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L'augmentation des capitaux propres des PME : entre subventions et allègements des charges

On sait que les entreprises disposent de deux manières de financer leurs investissements : le financement interne (autofinancement) et le financement externe (appel public à l'épargne ou crédits bancaires). Des entreprises peuvent aussi bénéficier d'aides publiques qui font partie de l'autofinancement.

Les capitaux propres sont composés du capital initial, des augmentations de capital et des primes d'émission, et enfin des mises en réserve alimentées par les bénéfices et prélevées sur l'autofinancement. Pour les banques et les créanciers, ils constituent la garantie de solvabilité en concurrence avec les emprunts à long terme, mais avec l'avantage de ne pas peser sur le résultat.

La part des capitaux propres dans le bilan des entreprises industrielles en France s'est inscrite en progression sensible (de 26% en 1987 à 37% en 1995) [1]. Cette augmentation s'est poursuivit à un rythme très lent à partir de 1993 (« Modes de financement des entreprises allemandes et françaises », Bulletin de la Banque de France, n°70, octobre 1999).

Le niveau atteint est-il suffisant ?
Pour répondre à cette question, comparons avec quelques grandes nations.

Part des fonds propres dans le bilan des PME industrielles en 2006 (en %)
FranceAllemagneItalieEspagneEtats-Unis
Petites entreprises 40,1 28,5 47,5 47,5 43,3
Moyennes entreprises 38,1 35,0 47,0 28,9 44,7
Source : Conseil des prélèvements obligatoires, Rapport octobre 2009

Aujourd'hui, on constate que le ratio moyen « capitaux propres/total de bilan » de l'industrie manufacturière place globalement la France dans une position moins avantageuse à l'exception de l'Allemagne.

Le cas particulier de l'Allemagne

Des facteurs structurels nous expliquent les spécificités de ce pays. Les capitaux propres ne constituent qu'une part mineure du financement des entreprises (Bundesbank, Monthly Report, January 2009, P.41), la majeure partie des capitaux étant apportée par les banques qui sont souvent créancières et actionnaires de la même entreprise (rôle joué par la Hausbank que l'on traduit tantôt par « banque principale », « banque maison », ou « banque familiale » dans l'accès au crédit bancaire ou aux programmes d'aide publique en matière de financement de l'entreprise). En outre, l'Allemagne a longtemps cherché à promouvoir un niveau élevé de protection juridique des créanciers, par opposition à des pays qui, traditionnellement, privilégient la préservation des emprunteurs et la sauvegarde des entreprises (France, Etats-Unis) [2]. Enfin, les entreprises allemandes sont marquées par l'importance des provisions et des charges différées comme moyens de financement. Notamment les provisions pour retraites, très importantes [3], qui ont longtemps été considérées comme des quasi fonds propres en Allemagne.

Conclusion

Par comparaison, en France, les capitaux propres des PME sont plus élevés et représentent environ 150 milliards en 2007 (INSEE, base de données ALISSE). Cette même année, l'accroissement de capitaux propres se situait autour de 27 milliards. Dans ces conditions, et face à un manque criant d'autofinancement, difficile d'imaginer l'impact d'un déblocage de 200 millions d'euros annoncé par le gouvernement le mois dernier et destiné à renforcer les fonds propres des PME. D'autant que l'argent provient des entreprises : plus de 80% des prélèvements obligatoires sont faits sur les entreprises. En outre, le coût d'intermédiation relatif aux prélèvements et à la redistribution n'est pas nul. La collecte des impôts en France, présenterait un coût supérieur de 20% à la moyenne européenne. D'où l'importance de cibler les interventions publiques sur le financement en amorçage où se joue la croissance des entreprises.

[1] La fin des années 1980 et le début des années 1990 ont été marqués par la désintermédiation financière et une croissance économique plus soutenue.

[2] Or, avec la crise, l'Allemagne a réformé son droit afin de se rapprocher du modèle français.

[3] Responsables du financement des retraites de leurs employés, les sociétés allemandes doivent en effet constituer des provisions pour couvrir les prestations futures.