ou la prime de parcours dans celui des agents de conduite). La direction explique que les primes dépendant du travail accompli comme de certaines sujétions qui s’y attachent, consiste notamment dans le fait que les agents absents ou inactifs en perdent le bénéfice. Autrement dit c'est un système de primes de présentéisme.

Certaines d'entre elles sont absurdes comme l’indemnité pour connaissance de langues étrangères, attestée par une note au moins égale à 12/20 à une épreuve orale qui distingue selon la langue concernée (l’anglais, l’allemand, l’arabe ou le néerlandais n'étant pas identique à l’espagnol, l’italien ou le portugais). La direction explique que la création de nouveaux services s’accompagne de la mise en place d’indemnités spécifiques qu'il s'avère difficile de remettre en cause même si ces innovations se sont banalisées avec le temps.

Quels niveaux de rémunération moyens et quelle évolution de la masse salariale ?

La rémunération brute a augmenté de 13,1% entre 2010 et 2015 (+2,5% par an), contre +8,5% sur la même période (+1,6% par an) dans le secteur privé et les entreprises publiques selon Dares, relève la Cour mais elle souligne également l'effort de maîtrise des rémunérations unitaires depuis 2015. Les rémunérations, hors avantages sociaux, ne paraissent donc pas sensiblement plus élevées que les moyennes nationales dans les autres secteurs, d’autant qu’il conviendrait de tenir compte de certains facteurs qui tirent les rémunérations à la hausse au GPF à qualifications équivalentes : ancienneté, sujétions...  Elles pourraient même être, dans certains cas, insuffisantes pour attirer les compétences nécessaires. Mais l'importance de l'ancienneté là encore déforme la grille des salaires : les écarts de salaire en fonction de l’ancienneté s’avèrent parfois plus importants qu’en fonction du niveau hiérarchique. Par exemple, les ingénieurs et cadres en début de carrière gagnent en moyenne 2.601 € (part fixe) nettement moins que des agents de maîtrise proches de la retraite (3.663 €). De même, la différence de rémunération parmi les ingénieurs ou cadres selon qu’ils commencent ou terminent leur parcours (3.363 €) dépasse l’écart de salaire entre des cadres en fin de carrière et des agents de maitrise arrivés au même stade (2.301 €).

L'alourdissement des cotisations sociales

Si le total des rémunérations brutes stagne depuis 7 ans, la masse salariale totale continue d’augmenter (+ 7,6% entre 2012 et 2017), en raison de l’alourdissement du poids des cotisations sociales, passées de 32,3% à 36% de celle-ci. L’assurance-vieillesse contribue pour une part importante au surcoût global de charges sociales, et notamment la cotisation T2, aujourd’hui de 13,85%, qui doit refléter les avantages spécifiques du régime spécial de vieillesse de la SNCF et qui représente selon les comptes 2018 de la CPR SNCF, près de 600 M€.

Le dialogue social

Le rapport décrit un nombre important de représentants du personnel et de délégués syndicaux dans un système dérogatoire aux règles du code du travail. Pour les délégués syndicaux, leur nombre n’est pas limité. L’article 4 ouvre également la possibilité de permettre aux organisations syndicales (OS) représentatives d’avoir des agents mis à leur disposition pour exercer des fonctions au sein de l’OS. Ces agents sont dits « en service libre » (ASL) et leur nombre dépend des résultats obtenus par chacune des OS représentatives. Il y a actuellement 174 agents à temps plein.

Concernant les représentants du personnel, le GPF dispose actuellement de 9.500 élus dans les trois instances : 6.770 titulaires et 2.700 suppléants soit un élu pour 15 salariés. Il existe actuellement aux comités d’entreprise (CE) 674 élus titulaires et suppléants, pour les délégués du personnel (DP) 5.672 élus (titulaires et suppléants) et aux comités d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail (CHSCT) 2.996 élus.

Le GPF précise que le temps consacré par les représentants des personnels aux instances représentatives des personnels est évalué à 1.903 équivalents temps plein. Mais comme le reconnaît la Cour ce nombre important de représentants du personnel n’a pas permis de réduire la conflictualité.

L’année 2018 a été une année de très forte mobilisation en raison de la fin annoncée du statut de cheminots, du passage du GPF en société anonyme et de l’ouverture à la concurrence. Les modalités de grève étaient inédites, sous la forme d’une grève dite « perlée », celle-ci consistait à faire grève deux jours sur cinq par semaine pendant trois mois. Mais c’est surtout le coût de cette grève qui a fortement touché le GPF. En effet, celui-ci a estimé qu’elle a coûté 790 M€ soit environ 20 M€ par journée de grève.

