Les milliards d’euros perdus par la fraude sont un thème récurrent dans le débat public. Lorsqu’on parle de fraude, beaucoup pensent à la fraude fiscale… En 2019, les services de l’État ont recouvré près de 12 milliards d’euros en luttant contre la fraude fiscale mais cette fraude sanctionnée ne serait qu’un morceau de l’iceberg.

Qu’en est-il de la fraude sociale ? Étonnamment, ce sujet très documenté fait l’objet d’estimations contradictoires. Les récents rapports montrent une prise de conscience tardive et des évaluations parcellaires des caisses sociales. Il existe de nombreuses zones d’ombre sur son évaluation, un flou d’autant moins acceptable que la France se situe, en Europe, en tête des prestations sociales rapportées au PIB (31,7%) et que le risque de fraude est élevé sur nos 742 milliards de prestations versées.

Déjà, la notion de fraude est encore difficile à caractériser pour les organismes de protection sociale : elle englobe la fraude intentionnelle, la simple omission ou encore, l'erreur administrative. Certaines branches comptent également, la fraude "évitée" dans leurs données ce qui fausse les résultats.

La Fondation iFRAP a souhaité, dans cette étude, mettre à plat les données et objectiver les estimations de la fraude aux prestations sociales.

  • Notre évaluation, est que son montant atteint au moins 10 milliards d'euros sur les prestations non contributives qui apparaissent comme les plus sujettes à la fraude ;
  • Le montant des versements non dus est, lui, estimé à près de 14 milliards ;
  • Il existe un risque potentiel de fraude de 2 à 2,7 milliards d'euros sur les numéros de Sécurité sociale et de 5,8 milliards d'euros sur les cartes Vitales "fantômes" ;
  • Enfin, la fraude aux cotisations sociales représente une fourchette entre 7 et 25 milliards d'euros.

Autant de lacunes que nos administrations ont encore du mal à regarder en face mais qui représentent une fraude sociale de 20 milliards d'euros minimum.

La Fondation iFRAP formule plusieurs propositions pour améliorer l'efficacité de notre système social et viser le paiement à bon droit :

  1. Il faut accélérer la transition numérique pour sécuriser l’identité des bénéficiaires, améliorer les échanges d’informations pour coller au plus près de la situation des bénéficiaires et utiliser massivement l'analyse de données (datamining) ;
  2. Il faut revoir l’organisation de notre système de protection sociale, qu’il s’agisse du nombre de guichets (environ 330) ou du nombre de prestations (environ 150), ce qui contribue en partie à la fraude. Il est possible de viser entre 5 et 10 milliards d'euros d'économies sur les 46 milliards de coûts de gestion de notre système de protection sociale ;
  3. Nous recommandons de tendre vers une allocation sociale unique, fusion des aides sous conditions de ressources, et d'en plafonner le montant global au niveau du Smic. Il s'en suivra des économies sur les prestations sociales que nous évaluons autour de 5 milliards d'euros sur les 125 milliards de prestations non contributives.