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Qui a peur des complémentaires santé dynamiques ?

Pour chaque Français, la santé est un sujet primordial, mais le monde de la santé constitue un dédale mystérieux. Où se faire soigner ? Comment se faire soigner ? Quels soins ? À quel prix ? Quatre questions devant lesquelles les Français restent largement démunis. Un médecin de famille peut aider. Les classements publiés chaque année par des hebdomadaires aussi. Mais c'est insuffisant.

Alors qui cherche à faire restreindre par les Parlementaires le droit pour les complémentaires santé, assureurs ou mutuelles, d'aider leurs adhérents à s'y retrouver ?

Voir l'amendement déposé à l'Assemblée nationale pour limiter la possibilité de conventionnement souscrit entre les professionnels de santé, les établissements de santé ou les services de santé, et une mutuelle, une entreprise régie par le code des assurances, une institution de prévoyance ou leur gestionnaire de réseaux.

Conscientes de ces problèmes, les complémentaires santé ont d'abord proposé des centrales d'information téléphoniques répondant aux questions de leurs clients concernant les prix des soins : gamme des prix pratiqués dans la région de l'intéressé, analyse des devis. L'étape suivante a consisté à distribuer à leurs adhérents des listes de fournisseurs agréés qui avaient signé des contrats avec la complémentaire santé. Les deux cas les plus connus concernent les opticiens et les dentistes. Enfin, les complémentaires se mettront à fournir à leurs adhérents des informations médicales comme le font déjà certains sites Internet. Remplir ces nouveaux rôles au niveau de qualité requis est complexe et requiert des moyens importants. Les regroupements de complémentaires qui ont eu lieu ces dernières années vont le leur permettre. Comme l'a dit le président de ISTYA, mutuelle de fonctionnaires qui assure maintenant 6 millions de personnes « Nous voulons gérer le risque et ne plus être des payeurs aveugles ».

Quatre acteurs peuvent être inquiets de cette évolution

1. La CNAM (Caisse nationale d'assurance maladie)

Face au dynamisme des complémentaires santé, l'immobilité de la CNAM pourrait finir par devenir choquante pour les Français. Son rôle est pratiquement limité au remboursement des soins. Elle fait très peu de prévention et d'information sur les maladies, et absolument pas de recommandations sur les établissements de soins. La CNAM a raison de craindre que de plus en plus de Français se disent : « Et si ma complémentaire santé devenait mon unique assureur santé ? » et demandent aux responsables politiques de mettre fin au monopole de la CNAM.

2. Les hôpitaux publics

En moyenne, les prix des hôpitaux publics sont supérieurs de 35% à ceux des cliniques pour des soins identiques sur des groupes homogènes de malades (les hôpitaux publics reçoivent par ailleurs des financements ciblés pour leurs activités et contraintes spécifiques). Il est certain que des assureurs libres recommanderont à leurs adhérents de se faire soigner, à qualité égale, dans les établissements les moins coûteux. Un problème sérieux pour la majorité des hôpitaux publics.

3. L'administration de la santé

La montée en responsabilité des complémentaires santé règlerait de nombreux problèmes qui occupent actuellement l'administration publique de la santé et les responsables politiques. Exemples : faut-il construire un nouvel hôpital, autoriser des lits ou une activité dans une clinique ou comment améliorer le parcours de soins. On peut se demander, par exemple, si au moins quelques unes des complémentaires n'auraient pas déconseillé à leurs adhérents, déremboursé ou interdit des médicaments comme le Mediator si elles avaient été aux commandes. L'administration publique de la santé peut aussi se sentir contournée par des complémentaires plus impliquées.

4. Les fournisseurs de produits et matériels de santé

Il semble que certains fournisseurs redoutent la puissance des complémentaires santé. C'est naturel, mais le rôle des politiques n'est-il plus de favoriser la concurrence et les consommateurs ?

Les professionnels de santé

Enfin, des professionnels de santé manifestent leur inquiétude face à cette évolution. C'est notamment la démarche de certains syndicats de médecins dont le but premier est de conserver l'unité de tous leurs adhérents. Comme à la SNCF ou dans la fonction publique, ces syndicats souhaitent le même revenu pour tout le monde, indépendamment de leurs performances individuelles. En secteur 1, la seule variable est la quantité de malades soignés. L'égalitarisme est encore plus stricte que dans le secteur public puisqu'il n'y a pas d'évolution à l'ancienneté dans le secteur de la médecine de ville.

L'expérience montre que la pire situation pour les médecins est d'être face à un assureur payeur, presqu'un employeur, unique, composé de la CNAM et du Gouvernement. On voit le résultat avec la consultation à 23 euros et les conditions de travail qui leur sont imposées. Elles sont telles que les étudiants fuient ce statut et reculent de plus en plus leur date d'installation au-delà de 35 ans. Les professions médicales, et notamment leurs meilleurs éléments, ont tout intérêt à pouvoir négocier des modes de travail et de rémunération divers avec plusieurs assureurs.