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Exécution budgétaire 2024 : un mois de février meilleur que prévu

La publication de la situation mensuelle budgétaire de l’Etat (SMB) de février 2024, permet de voir une budgétaire meilleure qu’en février 2023. Le solde budgétaire mensuel affiche un déficit de -44 milliards d’euros soit 6,3 milliards d’euros de moins que celui affiché il y a un an en février 2023. Cette situation « meilleure » que prévue doit cependant être relativisée car le déficit représente déjà 30% du déficit budgétaire prévu en LFI 2024 contre seulement 29% pour le solde de février 2023 par rapport à son niveau d’exécution définitive. En effet, la LFI 2024 a prévu un solde budgétaire général de -147 milliards d’euros contre -173 milliards en 2023, soit une amélioration de près de 26 milliards d’euros. Il convient donc de rester très prudent sur la dynamique budgétaire en cours, cependant il apparaît d’ores-et-déjà deux points positifs sans savoir s’ils seront suffisants pour atteindre les objectifs fixés malgré la révision de croissance du Gouvernement intervenue le 18 février dernier de 1,4% à 1% :

  • Les dépenses du budget général sont en baisse de -3,5 milliards d’euros par rapport à février 2023 au mois le mois et de seulement +0,53 milliard d’euros en présentation cumulée (janvier + février).
  • Les recettes sont également en nette augmentation (+9,73 milliards en février 2024 par rapport à février 2023 au mois le mois et +7,54 milliards en présentation cumulée).

Un niveau de dépenses contenu en février 2024 – grâce aux annulations de crédits ?

Le Gouvernement a décidé de revoir sa prévision de croissance de 1,4% à 1% le 18 février 2024. A la clé, le risque de voir le déficit public déraper à nouveau. Alors que le solde public d’exécution 2023 à -5,5% au lieu des -4,9% anticipé n’était pas connu, cette simple révision pourrait faire plonger le déficit à -4,8% du PIB au lieu des -4,4% anticipés. Avec l’effet base 2023, les prévisions 2024 pourraient être encore plus dégrader et dépasser également les 5%. Raison pour laquelle le Gouvernement a immédiatement annoncé l’annulation de près de 10 milliards de crédits[1] au niveau de l’Etat.

 202220232024Cumul fin févrierCumul fin févrierCumul fin févrierVariations
 Exécution retraitéExécutionLFI202220232024Févr. 24-23
Solde du BG-158,195-168,159-141,323-30,246-41,946-34,9397,007
Dépenses (BG + PSR)519,917522,693519,90869,56174,56775,0990,532
Recettes361,722354,534378,58539,31532,62140,167,539
Solde des comptes spéciaux6,726-5,101-5,728-7,38-8,378-9,093-0,715
dont avances aux collectivités territoriales2,214-3,604-2,415-7,285-7,904-7,1280,776
Solde des budgets annexes27 160    
Solde général-151,441-173,26-146,892-37,626-50,324-44,0326,292

Source : SMB février 2024, présentation Fondation iFRAP avril 2024.

La situation reste toutefois fragile dans la mesure où le pourcentage de consommation des crédits et d’encaissement des recettes aboutissent à un niveau de déficit public en février 2024 de 30% par rapport à la LFI, là où celui-ci ressortait à 29% en février 2023 par rapport à l’exécution 2023 et de 24,8% en février 2022 par rapport à son niveau d’exécution 2022.

 Cumul fin févrierCumul fin févrierCumul fin février
 202220232024
Solde du BG19,1%24,9%24,7%
Dépenses (BG + PSR)13,4%14,3%14,4%
Recettes10,9%9,2%10,6%
Solde des comptes spéciaux-109,7%164,2%158,7%
dont avances aux collectivités territoriales-329,0%219,3%295,2%
Solde des budgets annexes   
Solde général24,8%29,0%30,0%

Source : SMB février 2024, présentation Fondation iFRAP avril 2024.

Cependant, à y regarder de plus près, l’exécution des dépenses semble bien meilleure que l’année précédente en février (vision au mois le mois) :

Situation au mois le moisJanvierFévrierJanvierFévrierJanvierFévrierVariationVariation
 En Milliards d’euros202220222023202320242024Janvier 2024-2023Février 2024-2023
Solde du BG-11,887-18,359-16,351-25,595-22,605-12,334-6,25413,261
Dépenses (BG + PSR)35,94033,62139,37035,19743,43731,6624,067-3,535
Recettes24,05215,26323,0199,60220,83219,328-2,1879,726
Solde des comptes spéciaux-4,039-3,341-4,797-3,581-3,137-5,9561,660-2,375
dont avances aux collectivités territoriales-3,584-3,701-4,017-3,887-3,449-3,6790,5680,208
Solde des budgets annexes        
Solde général-15,926-21,700-21,148-29,176-25,742-18,290-4,59410,886

Source : SMB février 2024, retraitements Fondation iFRAP avril 2024.

