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Vers un Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques à l'Assemblée nationale

Les recommandations de l'iFRAP pour un dispositif efficace

La prochaine modification du règlement de l'Assemblée nationale va créer à l'Assemblée un « Comité d'Evaluation et de Contrôle », dit « CEC » très inspiré du Comité d'Audit Parlementaire que l'iFRAP propose de créer depuis la réforme constitutionnelle.
Ce CEC n'est pas tout à fait l'OFEC (Office d'Evaluation et de Contrôle), de type NAO britannique, que l'iFRAP appelait initialement de ses vœux mais pourrait avoir, à certaines conditions, un résultat similaire.

Dans la lignée de la réforme constitutionnelle qui confirme au Parlement sa mission d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, ce CEC peut jouer à terme un rôle très important en éclairant le Parlement sur l'utilisation des deniers publics et en permettant aux rapports de la Cour des comptes de trouver au Parlement une caisse de résonance.

Il nous apparaît cependant, dans la rédaction du projet quelques écueils qui pourraient faire que ce comité n'arrive pas à impulser une vraie dynamique de contrôle. L'iFRAP pèsera de toute son expertise afin que soient comblées les lacunes de ce comité et ce avec l'aide des députés investis sur ce sujet du contrôle de la dépense publique par le Parlement. L'occasion de faire ces modifications se présentera très prochainement avec la discussion en séance publique du projet de nouveau règlement programmée pour mai.

5 points essentiels pour la réussite de ce comité ne semblent pas avoir été identifiés par les rédacteurs du projet :

- Le premier point porte sur le fait que le domaine de compétences du CEC le limite seulement à ce qui n'est pas du champ de compétence des commissions permanentes. Cela réduit considérablement les possibilités d'investigation du comité d'évaluation et de contrôle. L'iFRAP propose donc de supprimer ce biais qui pourrait empêcher le comité d'être efficace puisque les commissions permanentes pourraient mettre régulièrement leur veto aux tentatives d'investigations du comité (rappelons que le précédent office parlementaire d'évaluation des politiques publiques créé en 1995 avait échoué en partie à cause de l'opposition des commissions permanentes).

- Le deuxième écueil se situe sur la fréquence des réunions de ce comité et ses objectifs en nombre d'études. Rien ne dit, en effet, que le CEC ne se réunira pas seulement une fois par an. L'iFRAP souhaite que le CEC se réunisse au moins une fois par mois et fixe pour ses travaux des objectifs clairs, notamment en nombre de politiques publiques à évaluer par an.

- La troisième remarque de l'iFRAP porte sur la publicité des auditions menées par le Comité d'Evaluation et de Contrôle. En effet, il n'est pas dit clairement dans le projet de CEC que les auditions seront publiques et ouvertes aux médias, ce point est selon l'iFRAP une condition sine qua non pour que les rapports et les propositions de ces rapports soient suivis d'effet.

- Le quatrième point porte sur le fait que le Comité d'Evaluation et de Contrôle ne prévoit pas de débat contradictoire du comité avec les responsables administratifs ni de délibération sur les suites à donner au rapport et, notamment, point capital, sur les recommandations qu'il entend formuler.

- La cinquième recommandation de l'iFRAP porte sur le fait que, dans l'actuelle rédaction, il n'est pas prévu de réponse du Gouvernement aux recommandations du comité. Il semble qu'une réponse au moins du ministre concerné par la politique publique passée au crible par le CEC s'impose. Les réponses des ministres pourraient ainsi être reçues dans un délai fixe de trois mois. Elles pourraient être ensuite débattues dans l'hémicycle à l'occasion de la semaine de contrôle instaurée tous les mois par l'article 48 de la Constitution.

CHAPITRE VII
du projet de règlement de l'Assemblée nationale
Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques

Article 146-1

1. Il est institué un comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques.
2. Sont membres de droit du comité :
3. le Président de l'Assemblée, qui le préside,
4. les présidents des commissions permanentes et celui de la commission des affaires européennes, qui peuvent se faire suppléer par un membre du bureau de la commission,
5. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire,
6. le député président ou premier vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques,
7. le président de la délégation parlementaire aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes,
8. les présidents des groupes, qui peuvent se faire suppléer.
9. Le comité comprend également quinze députés désignés par les groupes suivant la procédure fixée à l'article 37. Les nominations ont lieu en s'efforçant de faire en sorte que la composition d'ensemble du comité reproduise la configuration politique de l'Assemblée.
10. Le bureau du comité comprend, outre le Président de l'Assemblée et les présidents des groupes, deux vice-présidents, dont l'un appartient à un groupe d'opposition, et deux secrétaires désignés parmi ses membres.
11. Les votes au sein du comité ont lieu dans les conditions définies par l'article 44.
12. La publicité des travaux du comité est organisée dans les conditions définies par l'article 46.

Article 146-2

1. De sa propre initiative ou à la demande d'une commission permanente, le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques réalise des travaux d'évaluation portant sur des politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente.
2. Chaque groupe peut obtenir de droit, au cours d'une session ordinaire, la réalisation d'une étude d'évaluation entrant dans le champ des compétences du comité telles qu'elles sont définies à l'alinéa précédent.
3. Le comité désigne deux de ses membres, dont l'un appartient à un groupe d'opposition, comme rapporteurs. Les commissions compétentes pour les politiques publiques soumises à l'évaluation désignent un ou plusieurs de leurs membres pour participer à la réalisation du rapport. Le comité désigne deux rapporteurs.
4. Pour conduire les évaluations, les rapporteurs peuvent bénéficier du concours d'experts extérieurs à l'Assemblée nationale.
5. Le rapport est présenté au comité par les rapporteurs en présence des responsables administratifs de la politique publique concernée et donne lieu à un débat contradictoire dont le compte rendu est joint au rapport.
6. À l'issue d'un délai de six mois suivant la publication du rapport, les rapporteurs présentent au comité un rapport de suivi sur la mise en œuvre de ses conclusions.

Article 146-3

Les conclusions des missions d'information créées en application des dispositions du chapitre V du présent titre sont communiquées au comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques dès que la publication du rapport a été décidée. Elles peuvent lui être présentées par le ou les rapporteurs de ces missions.

Article 146-4

Le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques peut être saisi pour donner son avis sur une étude d'impact associée à un projet de loi déposé par le Gouvernement. La demande doit émaner du président de la commission à laquelle le projet a été renvoyé au fond. L'avis du comité est communiqué dans les plus brefs délais à la commission concernée et à la Conférence des Présidents.

Article 146-5

Le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques peut faire des propositions à la Conférence des Présidents concernant l'ordre du jour de la semaine visée à l'article 48, alinéa 4, de la Constitution. Il peut, en particulier, proposer l'organisation, en séance publique, de débats sans vote ou de séances de questions portant sur les conclusions de ses rapports ou sur celles des rapports des missions d'information créées en application des dispositions du chapitre V du présent titre