La crise du Covid-19 a occasionné une augmentation très importante de l’endettement public, spécifiquement en France. En 2020, il représente 115,7% du PIB. Et cette trajectoire va se poursuivre malheureusement : en 2021, 122,4% du PIB, 128% d’ici 2030 à politique inchangée d’après la commission Arthuis (avec une croissance à 1,5% en moyenne).

Le volume des émissions de dette publique toutes administrations confondues sera de près de 400 milliards d’euros en 2021 selon nos estimations. Ce qui représente un appel aux marchés financiers et aux banques, considérable. Rien que pour l’Etat nous aurons besoin d’emprunter plus de 260 milliards d’euros (net des rachats de dette) à moyen et long terme et sans doute 290 milliards en termes d'émissions brutes (y compris les rachats anticipés de dette). D’ailleurs cette politique de rachats pourrait s’intensifier afin de passer le mur des 178 milliards de dettes anciennes (hors crise) qui devront être refinancés en 2023.

Cette augmentation inédite de l’endettement public pourrait fragiliser la crédibilité de la France au sein de la zone euro, même si c'est davantage l'évolution de la trajectoire de nos finances publiques qui pourrait y contribuer. Elle se surajoute à une dette non résorbée lors de la phase de croissance précédente.

D’ailleurs la valeur nette patrimoniale publique fond comme neige au soleil. Elle ne représente plus que 167 milliards d’euros en 2020 alors qu’elle représentait 796 milliards en 2010. Un chiffre qui montre bien à quel point le financement à crédit des dépenses d’exploitation se substitue aux investissements.

Par ailleurs, la France dispose d'une dette fortement internationalisée à raison de la qualité de son crédit. Sa dette négociable est aujourd’hui détenue à 51,3% par des non-résidents ; 25% sont hors zone euro. En particulier, des banques centrales étrangères (et notamment asiatiques) surtout dans le cadre de la gestion de leurs réserves de change internationales. Cela pose question en matière d’indépendance nationale.

Notre dette a aussi une maturité plus faible que celle de certains pays comme la Belgique, l’Irlande ou le Royaume-Uni, qui disposent soit de programmes de financement modestes (30 à 40 milliards d'euros) ce qui leur confère une plus grande latitude pour refixer la maturité de leur dette par rapport à l'épargne disponible en zone euro ou de fonds de pension investissant à très long terme (30 ans et plus). Bien qu'aucun impératif ne se pose aujourd'hui, un dilemme pourrait survenir en cas de remontée violente des taux d'intérêt ou d'un choc inflationniste : augmenter la détention domestique ou augmenter la maturité moyenne.

Un dilemme dont on ne peut sortir favorablement que par la mise en place d’une politique de désendettement.

Ces contraintes importantes sur nos finances publiques malgré la poursuite de la politique accommodante de la BCE se conjuguent au risque d’une reprise de l’inflation se communicant aux rendements obligataires. Une certitude, les taux bas de la BCE ne dureront pas éternellement. Déjà le Brésil, la Turquie et la Russie viennent de rehausser leurs propres taux directeurs.

Par ailleurs d'autres pays développés suivent cette tendance comme la Norvège, tandis que le Japon commence à resserrer sa politique monétaire.

  • La Fondation iFRAP demande la publication des détenteurs de la dette française en % par pays ;
  • La Fondation iFRAP propose le cantonnement de la dette Covid, de relever la maturité de la dette française, et d'entamer des réformes structurelles permettant le désendettement.