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Les chiffres du "choc de simplification"

Deux ans après l'annonce du « choc de simplification », Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification, présentait le 3 juin, 92 nouvelles mesures pour simplifier la vie des particuliers et des entreprises. Il est donc temps de tirer un bilan d’étape. D’après le gouvernement -3,3 milliards d’euros d’économies ont déjà été dégagés grâce à la simplification mais il faut garder à l’esprit que ces gains cumulés sont en bruts. En retirant, sur la même période, les coûts engendrés par l’inflation normative, on arrive à un gain de seulement -1,46 milliard d’économies. En effet, les -3,3 milliards de gains annoncés (un peu trop) triomphalement par le gouvernement se séparent en deux catégories :

  • les gagnants qui sont les particuliers, qui affichent un gain de -1,01 milliard d’euros grâce à la simplification, et les collectivités territoriales (-214 millions).
  •  les perdants  qui sont les entreprises, qui affichent une perte de +1,09 milliard d’euros à cause des nouvelles normes adoptées en parallèle de la simplification. 

Il faut dire que la simplification pour les entreprises n’a pas réussi à compenser le flux de nouvelles réglementations : la hausse de la complexité administrative a engendré une perte de compétitivité de +39 millions d’euros pour le secteur marchand. Il faudra donc encore de nombreuses vagues de simplification pour arriver aux -11 milliards d’économies cumulées attendues pour 2017.

L’inflation normative bloque la simplification du côté des entreprises

Les gains estimés par les services du Premier ministre du « choc de simplification » sont officiellement de -1,58 milliard sur la période allant de septembre 2013 à avril 2015 puisque la machine administrative tourne toujours… surtout du côté des entreprises pour lesquelles le gouvernement adopte une attitude contradictoire. En effet dans le même laps de temps, les diverses normes et réglementations entrées en vigueur ont pesé sur le secteur marchand pour un coût supplémentaire de +39 millions d’euros. 

Source : Service du Premier ministre.

L’effort de simplification pour les entreprises s’est uniquement fait ressentir de septembre 2013 à septembre 2014 avec des économies nettes pour l’entreprise de -597,94 millions d’euros (voir tableaux ci-dessous). Sauf que, dès l’année suivante, la pression normative s’est accrue sur les entreprises avec un coût supplémentaire de +651,87 millions pour un gain de seulement -14,7 millions d'euros de septembre 2014 à avril 2015 (voir les tableaux ci-dessous).

Source : Service du Premier ministre et calcul de la Fondation iFRAP.

En rythme annualisé et à réglementation constante, la hausse des coûts supplémentaires que devront supporter les entreprises sera de plus de +1,09 milliard pour un « gain » issu du choc de simplification de seulement -25 millions d’euros en 2015. Pour les particuliers le résultat de la simplification est un peu plus flatteur avec un gain de plus de -1,01 milliard depuis septembre 2014 (voir tableau ci-dessous).

Effet des mesures de simplification annualisées entre septembre 2014 et septembre 2015 à réglementation constante

Source : Service du Premier ministre et calcul de la Fondation iFRAP 

Ainsi, le « choc de simplification » peine, deux ans après son lancement avec un résultat d’ensemble de seulement -138 millions d’euros malgré l’objectif affiché d’atteindre les -11 milliards d’économies d’ici 2017. Cela explique probablement pourquoi le gouvernement est obligé de sortir à échéances rapprochées de nouvelles vagues de simplifications afin de contrebalancer l’inflation réglementaire et législative pour que le bilan normatif reste positif. Si les 92 nouvelles mesures peuvent permettre de rattraper quelque peu le retard déjà pris, il va falloir très rapidement annoncer d’autres mesures pour atteindre le cap des -11 milliards d'euros. Et ce, sans pouvoir préjuger du résultat net final en 2017 compte tenu de l’instabilité normative.

Peut-on atteindre les 11 milliards de gain d’ici 2017 ?

Pour atteindre les 11 milliards de gains cumulés, il faut que le gouvernement tienne le rythme. À ce sujet un premier bilan d’étape peut être tiré sur la mise en œuvre des 368 mesures qui ont été identifiées dans le cadre du « choc de simplification » depuis 2013. Plus de la moitié sont « en cours de mise en œuvre » tandis que près de 40% d’entre elles sont effectives.

Ce qui est une bonne nouvelle côté chiffrage car des gains additionnels peuvent apparaître (voir graphique ci-dessous) afin de rattraper la trajectoire (nous l'avons supposée linéaire, mais il s'agit d'une présentation théorique puisqu'aucune cible annuelle n'a été publiée).

Source : Fondation iFRAP* la période allant de sept. 2014 à sept. 2015 est calculée en rythme annualisé sans les nouvelles mesures et à réglementation constante.

  • Sur les près de 275 mesures qui concernent l’entreprise 38% sont en vigueur telles que le « marché public simplifié » qui permet de faciliter l’accès des entreprises aux marchés publics et de faire acte de candidature uniquement grâce à leur numéro SIRET, ou l’assouplissement de l’interdiction absolue pour les apprentis ou les salariés de moins de 18 ans d’effectuer des travaux en hauteur.  D’autres grandes mesures phares du choc de simplification tardent à se déployer comme la fiche de paie simplifiée qui a été lancée en décembre 2014 et qui a pour but d’améliorer sa lisibilité pour les salariés et de faciliter la vie quotidienne des entreprises. Un groupe de travail planche actuellement sur le sujet avec pour objectif de proposer un nouveau format allégé d’ici janvier 2016.
  • Concernant les 95 mesures touchant les particuliers, le bilan est lui aussi mitigé avec seulement 46% effectives et 54% toujours « en cours de mise en œuvre ».