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Sous-préfectures : au moins 64 à supprimer

Les 3 scenarii de la Fondation iFRAP

La France compte aujourd'hui un réseau de 230 sous-préfectures sur le territoire métropolitain et 8 en outre-mer. Cette organisation administrative est basée sur une circonscription, l'arrondissement, dont le nombre initial, « napoléonien » était de 371 en 1800, ramené par une réforme en 1926 de « modernisation de l'État » à 279, mais qui a crû ensuite à nouveau par vagues successives pour atteindre aujourd'hui 330 unités. C'est dire qu'à l'origine, avec un sous-préfet par arrondissement le rapport se situe à environ 1,43 arrondissement/par sous-préfecture en métropole [1]. Après un premier rapport de la Cour des comptes en 2012 (insertion au sein du rapport annuel) sur le sujet, la rationalisation des sous-préfectures est aujourd'hui prise en charge par la MAP (modernisation de l'action publique). La réforme promet d'être ambitieuse [2] avec deux rapports commandés par le ministère de l'Intérieur et le Premier ministre sur la question, dont les attendus devraient être connus sans doute à l'automne pour le prochain CIMAP (conseil de modernisation de l'action publique). Notre analyse montre qu'il est possible de réduire de 28% le nombre de sous-préfectures sans désertifier les territoires les plus isolés.

Avec près de 25.814 fonctionnaires au sein des préfectures et des sous-préfectures, il importe de mieux préciser quelles pourraient être en la matière les marges de manœuvre, sachant que l'ambition des pouvoirs publics devrait être de favoriser une rétractation des services d'États décentralisés, afin de favoriser une mutualisation des guichets des services territoriaux et nationaux déconcentrés au niveau local. La Fondation iFRAP propose trois scénarii possibles afin de tracer ce que pourraient être les perspectives de la réforme.

[*1) Les deux premiers scénarii proposent de tenir compte de la population légale présente dans chaque département*], afin de déterminer un nombre moyen de fonctionnaires pour 10.000 habitants, que l'on se propose de constituer en cible afin de réduire les éventuels écarts par rapport à cette moyenne nationale. La réflexion part donc du nombre de fonctionnaires et pas nécessairement du nombre de préfecture afin d'ajuster les effectifs sans toucher profondément aux structures. La représentation graphique de cet arbitrage est la suivante : elle permet de trier les préfectures et sous-préfectures par département en fonction de leur écart à la moyenne en fonction du taux d'administration.

  • Rapportés aux effectifs préfectoraux mobilisés sur le plan national et hors DOM, les territoires sont classés en fonction d'un taux d'administration croissant. La droite horizontale verte représente le taux d'administration moyen fixé à 4,7 agents préfectoraux pour 10.000 habitants.
  • La droite horizontale violette représente la moyenne en cas de retour de la première part à la précédente moyenne, cette seconde mesure s'établissant à hauteur de 3,7 agents/10.000 habitants.

Les deux ensembles de départements dont les services préfectoraux pourraient être ajustés, sont matérialisés par les ensembles en pointillés bleu et violets. Les sous-préfectures isolées hors DOM, représentent 4.808 agents, tandis que les préfectures rassemblent 19.900 agents environ.

Les résultats obtenus sont les suivants :

  • Hypothèse n°1 : L'ajustement des effectifs sous-préfectoraux s'effectuent de telle sorte que l'on ramène l'ensemble des territoires concernés à un taux d'administration de 4,7/10K hab. Cela conduit alors à une réduction de 1.048 agents, dans 34 départements, conduisant à une suppression de 42 sous-préfectures, soit 18% de l'effectif total.

Légende : bleu (diminution des agents préfectoraux sans suppression de sous-préfectures), jaune (suppression d'1 sous-préfecture), orange (suppression de 2 sous-préfectures), marron (suppression de 3 sous-préfectures).