Si le service minimum mis en place a apporté certaines améliorations du point de vue de l'employeur, la SNCF, s’estime pénalisée par deux contraintes :

- Les préavis de grève permanents ou de longue durée, avec des motifs assez généraux (salaires, conditions de travail…) qui permettent aux agents de se mettre en grève, sans qu’une négociation préalable soit nécessaire.

- Les grèves de 59 minutes (bien que non majoritaires dans le secteur du transport) ont un impact fort en termes de désorganisation du service. Ce type d’actions est d’autant plus intéressant pour les grévistes qu’il a des conséquences limitées sur leur rémunération (1/160ème du salaire mensuel). Le GPF est sur ce sujet demandeur d’un alignement sur les règles de la fonction publique (retenue du salaire d’1/30ème quelle que soit la durée de la grève dans la journée)

Avantages sociaux

Le rapport de la Cour se conclut sur les différents avantages de la SNCF qui compte tenu de la fin du recrutement au statut, de la réforme des retraites en préparation et de l'ouverture à la concurrence, vont contraindre la SNCF à repenser le cadre global de son pacte social.

Ainsi en est-il des centres médicaux délaissés et qui pose aujourd'hui la question de l'alignement sur le privé avec la mise en place d'une complémentaire qui est aujourd’hui posée par certains syndicats.

La politique de logement de la SNCF qui va bien au-delà de la simple offre de logements et comprend également une aide pour les nouveaux embauchés en Ile de France et dans certaines communes de province, le cautionnement et l’aide sur quittance pour les salariés en difficulté financière. Elle touche donc une part importante du personnel du GPF. Mais dans le parc ICF spécifique à la SNCF on constate une part croissante de retraités ce qui pose la question de l'adéquation de l'offre de logements sociaux avec une politique incitative à travailler en Ile-de-France.

La politique d'aide sociale mobilise des montants élevés : le Comité Central du Groupe Public Ferroviaire (CCGPF) bénéficie d’une contribution aux activités sociales et culturelles représentant 1,721% de la masse salariale du GPF soit environ 100 M€.

Pour sa part, l’action sociale de l’entreprise a conservé en gestion propre toutes les activités ne relevant pas des ASC. L’action sociale bénéficie d’une contribution budgétaire de 65 M€ financée par un prélèvement de 1,1% sur la masse salariale des 3 EPIC, alors qu’elle atteignait 1.275% jusqu’en en 2014. Le nombre de bénéficiaires potentiels atteignait 353.902 en 2017, dont 55% (194.650) de pensionnés. Ce qui là aussi pose question.

Dernier point suscitant le plus de crispation autour de la politique d'aide sociale : la gratuité de circulation sur l’ensemble du réseau ferroviaire pour les agents, leurs familles et les retraités. Comme le dit la Cour, le fait de bénéficier de réductions sur le prix des produits d’une entreprise dans laquelle un agent est salarié est une pratique assez courante. Mais la particularité du GPF tient au périmètre des ayants droits : 1,3 million en 2017, soit près de 20% de plus qu’en 2011. S’agissant du niveau de réduction, il atteint près de 100% pour les agents du GPF en activité et retraités (hormis le coût de certaines réservations) et plus de 90% pour les ayants droit (une partie en gratuité, une autre avec 90% de réduction). Or, dans ce cas aussi, la plupart des entreprises fixent un taux de réduction au maximum à 30% pour éviter que ces avantages en nature soient soumis à cotisations sociales et à l’impôt sur le revenu. L’ensemble des facilités de circulation proposées aux agents et à leurs ayants droit représente un coût de 155 M€.

Au final, ce rapport sonne comme une mise en garde à la veille de la grande grève du 5 décembre qui mobilisera les entreprises publiques avec en pointe la SNCF. Une mise en garde à ne pas céder sur un certain nombre de transformations qui sont nécessaires au sein de l'entreprise publique et qui ont trop longtemps été repoussées. La réponse de la direction et surtout du gouvernement qui indique veiller à "s'assurer, avant toute évolution, de l’impact social de celle-ci sur les droits et garanties attachés aux personnels de la SNCF" montre bien que les pouvoirs publics marchent sur des œufs.