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Proxirail : la face cachée du fret SNCF

On apprend désormais que la SNCF, afin d'améliorer le résultat sa branche fret, structurellement déficitaire, compte acquérir la société Géodis (bénéficiaire). Les montages financiers acrobatiques de la SNCF nous ont en effet habitués à ce genre d'opérations de cession d'activités non rentables et d'acquisition de sociétés profitables. Cela reste dans la logique d'un stratégie de compétitivité. Ce qui n'est pas responsable, en revanche, c'est de faire payer ces choix stratégiques à l'Etat. On pense évidemment à la création de Réseau ferré de France, qui avait conduit à « effacer » des comptes de la SNCF une dette de 20,5 milliards d'euros en 1997 (dette 2007 de la SNCF : 4,5 milliards d'euros). On oublie également bien trop souvent de mentionner les 10 milliards d'euros de dette transférés au service annexe d'amortissement de la dette (SAAD). Enfin, on sait que les subventions versées chaque année par les pouvoirs publics à la SNCF dépassent de beaucoup ses bénéfices, puisqu'ils avoisinent les 4,5 milliards d'euros. Dans la même logique, cette opération « mains propres » de la SNCF suit une autre décision, qui a été assez peu médiatisée : la cession à un ensemble d'acteurs publics de l'activité non rentable de chargement et déchargement de wagons isolés. c'est la revue Regards sur l'actualité de la documentation française qui relate l'historique de la création de Proxirail dans son numéro de janvier 2008 :

« Le 5 [ndlr, septembre 2007], à la suite de la publication par la SNCF d'une perte courante de 260 millions d'euros pour sa branche fret en 2006, Olivier Marambaud, directeur général délégué du fret SNCF, annonce l'arrêt du chargement et déchargement de wagons de marchandises « isolés » dans 262 gares françaises, à compter du 30 novembre, et confirme que les efforts de productivité impliquent des réductions d'emplois », dans une proportion encore à déterminer. Réaction : les syndicats de cheminots de la SNCF demandent à être reçus « dans les huit jours » par le Premier ministre pour débattre de la situation du fret ferroviaire et reportent au 19 septembre leur décision sur d'éventuelles actions ; l'association écologiste les Amis de la Terre demande à Anne-Marie Idrac, présidente de la SNCF, de surseoir à toute décision de réduction de la capacité du fret ferroviaire jusqu'à la tenue du grenelle de l'environnement les 24 et 25 octobre. Le même jour, la direction de la SNCF dément formellement « tout chiffre de suppressions d'emplois ». Le 10, à l'issue de sa rencontre avec les syndicats de cheminots, Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports, déclare qu'« il y a un avenir pour le fret » et que la « SNCF a le devoir d'organiser les choses mieux ». Le même jour, ouverture de la ligne de ferroutage Perpignan-Luxembourg avec vingt camions à bord. Le 1er, lors de la fête de l'Humanité [ndlr, on appréciera la date choisie], O. Marambaud demande que l'Etat prenne aussi ses responsabilités » pour favoriser le transport de marchandises par le rail . Le 19, D. Bussereau affirme que l'Etat va « aider » le fret ferroviaire à « regagner des parts de marché ». Le 26, huit fédérations de cheminots adressent un courrier commun à J.-L. Borloo pour dénoncer des décisions, notamment sur le fret, contraires à une politique de transports en faveur du développement durable ». Le même jour à Orléans, D. Bussereau préside la signature du protocole d'accord pour la création du premier opérateur de fret de proximité, Proxirail, pour assurer le transport de marchandises par wagons isolés que la SNCF a décidé d'abandonner. »

On peut douter que cette nouvelle stratégie mise en place permettra enfin de dégager les bénéfices suffisants pour provisionner les engagements de retraites d'environ 100 milliards d'euros, qui, contrairement à ce que les normes comptables exigent, ont été « rayés » des bilans en 2007, et faussent complètement les comptes. De plus, il reste toujours l'épineux problème de toutes ces structures non rentables que la SNCF laisse derrière elle et qui consomment de l'argent public. Ne parle-t-on pas actuellement de réduire la dépense publique ?