Sources : Fondation iFRAP 2013 avec www.Lion1906.com

  • Hypothèse n°2 : L'ajustement des effectifs préfectoraux a déjà eu lieu par rapport à la cible de 4,7 agents pour 10.000 habitants. Il est décidé de procéder à une seconde vague de contraction afin d'atteindre la cible dégagée par la nouvelle moyenne, de 3,7 agents/10K habitants. L'opération se solde par la suppression à termes de 2.706 postes d'agents hors DOM, et à la disparition de 94 sous-préfectures, soit 41% de l'effectif total. La carte en serait la suivante :

Légende : bleu (diminution des agents préfectoraux sans suppression de sous-préfectures), jaune (suppression d'1 sous-préfecture), orange (suppression de 2 sous-préfectures), marron (suppression de 3 sous-préfectures).

Sources : Fondation iFRAP 2013 avec www.Lion1906.com

[*2) Le troisième scénario, propose de ne tenir compte que de la densité de population :*] cette approche permet de redresser l'effet porté aux territoires vastes et faiblement peuplés qui sinon verraient leurs sous-préfectures particulièrement sollicitées par rapport aux autres ayant une plus faible dimension (le paradoxe par exemple étant celui du Territoire de Belfort, qui dispose d'une préfecture, alors que son territoire est particulièrement étroit et serait dans la première hypothèse quasiment préservé [3]). En définissant un ratio d'agents préfectoraux par densité de population, l'effort est mieux réparti territorialement. La valeur cible est de 2,7 fonctionnaires/hab/km². Les réductions de poste concerneraient 1.762 agents, aboutissant à la suppression de 64 sous-préfectures, soit 27,8% de l'ensemble, nous sommes donc très voisins des 30% circulant au sein de l'administration. La carte serait alors la suivante :

Légende : bleu (diminution des agents préfectoraux sans suppression de sous-préfectures), jaune (suppression d'1 sous-préfecture), orange (suppression de 2 sous-préfectures), marron (suppression de 3 sous-préfectures), noir (suppressions supérieures à 3).

Sources : Fondation iFRAP 2013 avec www.Lion1906.com

Conclusion

Cette courte étude permet de montrer qu'en dépit des coûts de mutualisation, de substitution (par exemple mise en place de Maisons des services publics en lieu et place des sous-préfectures), et des gains à réaliser en matière de dépenses de personnel et de fonctionnement au niveau de l'État, mais également au niveau local (puisque de nombreuses communes sont en réalité propriétaires des bâtiments qu'elles pourront ensuite réaffecter), la rationalisation des structures est possible. Si l'on fait un petit inventaire de l'ensemble de la répartition des préfectures et sous-préfectures, on constate que pas moins de 47 sous-préfectures en y joignant les DOM ont 10 fonctionnaires ou moins. L'hypothèse 3 en tenant compte de la densité de population, permettrait d'en supprimer entre 26 et 29 environ suivant les imputations choisies. On est loin d'un coup de rabot aveugle et manichéen (urbain/rural par exemple, qui opposerait les territoires) ; il ne s'agit donc pas de supprimer systématiquement les sous-préfectures dans les endroits les plus reculés, mais de préparer une lente évolution vers une administration redimensionnée en fonction des caractéristiques des territoires étudiés. Une modernisation qui fasse une large part à la dématérialisation des relations administration/usagers et à la fusion des guichets étatiques et territoriaux dans les zones rurales où une présence physique soutenue n'est pas forcément indispensable.

[1] Voir par exemple, INSEE, Les circonscriptions administratives en 2012

[2] Selon certains échos, la réduction du nombre de sous-préfectures pourrait atteindre même 30%, soit près de 69 structures. Voir en ce sens, la question posée par Mme le député, Jeanine Dubié au ministre de l'Intérieur Manuel Valls, lors de la séance de Questions au gouvernement du 2 avril 2013.

[3] Nous ne discutons pas ici de la remise à plat du maillage des préfectures elles-mêmes qui pourraient donner lieu également à un autre mécanisme de rationalisation dans le cadre d'un remembrement de la carte départementale.