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Une révolution copernicienne pour contrôler les déficits

1.460 milliards de dépenses publiques programmées pour 2022 et peut-être beaucoup plus avec les annonces des dernières semaines (+5,2 milliards d'euros dans le plan de résilience…). Nos dépenses publiques plafonnent toujours entre 59 et 60 % de la richesse nationale. Record mondial. Avec l'impression que l'on va continuer à dépenser sans compter, sans contrôle, dans les prochaines années.

Cette tribune a été publiée dans les pages des Echos, le lundi 28 mars 2022.

Ce ne sont pas les programmes de certains candidats à la présidentielle qui vont nous convaincre du contraire. Jean-Luc Mélenchon propose une hausse de la dépense publique de 259 milliards d'euros, 287 milliards pour celui de Fabien Roussel, 92 milliards pour celui de Yannick Jadot, 54 milliards pour Anne Hidalgo… des sommes monstrueuses et totalement infinançables. Sauf à faire exploser la pression fiscale sur nos entreprises et nos ménages.

Des mesures totalement « hors sol »

C'est ce que propose Jean-Luc Mélenchon avec 193 milliards d'euros d'impôts de plus par an ou Fabien Roussel avec 131 milliards d'euros de plus. Au risque de faire partir de France des centaines de milliards d'euros et beaucoup de nos talentueux concitoyens. Des mesures « hors sol ». Mais qui s'en soucie ? Personne ! Car nous nous sommes habitués, ces dernières années, à des finances publiques en forme de puits sans fond abondé par des milliards « gratuits » d'argent public tombant du ciel.

Las ! Cette période où l'on pouvait s'endetter toujours plus en payant toujours moins de charges de la dette touche à sa fin. Ce moment de bascule va nous imposer de nous montrer enfin responsables dans l'utilisation des deniers publics. Peut-on continuer à s'endetter pour payer le chômage, les retraites, les augmentations salariales publiques, bref des dépenses courantes, et non des seuls investissements ? La réponse est clairement non.

Une révolte copernicienne, traduite dans les institutions

D'où l'urgence de mettre dans notre constitution une règle de frein à l'endettement comme en Allemagne, en Suisse ou en Suède. D'où l'urgence de dire qu'on ne doit plus pouvoir endetter la France en période de croissance.

Cette réforme serait copernicienne. Elle devrait, pour être efficace, se décliner sur le plan institutionnel et pratique : augmenter les pouvoirs du Haut Conseil des finances publiques pour en faire un véritable comité budgétaire indépendant. Transformer l'Insee en autorité administrative indépendante en dehors de la tutelle de Bercy. Créer, auprès du Parlement, un vrai organe d'évaluation des politiques publiques afin de contrôler toutes les dépenses et toutes les recettes publiques en accord avec la mission de contrôle du Parlement de l'article 24 de la Constitution.

Sécuriser, enfin, le périmètre des dépenses publiques en le soumettant entièrement au regard du Parlement. Et créer, pour compléter les deux révisions organiques du 28 décembre 2021 et du 14 mars 2022, une loi de financement des collectivités territoriales tout en transformant la loi de financement de la Sécurité sociale en loi de financement de la protection sociale.

Agir maintenant, avant qu'il ne soit trop tard

Un vaste chantier qui permettrait d'avancer sur des sujets cruciaux : embaucher les managers publics sous contrat à durée déterminée avec des objectifs publics définis par l'exécutif et contrôlés par le Parlement. Ouvrir la saisine du Conseil constitutionnel des études d'impact des projets de lois à 60 parlementaires. Enfin, mettre en place une comptabilité analytique normalisée pour l'ensemble des collectivités territoriales sur le modèle italien des « coûts standards » afin de rendre leurs politiques comparables. Tout est à faire. C'est maintenant qu'il faut agir, avant qu'il ne soit trop tard.