En effet, les dépenses en février 2024 sont plus basses que celles intervenues à la même époque en février 2023 de près de -3,5 milliards d’euros sur le champ du budget général et des prélèvements sur recettes (PSR). Cette bonne tenue doit permettre de manifester les premiers effets tangibles de l’annulation des 10 milliards d’euros du décret du 21 février.

Dans la mesure où le mois de janvier a plutôt été décevant[2], la situation cumulée fait apparaître cependant en très légère hausse (+0,5 milliard d’euros) :

Situation cumuléeJanvierFévrierJanvierFévrierJanvierFévrierVariationVariation
 202220222023202320242024Janvier 2024-2023Février 2024-2023
Solde du BG-11,887-30,246-16,351-41,946-22,605-34,939-6,2547,007
Dépenses (BG + PSR)35,94069,56139,37074,56743,43775,0994,0670,532
Recettes24,05239,31523,01932,62120,83240,16-2,1877,539
Solde des comptes spéciaux-4,039-7,38-4,797-8,378-3,137-9,0931,660-0,715
dont avances aux collectivités territoriales-3,584-7,285-4,017-7,904-3,449-7,1280,5680,776
Solde des budgets annexes        
Solde général-15,926-37,626-21,148-50,324-25,742-44,032-4,5946,292

Source : SMB février 2024, retraitements Fondation iFRAP avril 2024.

Dans le détail, l’effort semble avoir plutôt porté sur les dépenses d’intervention (-5,7 milliards d’euros) au mois le mois, les dépenses d’investissement (-0,3 milliard) et les dépenses d’opérations financières (-19 millions d’euros). Les prélèvements en direction de l’UE sont également en baisse de -0,6 milliard d’euros ainsi qu’en direction des collectivités territoriales (-23 millions d’euros).

Situation au mois le moisJanvierFévrierJanvierFévrierVariationVariation
 2023202320242024janv. 24-janv 23Février 24-février 23
Dotation des pouvoirs publics1,07701,13800,0610
Dépenses de personnel12,14611,86813,19412,5721,0480,704
Dépenses de fonctionnement7,6212,3189,4343,5161,8131,198
Charges de la dette de l'Etat0,5560,4380,5611,5590,0051,121
Dépenses d'investissement2,2851,1922,7650,9630,48-0,229
Dépenses d'intervention10,65813,71111,2727,9990,614-5,712
Dépenses d'opérations financières0,1490,0780,1140,059-0,035-0,019
Dépenses du budget général34,4929,60638,47826,6683,988-2,938
PSR au profit des collectivités territoriales2,7963,0913,1943,0680,398-0,023
PSR au profit de l'Union européenne2,0842,5001,7651,926-0,319-0,574
Prélèvements sur recettes4,885,5914,9594,9940,079-0,597
Dépenses totales (budget général et PSR)39,3735,19743,43731,6624,067-3,535

Source : SMB février 2024, retraitements Fondation iFRAP avril 2024.

En présentation cumulée, l’équation semble également meilleure sur ces postes hors investissement (des coups partis en janvier n’ont pas été rattrapés en février). 

Situation cumuléeJanvierFévrierJanvierFévrierVariationVariation
 2023202320242024janv. 24-janv 23Février 24-février 23
Dotation des pouvoirs publics1,0771,0771,1381,1380,0610,061
Dépenses de personnel12,14624,01413,19425,7661,0481,752
Dépenses de fonctionnement7,6219,9399,43412,951,8133,011
Charges de la dette de l'Etat0,5560,9940,5612,120,0051,126
Dépenses d'investissement2,2853,4772,7653,7280,480,251
Dépenses d'intervention10,65824,36911,27219,2710,614-5,098
Dépenses d'opérations financières0,1490,2270,1140,173-0,035-0,054
Dépenses du budget général34,4964,09638,47865,1463,9881,05
PSR au profit des collectivités territoriales2,7965,8873,1946,2620,3980,375
PSR au profit de l'Union européenne2,0844,5841,7653,691-0,319-0,893
Prélèvements sur recettes4,8810,4714,9599,9530,079-0,518
Dépenses totales (budget général et PSR)39,3774,56743,43775,0994,0670,532

Source : SMB février 2024, retraitements Fondation iFRAP avril 2024.

En revanche les dépenses de fonctionnement sont en hausse, +3 milliards en situation cumulée en février 2024 par rapport à février 2023 tout comme les dépenses de personnel (+1,75 milliard d’euros). Mais aussi en cumulé et sans que le Gouvernement ne puisse agir dessus, le niveau de la charge de la dette de l’Etat qui augmente de près de 1,126 milliards en comptabilité budgétaire. 

Des recettes fiscales dynamiques, poussées par les encaissements de TVA

S’agissant maintenant des recettes budgétaires de l’Etat, celles-ci apparaissent en hausse au mois le mois de +9,7 milliards d’euros dont +9,8 milliards d’euros de recettes fiscales et en légère diminution s'agissant des recettes non fiscales (-11 millions d'euros) et attributions de produits (-44 millions d'euros). 

