Notre principal partenaire commercial et celui sans l'appui duquel l'Europe ne peut pas exister, une nation dont les fondamentaux démocratiques, politiques et sociaux sont très semblables aux nôtres, un peuple dont nous envions la rigueur et aimons brocarder la prétendue raideur, l'Allemagne reste malgré tout pour les Français, à l'exception de ceux de nos régions de l'Est, une grande inconnue. Après avoir présenté une histoire politique récente de l'Allemagne, ce dossier explore à partir de tableaux statistiques les originalités allemandes dans les domaines essentiels de l'économie et les compare point par point au modèle français :

- Grands équilibres des finances publiques (dépenses et déficits publics),
- Situation des entreprises et de l'emploi face au paradigme de la compétitivité (coût du travail et salaires, taux de chômage, prélèvements obligatoires sur les entreprises),
- Dialogue social (principes de l'autonomie tarifaire et de la cogestion),
- Droit du travail (licenciement, salaire minimum, droit de grève),
- Protection sociale (chômage, retraites et santé).

Réduire les divergences entre l'Allemagne et la France, pour quoi faire ? L'axe franco-allemand est d'abord une nécessité si l'on veut que naisse une Europe qui ne se limite pas à instituer un grand marché. C'est un grand pari. L'Allemagne y est-elle attachée ? Quoi qu'il en soit, l'Europe sociale, leitmotiv en France, est une ambition sur la réalisation de laquelle il ne faut pas se faire trop d'illusion. Il serait vain de vouloir importer, en France comme ailleurs, des systèmes, comme celui que l'on résume sous le terme de capitalisme rhénan, qui sont dépendants de ces traditions et d'un système juridique parfaitement original. En ce sens l'Europe sociale ne peut pas signifier une harmonisation des législations. Le principe européen de subsidiarité (c'est-à-dire la compétence des États membres pour tout ce qui n'est pas expressément réglé par les Traités) continuera à régner en maître.

Il n'en reste pas moins que la France aurait tout intérêt à s'inspirer de grands principes suivis outre-Rhin. Trois d'entre eux méritent d'être cités : compétitivité, limitation du rôle de l'État et de la loi en tant que norme nationale uniforme, rigueur budgétaire. En particulier, limiter le rôle de l'État nous paraît essentiel. Il s'agit, d'une part de laisser davantage d'autonomie aux partenaires sociaux en cessant d'interférer en permanence dans leurs négociations. D'autre part la France doit se séparer de réflexes jacobins et centralisateurs aboutissant à tout régir par des lois uniformes et rigides.