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Secteur public : Peut-on mieux contrôler le travail des directeurs d'administration centrale ?

La France face au Royaume-Uni, au Canada et à l'Australie

En France, lorsqu'un directeur d'administration centrale se présente devant une commission du Parlement, le jeu des acteurs est généralement très convenu : à des questions qui sont parfois vives mais rarement trop techniques, voire dépréciatives, le haut fonctionnaire répond parfois en admettant non pas des erreurs, mais des difficultés, sans que le responsable administratif ne soit inquiété outre-mesure. La mise en place du comité d'évaluation et de contrôle (CEC) ne change rien à l'affaire. Mais on devrait étudier de plus près le modèle britannique (intéressant mais perfectible), ou l'exemple canadien, qui tente d'accroître la responsabilité des « sous-ministres », et surtout l'approche australienne qui innove avec un directeur d'administration centrale sous contrat. Car il faut, en France, renforcer la responsabilité des directeurs d'administration centrale et mieux contrôler leur travail.

En France, lorsqu'un directeur d'administration se présente devant une commission du Parlement, le jeu des acteurs est généralement très convenu : à des questions qui sont parfois vives mais rarement trop techniques, voire dépréciatives, le haut fonctionnaire répond en admettant non pas des erreurs, mais des difficultés, sans que le responsable administratif ne soit inquiété outre-mesure, (quant il ne refuse pas purement et simplement de répondre). Ainsi par exemple le directeur de la DGAC (direction générale de l'aviation civile) auditionné à l'Assemblée nationale lors du scandale « des clairances » du contrôle aérien et tentant de « couvrir son administration » : « Je ne suis pas très fier de ce que je vous dis. Mais c'est la réalité. Je dois composer avec un certain climat social qui rend la situation assez désagréable mais les contrôleurs rendent un service assez performant quand on le considère dans sa globalité. » Ou encore le représentant du Trésor (Chef du service du financement de l'Economie) tutelle de la Caisse des dépôts lors des auditions faisant suite au rapport du Sénat sur les investissements de la Caisse dans les SEML (sociétés d'économie mixte locales) : « Nous souscrivons aux conclusions du rapport de la Cour des comptes […] Nous partageons l'avis selon lequel ces participations ont longtemps été peu pilotées et que l'attention portée à leur rentabilité a été insuffisante. » (le rapport découvrant que la Caisse ne s'intéressait à la rentabilité de ses investissements dans les SEML que depuis 2007 après quarante ans de carence !).

Tout au plus le directeur d'administration peut-il se voir menacé, comme à l'occasion de la fronde des « opérateurs de l'Etat » en 2009, et éventuellement frappé d'une sanction salariale portant sur la part variable de sa rémunération… menace d'ailleurs trop rarement brandie pour avoir un caractère systématique lorsque les objectifs assignés ne sont pas atteints. D'ailleurs, les procédés avancés par les responsables pour éluder leurs responsabilités ne manquent pas : prise de poste trop récente pour pouvoir se voir imputer le bilan de leurs prédécesseurs, absence de suivi de ces administrateurs après leur sortie de poste à raison de leur gestion passée, promotion ou « latéralisation » dans des fonctions de responsabilité comparables, voire supérieures, même en cas de passation devant la Cour des comptes (Cour de discipline budgétaire et financière).

Invariablement, le ministre de tutelle couvre son subordonné, sans que sa responsabilité politique ne soit elle-même en danger, le fait politique majoritaire permet ainsi au directeur d'administration centrale, pourtant délégataire de la signature du ministre dans nombre de domaines, de s'en sortir indemne, d'autant plus que lui-même n'a en charge que la gestion du ministère, mais pas la manipulation directe des deniers en vertu du principe de séparation des ordonnateurs et des comptables [1]. La responsabilité du directeur administratif est donc globalement introuvable… diffractée entre la responsabilité politique générale qui le surplombe, la responsabilité de gestionnaire principal (ordonnateur principal [2]) qui revient elle aussi au ministre, et celle de comptable public qui ne lui appartient pas non plus dans la mesure où le réseau des comptables dépend de l'administration du Trésor. Responsable mais pas coupable…

La mise en place du comité d'évaluation et de contrôle (CEC) ne change rien à l'affaire :

La mise en place du Comité d'évaluation et de contrôle à l'Assemblée nationale fin 2009 dans la foulée de la révision constitutionnelle de juin 2008 [3], n'a pas permis que cet organisme obtienne les pouvoirs suffisants pour faire changer le rapport de forces en faveur d'une « responsabilisation » de l'administration et en premier lieu des directeurs d'administration centrale.

