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Un fonctionnaire sur deux : l'OCDE répond à Georges Tron

Quelques flottements ont été perceptibles dernièrement au sein du gouvernement à propos de la règle du « non remplacement de un fonctionnaire sur deux ». Fallait-il ou non la maintenir ? Le ministre de la Fonction publique hésite, François Baroin le recadre. Quant à l'OCDE, dans son dernier rapport intitulé « Etude économique de la France 2011 », elle suggère fortement à la France de maintenir le « un sur deux » et même de supprimer la sacro-sainte règle du versement aux administrations de la moitié des économies réalisées.

La règle du non remplacement d'un fonctionnaire de l'État sur deux partant en retraite n'est pas parfaite. Loin de là. La Fondation iFRAP l'a d'ailleurs amplement critiquée pour le peu d'économies qu'elle a finalement permis de réaliser. La Cour des comptes l'a montré : plus de 70% des économies réalisées ont été reversées aux administrations au lieu de 50%. D'où seulement 230 millions d'économies par an selon le ministère de la Fonction publique au lieu de 1 milliard… Rappelons que le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux ne s'applique pas, au niveau de l'État, à la justice, l'université et l'hôpital et qu'il ne s'applique pas non plus aux collectivités qui ont embauché environ 40.000 personnels ces dernières années.

Si, effectivement, l'État devait revenir, en 2012, au nombre de fonctionnaires d'État que comptait la France en 1990, au global, le nombre de fonctionnaires ne baisserait pas. Mais à un an de la présidentielle, la tentation est grande de laisser tomber une des seules mesures qui soit vraiment efficace pour faire baisser le nombre de fonctionnaires. Une mesure qu'on ne devrait nullement abandonner mais au contraire étendre aux hôpitaux, et aux collectivités. L'OCDE propose même, pour cela une réforme de la Constitution.

Même le ministre de la Fonction publique, Georges Tron, a récemment évoqué la remise en question de cette règle dans une interview à Libération datée du 30 mars : « Je pense notamment que la règle intangible du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne devrait pas se poursuivre après 2012 ». Ce à quoi son Ministre de tutelle, François Baroin avait tout de suite fermement rétorqué sur BFM-TV : « Non. Nous avons un processus de révision général des politiques publiques qui s'est déroulé en deux temps. Une première phase entre 2007 et 2010 qui a permis de supprimer 100.000 postes de fonctionnaires... » « Et nous avons une deuxième vague qui nous emmène jusqu'en 2013 et qui va supprimer encore 100.000 postes ».

L'OCDE vient de donner dans son Etude économique de la France 2011 un conseil à la France : « l'effort de non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite doit être poursuivi tout en limitant les rétrocessions des économies ainsi réalisées. » On ne pourrait être plus clair. Le ministre de Budget avait toutefois confirmé en mars, à l'occasion du 5ème conseil de modernisation des politiques publiques, que le gouvernement continuera à «  reverser la moitié des économies obtenues grâce au non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite » aux administrations. Et ce, alors même que la Cour des compte posait dernièrement la question de la pertinence économique de cette règle en pleine crise de la dette et que l'année dernière, il a fallu valider dans l'urgence un projet de décret d'avance à la commission des finances du Sénat, de 930 millions « indispensables pour assurer la paie de décembre de ces milliers de fonctionnaires ».

D'autant plus que, selon l'OCDE : « La Révision générale des politiques publiques (RGPP), mise en place en 2007 dans le but d'identifier des gains d'efficience, est un outil d'évaluation intéressant mais dont le rendement mesuré en termes d'économies réalisées est jusqu'à présent limité. Il faudrait élargir son champ aux programmes d'investissement et de prestations sociales, ainsi qu'à toutes les administrations publiques. »

Et, au-delà de la RGPP et du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux, se posera aussi inéluctablement la question de l'embauche à vie dans la fonction publique. Rappelons que l'Allemagne fonctionne avec 30% de fonctionnaires en moins par rapport à la France avec 60% d'entre eux sous contrats de droit privé. Le ministre de la fonction publique reconnaît qu'on ne peut faire l'économie du débat sur le sujet : « La France ne peut pas être le seul pays qui s'interdise d'avoir une réflexion sur les fonctionnaires. Et il y a eu un vrai débat dans la majorité. ( …) D'une manière plus large, si Christian Jacob veut lancer le débat, j'y participerai, mais la remise en cause du statut de fonctionnaire, ce n'est pas ma ligne personnelle. »

La ligne est définie : la France, si elle veut renouer avec la croissance, doit continuer les réformes de fond et non s'arrêter alors que si peu a été fait (la RGPP a permis d'économiser 7 milliards entre 2009 et 2011). Diminuer les dépenses publiques n'est plus une question de choix, c'est une obligation.

La réforme de l'État, la baisse des effectifs, la réforme du statut, la modernisation de notre sphère publique ne se feront pas sans objectifs forts. Le message se doit de rester clair : l'avenir de la France passe par un allègement du poids public. Seuls les Français semblent encore l'ignorer. L'OCDE ou le FMI, eux, le savent.