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COP23 vs l'augmentation de la consommation française d'électricité

Le rapport de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) publié le 24 octobre 2017 constate une augmentation de la consommation française d’électricité. Après des années de stagnation ou de très faible recul (-02% par an), ce document témoigne d’un changement net. Une excellente nouvelle pour notre économie, mais, le jour d'ouverture de la COP23, une remise en cause totale de la stratégie énergétique de la France. Au lieu de se concentrer sur les objectifs fixés à la COP21 (réduire les émissions de CO2), la stratégie votée en 2015 de baisse de la consommation d'électricité et de fermeture de 30% du parc nucléaire en 2025, était incohérente et inapplicable. Par la voix de Nicolas Hulot, le gouvernement vient de l'admettre solennellement, mais il lui restera encore à réviser ses plans pour tenir compte de deux données fondamentales : 1) la consommation d'électricité va augmenter et non pas diminuer si la croissance économique se maintient au niveau souhaité, et 2) il n'est pas accepatble de déployer massivement des énergies renouvelables, mais intermittentes et dont les coûts sont insuppportables pour les consommateurs (éolienne marine : 220 €/MWh contre 50 €/MWh en moyenne sur le marché de l'électricité).    

La crise écononomique de 2008 avait fait chuter de 20% la production industrielle française qui, en 2017, est encore inférieure de 10% à son niveau de 2007. De son côté, en 2015, le revenu moyen par ménage n’avait pas encore retrouvé son niveau de 2008.

Revenu disponible par ménage en 2015

en euros 2015 constants,
source INSEE

Année

Revenu annuel moyen

2015

36 300

2014

36 020

2013

36 120

2012

36 700

2011

37 210

2010

37 190

2009

37 020

2008

36 970

2007

36 510

2006

36 190

Les pannes de ces deux moteurs de l’économie ont naturellement entrainé une rupture dans la croissance de la consommation d’électricité. 

Pendant des années, les courbes de consommation publiées par la CRE étaient proches de celle ci-dessous de novembre 2016, montrant une quasi stabilité de la consommation électrique des particuliers et des services, et une forte baisse de celle de l’industrie.

Le retournement

La dernière statistique publiée par la CRE le 24 octobre 2017 montre au contraire une évolution significative[1] : la consommation d’électricité augmente en France sur un an. Une croissance faible (+0,1%) mais très forte par rapport à l'hypothèse retenue par le plan de transition énergétique de -2% par an. 

La consommation des particuliers est toujours atone, mais celle de l’industrie témoigne d’un fort retournement. D’autant plus que ces statistiques, qui ne portent pas sur un mois mais comparent la consommation des douze derniers mois sur celle des douze mois précédents, sont donc beaucoup moins volatiles. Concrètement, le point publié en octobre 2017 compare les consommations d'octobre 2016 à septembre 2017, avec celles d'octobre 2015 à septembre 2016.

Une très bonne nouvelle

Si cette évolution se confirme comme c’est probable avec une croissance de 1,8% en 2017, ce signal d’une reprise de la production industrielle sera très positif. Sa faiblesse explique largement la situation catastrophique de notre commerce extérieur (–50 milliards d’euros par an), et en partie celle du chômage. L’étape suivante serait une augmentation de la consommation d’électricité des ménages, soit rapidement si leur confiance revient, soit à plus long terme quand le nombre de chômeurs baissera et que l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages se concrétisera. 

Situation des autres énergies

Les évolutions de consommation des autres énergies sont plus difficiles à suivre mensuellement, leur consommation n’étant pas immédiate, et certaines se stockant chez les particuliers comme le fuel domestique. Sur les douze derniers mois, d’après l’UFIP, la consommation brute de produits pétroliers a augmenté de 0,2%. Il faudra attendre mi 2018 le rapport annuel du ministère de l’énergie pour disposer d’un point complet sur la consommation énergétique de la France, corrigée des variations climatiques.   

La stratégie énergétique : l’impasse

Une progression de la consommation d’électricité, et même une simple stabilité, remettent totalement en question le fondement même de la stratégie énergétique française votée en 2015 qui prévoyait une réduction de moitié de la consommation d’énergie en 2050. Deux projets concrets se trouvent du même coup remis en cause : baisse de 30% de la part du nucléaire dans la production d’électricité et fermeture d’une vingtaine de réacteurs d’ici 2025. D’autant plus que les chiffres actuels de consommation ne prennent pas en compte la montée en force des voitures électriques voulue par les gouvernements, souhaitable et très probable. La nouvelle version de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) qui doit être publiée en 2018 devra tenir compte de données réalistes, admettre que les objectifs fixés par le gouvernement précédent sont intenables, ne plus confondre lutte contre les émissions de CO2 et baisse de la consommation d'électricité, et proposer pour l’avenir un plan techniquement faisable, et socialement et éonomiquement supportable.  


[1] Ces données ne tiennent pas compte des quantités d’électricité auto-consommée sans transiter par les réseaux. Une sous-estimation encore marginale mais qui devra être corrigée à l’avenir.