En effet, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 juin 2009 (n°2009-581 DC), a limé les crocs du comité en censurant ses dispositions les plus significatives : ainsi le comité ne pourra pas convoquer de responsables administratifs (privilège réservé aux commissions permanentes), ni organiser avec eux de débat contradictoire… celui-ci devant se résumer à un « simple contrôle d'information ». Par ailleurs, en vertu de la sanctuarisation des compétences de contrôle financier auprès des commissions permanentes des finances et des affaires sociales (lois de finances et de financement de la sécurité sociale) [4], le comité ne peut procéder à l'évaluation de « toute question relative aux finances publiques et aux finances de la sécurité sociale ». Cette position est en complète opposition avec la tendance observée chez nos voisins britanniques et au Canada, qui ont renforcé le contrôle du Parlement sur l'action des ministères en se dotant d'un dispositif adéquat permettant de « responsabiliser » les directeurs d'administration centrale (les « sous-ministres ») des administrations concernées.

L'exemple canadien, tenter d'accroître la responsabilité des « sous-ministres »

Le Canada vient de se convertir très récemment à la « responsabilisation » de ses directeurs d'administration centrale. La Loi fédérale sur la responsabilité du 12 décembre 2006 décide en effet de renforcer la reddition des comptes des « sous-ministres » et des administrateurs généraux des organismes publics en leur conférant le statut « d'administrateur des comptes » ou « d'agent des comptes », c'est-à-dire de comptable public principal, grâce à une investiture du Trésor [5]. Cet aboutissement est le fruit d'une guerre de longue haleine entre le Parlement et l'administration sur le renforcement de la responsabilité des sous-ministres qui court depuis les années 1960.

Les parlementaires n'en ont cure, et en mars 2007 le Comité permanent des comptes publics (CCP) a publié un « Protocole pour les témoignages des administrateurs des comptes devant le comité permanent des comptes publics » [6], particulièrement explicite. Celui-ci affirme l'obligation des sous-ministres de rendre des comptes, impose l'obligation de s'expliquer en les considérant « comptables devant le Parlement ». Immédiatement, les auditions des parlementaires se sont faites plus incisives au point que le Bureau du Conseil privé (Direction de la fonction publique) s'en est publiquement ému et a fourni un document spécifique afin que les sous-ministres préparent leurs auditions [7], tout en tentant de préciser les limites des pouvoirs des parlementaires lors de ces mêmes auditions et d'ajouter que «  les administrateurs des comptes doivent être traités avec respect ».

Le modèle britannique, intéressant mais perfectible

La réforme canadienne a tenté d'acclimater le concept d'administrateur des comptes (Accounting Officer) britannique créé en même temps que le PAC (Public Accounts Committee) en 1866 à l'issue de la réforme de la comptabilité publique impulsée par Lord Gladstone [8] (Exchequer and Audit Act). Dès cette époque, il a été décidé d'attribuer aux directeurs d'administration (permanent secretaries) la fonction simultanée d'administrateur des comptes, tout en assurant le suivi par des lettres de cadrage du Trésor, les DAO (pour Dear Accounting Officer) [9]. Il en résulte que l'administrateur doit déposer devant le PAC et qu'il est en particulier personnellement responsable du recrutement, des sanctions disciplinaires et de la gestion du rendement de son ministère. On le voit, en vertu du modèle de « Westminster », le directeur d'administration centrale, contrairement à son homologue français, est responsable « sous le ministre » qui conserve en théorie l'entièreté de la responsabilité politique et juridique. Cependant, le principe britannique de « neutralité de l'administration » a conduit à accorder au directeur d'administration beaucoup plus d'autonomie pratique en matière de gestion, ce qui corrélativement le rend beaucoup plus « responsable et comptable » devant le Parlement.

