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Réforme des retraites : agir avant la révolte des actifs

Attention, les ergoteurs et les ratiocineurs sont à l'œuvre

Le sommet social qui s'est tenu cette semaine à l'Elysée a fixé pour septembre 2010 la réforme des retraites. Pour équilibrer les comptes, différents leviers sont possibles : âge de la retraite, durée ou montant de cotisations, etc. Et bien entendu, nombreuses sont les voix qui s'élèvent contre toute réforme ambitieuse et notamment contre toute modification allant vers plus d'égalité entre les retraites du secteur public et du secteur privé.

Pourtant, il y avait déjà tout dans ce petit livre très pédagogique, le Livre Blanc sur les retraites de Michel Rocard publié en 1991. Les deux problèmes essentiels, les déficits et les inégalités public / privé y étaient parfaitement décrits et leurs causes aussi. Les solutions en découlaient donc de façon évidente. Depuis le rapport Rocard, la pile des nouveaux rapports, comptes rendus de colloques, enquêtes en France et à l'étranger dépasse 1 mètre de haut. Sans compter les nombreux livres qui ont été publiés sur le sujet. Tous ont confirmé le diagnostic Rocard. Personne n'en doutait, mais le but avoué de ces exercices était de « construire du consensus ». Le mode de travail du Conseil d'Orientation des Retraites (COR) semblait particulièrement adapté à cet objectif, tous les intéressés, Etat, experts, syndicats, entreprises publiques, caisses de retraite étant largement représentés.

La tentation de toujours repousser la décision

Faute de direction (ou pour retarder le moment d'en fixer une), ces études se sont lancées dans des raffinements très intéressants d'un point de vue académique mais excessifs et illusoires du point de vue des décideurs. Faire varier le taux de natalité de 1,9 à 2,1, l'allongement de l'espérance de vie de 2 ou 3 mois par an, le taux de chômage de 4 à 7%, est intéressant mais ne fournit aucune aide aux décisions de fond qu'il faut prendre. Le problème n'est pas de savoir si le déficit en 2040 sera de 39 ou de 41 milliards d'euros, mais de mettre en place des mécanismes qui s'adapteront automatiquement aux circonstances futures : allongement progressif des années de travail, alignement des conditions entre le public, les autres régimes spéciaux et le privé, fusion des Caisses existantes sous le contrôle des partenaires sociaux, et ouverture d'une partie capitalisation.

En Suède, vingt années de réflexion ont abouti à la mise en place d'un système de ce type, entièrement nouveau, équilibré à long terme et soutenu par la Droite et par la Gauche. En France, vingt années d'études et de concertation n'ont apparemment servi à rien puisqu'en 2010, presque une génération plus tard, la principale crainte des syndicats est de voir des décisions prises « dans la précipitation ».

Réparer la lâcheté initiale

En réalité, tout cela était connu dès 1982 quand la retraite à 60 ans a été décidée, donc bien avant le Livre Blanc de 1991. Les effets à venir du papy-boom, de l'allongement de l'espérance de vie, de la baisse de la natalité, de la hausse du niveau de retraite des nouveaux retraités étaient inéluctables. Ceux qui ont décidé la retraite à 60 ans pour tous et pour toujours en vue de gagner les élections portent une lourde responsabilité.

Sans réforme et pour maintenir le niveau des retraites, d'après le COR, le taux de prélèvement sur les actifs devrait être augmenté d'un montant équivalent à 9 points de cotisation. Ceci ne sera pas supportable par notre économie, générera plus de chômage et ne sera pas toléré par les jeunes actifs qui refuseront à juste titre de cotiser pour leurs parents et grands-parents irresponsables.

La page "SNCF" du rapport Rocard était simple mais percutante :
il ne restait plus qu'à agir

Déficit des retraites pour la SNCF