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La France est le 7ème pays de l'OCDE où l’emploi public est plus élevé

... et ça, depuis 2007

La publication du rapport Government at a Glance 2023 de l’OCDE permet de faire le point sur la dynamique de l’emploi public en France. En étendant cette réflexion aux précédents rapports, il est possible d’avoir une idée précise des cinétiques comparées de l’emploi public au sein de l’emploi total pour les différents pays de l’OCDE. Or il apparaît que la situation de la France par rapport à ces partenaires est pour le moins contrastée. 

Premier point,  la France est le 7ème pays dont l’emploi public est le plus élevé dans l’emploi total et ce, depuis 2007... mais si l’on regarde la proportion de l’emploi public dans l’emploi total entre 2007 et 2021, on s’aperçoit que celui-ci baisse de près de 1,22 point, soit la 4ème plus importante baisse en proportion après le Royaume-Uni (-2,37 points), la Grèce (-1,88 point) et Israël (-1,68 point). Cette cinétique baissière se poursuit même entre 2019 et 2021 pour la France (-0,19 point) uniquement. Cependant cette tendance n’est pas suffisante pour permettre à la France changer de place dans le classement global des pays où la proportion de l’emploi public est le plus fort dans l’emploi total. Elle reste toujours 7ème et ce sur 15 ans. Sans changement structurel fort (modification du périmètre des administrations publiques) ou ralentissement drastique de la croissance de l’emploi public, la France ne peut modifier son classement significativement.  

La France 7ème pays dont l’emploi public est le plus élevé dans l’emploi total depuis 2007

Si l’on considère la dynamique de l’emploi public dans l’emploi total sur longue période (15 ans), on constate que sa position reste fixe dans le classement OCDE entre 2007 et 2021 à la 7ème position[1] :

Source: OECD Government at a glance 2021 et 2023. 

Cela démontre qu’en dépit d’une cinétique favorable – la baisse continue de l’emploi public par rapport à l’emploi total (qui croit donc plus vite que lui) – celle-ci n’est pas suffisante pour faire changer notre pays de position et reculer dans le classement. En 2007 l’emploi public en France représentait 22,35% de l’emploi total, puis 21,31% en 2019 et enfin 21,13% en 2021 à égalité avec le taux d’emploi public de la Lettonie.

Mais la France est le seuil pays à afficher une baisse continue sur la période 2007-2021

Lorsque l’on compare les écarts entre 2021 et 2019 et entre 2021 et 2007, la France est le seuil pays à voir continument baisser son emploi public dans l’emploi total sur la période.

Source: OECD Government at a glance 2021 et 2023.

Plus précisément l’emploi baisse entre 2007 et 2019 de -1,04 point, puis entre 2019 et 2021 de -0,19 point pour un total de -1,22 point. Si le Royaume-Uni fait mieux sur la période (-2,37 points), il part d’une baisse massive de l’emploi public entre 2007 et 2019 (-3,28 points) puis inverse la tendance entre 2019 et 2021 avec +0,92 point. La même dynamique étant à l’œuvre en Israël (+1,27 point entre 2019 et 2021) et en Grèce (+0,08 point). 

Il faut y voir les conséquences des réformes de Nicolas Sarkozy sur l’Etat avec la RGPP et la logique de 1 sur 2, puis de François Hollande qui stabilise l’emploi dans la FPE (hors éducation) et parvient à le baisser dans la FPT (baisse de la DGF), enfin sous le 1er mandat d’Emmanuel Macron, la poursuite de la tendance précédente avec les Pactes de Cahors jusqu’à leur suspension en 2020. Il s’agit de tendances modératrices au numérateur, tandis qu’au dénominateur l’emploi total et donc sa composante privée ne jouit progressivement d’un enrichissement de la croissance en emploi qu’à partir de 2015, le T2 2015 affichant un point haut du chômage à 10,5% de la population active. 

On constate donc que c’est la différence de cinétique entre l’emploi public et l’emploi privé qui dans le cas de la France permet d’expliquer le recul de l’emploi public dans l’emploi total sur longue période, avec un effet d’emballement à compter de la période 2019-2021 puisque l’emploi privé qui croissait de presque +0,13 point de plus entre 2007 et 2019 en moyenne/an puis croît désormais de 1,3 point/an ensuite, crise Covid incluse. 

En moyenne

Var 2007-2019

Var 2019-2021

Total

0,36%

1,5%

Privé

0,39%

1,7%

Public

0,26%

0,5%

Différentiel de cinétique public privé

-0,1

-1,3

Source : INSEE, Emploi total et sa décomposition trimestrielle au T4

Changer d’un rang à la baisse supposerait un volontarisme important

Si maintenant on regarde la ventilation des classements en 2021, on s’aperçoit que pour perdre une place au classement et devenir 8ème, la France devrait voir son emploi public représenter 20,93% de son emploi total, soit baisser de -0,19 points. 