Situation au mois le moisJanvierFévrierJanvierFévrierJanvierFévrier
 2023202320242024janv. 24-janv 23Février 24-février 23
Recettes fiscales22,3268,73820,00618,544-2,329,806
Impôt sur le revenu2,3888,142,3378,038-0,051-0,102
Impôt sur les sociétés0,428-0,420,511-0,3690,0830,051
TICPE1,0091,4970,991,302-0,019-0,195
TVA14,307-3,55312,0266,51-2,28110,063
Autres recettes fiscales4,1943,0754,1413,064-0,053-0,011
Recettes non fiscales0,5690,6020,5260,564-0,043-0,038
Recettes du BG (hors FDC et AdP)22,8969,33920,53219,108-2,3649,769
FDC et AdP 0,1230,2630,3010,2190,178-0,044
Recettes du BG (y.c. FDC et AdP)23,0199,60220,83219,328-2,1879,726

Source : SMB février 2024, retraitements Fondation iFRAP avril 2024.

La situation est peu différente au niveau cumulé où la bonne dynamique des recettes compense le moment plus difficile du mois précédent de janvier. Les recettes fiscales cumulées sont en hausse de 7,5 milliards d’euros par rapport à la situation budgétaire un an plus tôt, les recettes non fiscales sont en retrait de -81 millions d’euros et les fonds de concours et attributions de produit sont en hausse de 134 millions d’euros.

Situation cumuléeJanvierFévrierJanvierFévrierVariationVariation
 2023202320242024janv. 24-janv 23Février 24-février 23
Recettes fiscales22,32631,06420,00638,55-2,327,486
Impôt sur le revenu2,38810,5282,33710,375-0,051-0,153
Impôt sur les sociétés0,4280,0080,5110,1420,0830,134
TICPE1,0092,5060,992,292-0,019-0,214
TVA14,30710,75412,02618,536-2,2817,782
Autres recettes fiscales4,1947,2694,1417,205-0,053-0,064
Recettes non fiscales0,5691,1710,5261,09-0,043-0,081
Recettes du BG (hors FDC et AdP)22,89632,23520,53239,64-2,3647,405
FDC et AdP 0,1230,3860,3010,520,1780,134
Recettes du BG (y.c. FDC et AdP)23,01932,62120,83240,16-2,1877,539

Source : SMB février 2024, retraitements Fondation iFRAP avril 2024.

Il apparaît clairement que les recettes budgétaires de l’Etat et en particulier les recettes fiscales sont portées par les encaissements de TVA, en hausse de 10 milliards au mois le mois et de 7,8 milliards en cumulé en février 2024 par rapport à février 2023. En février 2023 la situation était même négative dans la mesure où les remboursements de TVA dépassaient les encaissements sur le mois. En février 2024 les encaisses du mois s’élèvent à 6,5 milliards d’euros soit une situation cumulée de 18 milliards. Il faudra cependant attendre de voir la situation de mars pour savoir si la situation continue à se conforter ou se détériore avec des remboursements (décaissements) de TVA importants et simplement décalés dans le temps. 

Pour les autres rentrées fiscales, la situation est plus tangente : l’IS est en légère augmentation au mois le mois et en cumulé (+51 millions d’euros et +134 millions respectivement), en lien avec la croissance des bénéfices en 2023, tandis que les rentrées d’IR baissent par rapport à l’année précédente ce qui témoigne du ralentissement de la croissance 2024 dans le cadre des prélèvements au PAS (même si in fine ce sont les revenus 2023 qui sont taxés à l’impôt en 2024). Même constat s’agissant de la TICPE et plus largement des autres recettes fiscales nettes. 

Conclusion

Il est sans doute trop tôt pour dire si les annulations de crédits décidées en dépense seront susceptibles de véritablement la freiner, pas plus qu’il n’est encore possible de voir si la révision à la baisse de la croissance va faire fléchir sensiblement les recettes de l’Etat. L’IR comme l’IS sont assis sur la croissance de l’année passée en frappant les revenus et les bénéfices des individus et des personnes morales (hors prélèvements à la source) constitués un an plus tôt. La TVA est impactée par le niveau de consommation tout comme la TICPE et les taxes énergétiques. Il faut donc attendre la situation de mars pour y avoir déjà plus claire, mais l’exécution du mois de février semble pour le moment corriger celle de janvier. 


[1] Décret n°2024-124 du 21 février 2024 https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=7gYhb8aQj8EjMmkeyHvZbXtIAj0JcaOEDqWIfclQeWk=

[2] Voir notre note précédente de mars 2024 : https://www.ifrap.org/budget-et-fiscalite/execution-budgetaire-2024-le-mois-de-janvier-deja-tres-deficitaire