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2 000 milliards de dette : merci aux « réformateurs » qui n'ont rien réformé !

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Cette tribune a été publié dans le FigaroVox, le mardi 1er juillet.

2.000 milliards de dette, voilà à quoi nous amène de repousser constamment les réformes, de procrastiner en politique, de regarder avant tout la prochaine échéance électorale et de dire, comme nous l'avons entendu tant de fois au Parlement : « mais pourquoi parlez-vous tant de la dette, la charge de la dette est stable ! » En plus, en disant cela, ils avaient l'air fier, les membres des commissions des finances, façon c'est nous qui, habilement, nous jouons des marchés. Sous prétexte que tout euro d'argent public dépensé ressortira bien un jour dans l'économie, en consommation par exemple, nous avons inventé, quand tous les pays commençaient à réduire la voilure, la dépense publique double crème, les échelons protéiformes et les doublons centraux locaux et sociaux.

Partout, on a ouvert des guichets sociaux et des guichets pour tout (54.000 accueils physiques sur l'ensemble du territoire, 500 par département…). On avait 40% des communes de l'Union européenne ? On a inventé les intercommunalité et on a fait passer la masse salariale des communes et interco de 23 milliards d'euros en 2002 à 34 milliards d'euros en 2012… On voulait décentraliser la gestion publique ? On a gardé les effectifs au niveau de l'État et on a embauché au niveau local. On avait toujours trop d'agents au niveau de l'État ? On a embauché massivement dans les agences de l'État… Bref, on a gagné du temps tout en perdant peu à peu toute crédibilité avec force présentations ministérielles expliquant toujours, quel que soit le gouvernement en place, que dans deux ans, voire trois maximum, on allait revenir à l'équilibre. Par ailleurs, on a annoncé des milliards et des milliards d'économies. Tout cela a fait pschitt.

Les dépenses publiques ont continué d'augmenter et nous sommes à 57,1% de dépenses publiques par rapport au PIB et à presque 94% de dette. Aucune réforme de structure. Les réformes, pour la plupart, ont été faites pour dire « on a coché la case de cette réforme » et on a pu « aller au 20 heures pour en parler aux Français » mais quid des effets bénéfiques de ces réformes en terme d'économies ? En fait, avant, on ne l'a pas calculé. Après peut-être ? Non il n'y a pas eu d'évaluation à la sortie ! Si, en réalité, il y a eu des évaluations comme par exemple sur les très minces économies sur le non remplacement d'un départ sur deux à la retraite (plus de 70% des économies ont été reversées en primes aux agents) mais ces évaluations n'ont pas été publiées (cf. le rapport 2012 de l'IGF sur la maîtrise des dépenses de l'État). Maintenant, on annonce 50 milliards d'économies dont les trois quarts ne sont pas documentés. Malgré ces 50 milliards en partie virtuels, dans la trajectoire présentée à Bruxelles par la France, on ne sera pas, en 2017, à 1.200 milliards de dépenses publiques comme en 2014 mais à 1.261 milliards. Et en 2016, on ne sera plus à 93,6% de dette par rapport au PIB mais à 94,2%. Cherchez l'erreur. Inutile de chercher UN responsable, il est vraisemblable que tous les gouvernements et Parlements successifs le soient un peu. Cela dit, les 2.000 milliards de dette ne seront pas épongés immédiatement. Aujourd'hui, ce qu'il faut viser, c'est, hors charge de la dette (47 milliards), de ne plus être en déficit et donc d'arrêter la boule de neige de la dette. Pour cela, il n'y a qu'un seul chemin possible : moins de dépenses publiques (viser un maximum de 52% de dépenses publiques par rapport au PIB) et plus de création de richesse dans le secteur marchand, ce qui passe par une fiscalité qui incite à créer et non plus à détruire de l'activité. Pour cela, quelques pistes maintes fois répétées mais jamais explorées :

  1. donner une vraie liste documentée des 50 milliards d'économies ;
  2. faire un vrai scénario de la réorganisation de la France sans oublier l'État et la sécurité sociale en s'attaquant vraiment aux doublons (voir notre étude Réorganiser la France). Avec des assises de la dépense publique (on a des assises de tout sauf de l'essentiel) regroupant tous les acteurs de la dépense publique ;
  3. stopper toutes les embauches dans les trois fonctions publiques ;
  4. repasser aux 39 heures pour les agents (hors professeurs qui passeraient à 20 heures de cours par semaine) ;
  5. rehausser les seuils sociaux en faisant passer notamment toutes les obligations liées à 50 salariés, à 250 ;
  6. arrêter les « emplois d' avenir » dans le non marchand inutiles pour tout miser sur l'emploi marchand, ce qui suppose une fiscalité au service de la création d'entreprises et d'emplois (voir étude de la Fondation iFRAP) ;
  7. ne plus dire, si on veut des ETI et un mittelstand à l'Allemande, « les actionnaires familiaux sont des héritiers qu'il faut taxer » mais par exemple : « nous avons la chance que des actionnaires familiaux acceptent de garder leurs participations dans des entreprises françaises au lieu de s'acheter des Yachts, ne les taxons surtout pas à l'ISF ». …

J'arrête là la liste car finalement, on avait déjà tout dit dans 100 jours pour réformer la France (Fondation iFRAP - mars 2012) et 60 milliards d'économies ! (Albin Michel 2013).