Si l’on exploite les statistiques de l’emploi de l’OCDE[2], la France disposait en 2021 d’une population au travail de près de 29,293 millions. Le secteur public employait donc 6,18 millions de personnes physiques de tous statuts. Baisser de 0,19 points représenterait une « sortie » du secteur public d’environ -55.657 employés.  En revanche revenir à la moyenne OCDE soit 18,63% de la population active nécessiterait une réforme systémique, puisqu’il s’agirait d’atteindre -676.000 agents publics.

Il serait également possible de parvenir à cet objectif en continuant à augmenter la population en emploi. Avec un taux de chômage en 2021 à hauteur de 7,4%, l’effort pour faire en sorte que l’emploi public revienne au niveau de la moyenne de l’OCDE soit 18,6% impliquerait que le chômage tombe à 5,26% (soit sans doute à un niveau infra-structurel dit frictionnel étant donné le niveau actuel de la croissance potentielle[3]) et que ce différentiel soit entièrement couvert par une croissance des seuls emplois du secteur privé. 

Volume de la masse salariale publique, d’après l’OCDE la France est 8ème en 2021

S’agissant de la masse salariale publique (salaire brut + cotisations employeurs), la France se classe 8ème en 2021 et 4ème (mais les données sont provisoires) pour 2022[4]. En 2021 le poids des dépenses publiques de rémunération représentait 12,56% du PIB, contre 12,2% du PIB en 2019 et 12,39% du PIB en 2007. La France ferait donc du sur-place entre 2007 et 2022 quant au poids de ses dépenses de rémunération puisqu’en 2022 ces dernières atteindraient 12,4% du PIB. Par contre elle baisserait dans le classement passant de la 5ème place en 2007 à la 9ème place en 2019 pour redescendre à la 8ème en 2021.

Source : OCDE, Government at a glance 2023Note de lecture: En 2022 (données provisoires car incomplètes pour l’ensemble des pays), le poids des rémunérations publiques en France représentait 12,4% du PIB classant la France au 4ème rang des pays aux dépenses salariales publiques les plus élevées de l’OCDE.

Source : OCDE, Government at a glance 2023 et OCDE database (avril 2024)

La France se retrouve donc classée en 2021 derrière l’Islande (1er) avec un poids de rémunérations publiques de 15,74% du PIB, le Danemark (2ème) avec 14,89%, la Norvège (3ème) avec 13,91% du PIB, le Costa Rica (4ème) avec 12,86% du PIB, le Canada (5ème) avec 12,83% du PIB, la Finlande (6ème) avec 12,79% du PIB et la Slovénie (7ème) avec 12,67% du PIB. 

La France est donc le 4ème pays de l’UE pour le poids de ses rémunérations publiques les plus élevés derrière le Danemark (1er), suivi par la Finlande (2ème) et la Slovénie (3ème). La moyenne des pays de l'OCDE appartenant à l'UE se montant à 11,14% du PIB, le poids des rémunérations publiques en France se situe 1,42 point au-dessus (soit environ +38 milliards d'euros en 2021. Cet écart baisse par rapport à 2019 (+1,5 point) et par rapport à 2007 (+1,9 point). S’agissant de l’Europe prise dans son ensemble cette fois, la France est 6ème.


[1] Ce qui n’est pas le cas par exemple de l’Estonie qui était 8ème en 2007 (20,73% d’emploi public dans l’emploi total) puis 6ème en 2019 (22%) et enfin 5ème en 2021 (23,43%). 

[2] https://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=SNA_TABLE3 

[3] Voir banque de France, Bulletin n°251/1 – Mars avril 2024, https://www.banque-france.fr/fr/publications-et-statistiques/publications/comment-expliquer-les-pertes-de-productivite-observees-en-france-depuis-la-periode-pre-covid et les perspectives à 5 ans du chômage structurel qui ne sont aujourd’hui plus d’actualité, voir Billet Benassy-Quéré, 5 octobre 2022, https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/2022/10/05/chacun-cherche-sa-croissance-potentielle ainsi que https://www.vie-publique.fr/fiches/270250-quelles-differences-entre-faible-niveau-de-chomage-et-plein-emploi même en généralisant le télétravail, https://www.banque-france.fr/fr/publications-et-statistiques/publications/le-teletravail-une-opportunite-de-reduire-le-chomage-frictionnel

[4] Bascule sur le nouveau site Data de l’OCDE.