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Présentation du déficit public et réalisme budgétaire

Les prévisions au doigt mouillé de Bercy

Les déficits publics, depuis 1973, reviennent à la une à chaque rentrée parlementaire. Le budget de l'Etat 2009, présenté vendredi par Eric Woerth et Christine Lagarde, ne déroge pas à la règle et prévoit un déficit de 52,1 milliards d'euros, soit 2,7% du PIB. Quel crédit accorder à cette annonce ? L'observation des années passées montre que le gouvernement est, dans la plupart des cas, incapable de prévoir le déficit dans sa loi de finances initiale (LFI). Ainsi en moyenne sur les 20 dernières années, le déficit public a été minoré de 25% entre la LFI et son exécution réellement constatée. Le déficit prévu dans la LFI est d'ailleurs le plus souvent une reconduction de celui observé l'année précédente, avec un écart moyen de seulement 5% (minoré évidemment).

Déficits publics programmés et réellement exécutés en milliards d'euros

Parmi les raisons de l'impossibilité pour le gouvernement de prévoir l'étendue du déficit dans la construction de son budget :

Tout d'abord, le gouvernement fait preuve d'optimisme dans l'estimation de croissance. Le taux prévu pour bâtir le budget est toujours pris dans l'échelle haute des prédictions de croissance, contrairement à d'autres pays, comme l'Angleterre, où c'est plutôt l'hypothèse basse qui sert d'étalon au budget. Deuxième raison, le monopole de Bercy dans la production du document budgétaire et des prévisions. Alors que l'Allemagne dispose de 5 instituts de statistiques indépendants pour prévoir la croissance, que l'Angleterre confronte ses évaluations à celles du NAO (National audit office) et de cabinets privés, l'administration française continue à jouer l'oracle, laissant aux parlementaires le loisir d'interpréter ses prévisions évasives.

Il est temps que la France se dote d'un instrument plus efficace que sa récente programmation budgétaire pluriannuelle. Non contraignante, cette présentation budgétaire a malheureusement été préférée à l'introduction dans notre constitution de la règle d'or britannique. Cette règle a pour elle le mérite de contraindre les dépenses de fonctionnement à l'équilibre et de faire reporter les déficits uniquement sur les dépenses d'investissement. Associée à la volonté de conserver une norme de dépense égale à zéro en volume, il aurait alors été possible de fixer comme objectif une évolution à zéro en valeur (à montant de crédits constants) entre deux exercices. Si les parlementaires disposaient des moyens de proposer une modélisation du budget selon des critères résolument prudents et de les confronter aux chiffres de Bercy, il pourrait résulter un cycle vertueux permettant - sauf crise majeure - de n'avoir que de bonnes surprises budgétaires.