Depuis 1866, les investigations du PAC n'ont cessé de se renforcer [10] : de la vérification de la régularité des dépenses, le comité a cherché à étendre son contrôle sur la qualité de la gestion des administrateurs (économie, efficience), le gouvernement acceptant que les ministères aient à répondre de leur refus de s'expliquer sur la manière dont ils ont dépensé les crédits alloués. Ainsi que l'évoque Brian Glicksman, « Le comité peut faire passer un mauvais quart d'heure à l'administrateur des comptes, il peut publier un rapport hautement défavorable, il peut nuire à la réputation de l'administrateur des comptes. » Celui-ci, en effet, ne peut pas ne pas répondre. Il est comptable de la gestion de ses prédécesseurs et reste responsable de sa propre gestion en tant qu'administrateur des comptes (Agent comptable principal) de son ministère à perpétuité, même après son départ à la retraite. Cependant, le PAC ne peut « en fin de compte, ni le congédier, ni le sanctionner ». La sanction est donc avant tout publique, politique, poussant l'impétrant à la démission [11].

Nota : Il est en effet tout aussi difficile au Royaume-Uni de sanctionner pour faute un directeur d'administration centrale qu'en France, et ce d'autant plus que cette question relève du Directeur de la fonction publique qui est en même temps secrétaire général du gouvernement [12], même si en théorie tout fonctionnaire est révocable par la couronne ad nutum (sur simple décision) [13] en vertu de la « prérogative royale ». Résultat, le code de la fonction publique s'oppose en pratique à toute révocation rapide et offre au contraire des garanties au haut fonctionnaire avec passation devant des instances disciplinaires puis judiciaires [14] : ainsi on ne compte pas une seule destitution de directeur d'administration centrale au Royaume-Uni en plus de 70 ans [15]. On préfère « pousser indirectement » à la démission ! C'est la raison pour laquelle plusieurs pistes destinées à renforcer la responsabilité des directeurs d'administrations centrales ont été exposées dans l'entourage de David Cameron [16], d'une part un renforcement sensible des pouvoirs d'investigation du Public Accounts Committee [17], mais aussi l'importation en Grande-Bretagne de la solution australienne d'administrateurs révocables.

L'approche australienne innovante du directeur d'administration centrale sous contrat

En Australie, « une guerre institutionnelle pour le contrôle de la fonction publique a eu lieu opposant les gouvernements démocratiquement élus et les fonctionnaires. » entre les années 1980 et 1990 [18]. Les premiers l'ont en définitive emporté. En conséquence dès 1994, les secrétaires des ministères (directeurs d'administration) se sont vu offrir une augmentation de leur rémunération contre une contractualisation sèche de leur fonction pour une durée légale de 5 ans [19], le gouvernement n'étant pas obligé de « reclasser » le haut fonctionnaire au sein de la fonction publique d'Etat à sa sortie de fonction, ce qui aboutissait à le faire sortir de facto de la carrière. Tous les directeurs d'administration alors en poste ont accepté cette contractualisation sauf deux. Dès 1999, la loi sur la fonction publique (Public Service Act) légalise la pratique avec nomination des impétrants par le Directeur de la Fonction publique (secrétaire du Premier ministre selon l'acception du modèle de Westminster) sur proposition du Premier ministre avec acceptation du ministre concerné. Avec ce système, des directeurs d'administrations centrales issus du privé font leur apparition [20]. Par ailleurs, dès 1996 le gouvernement libéral entrant alors en fonction utilise immédiatement les possibilités offertes et limoge 6 secrétaires (soit 1/3 de la totalité des directeurs d'administration centrale de l'époque). La pratique a perduré, l'incompatibilité d'humeur étant reconnue par les juges au profit des ministres [21]. La pratique depuis les années 2000 est au contrat de trois ans, calqué sur la durée du mandat des parlementaires, de façon à mettre en cohérence, l'action de la direction administrative et l'action législative. Elle a eu à ce propos des effets particulièrement vertueux en permettant une « ouverture » du poste de directeur d'administration centrale à des profils n'appartenant pas nécessairement à la haute fonction publique : « La généralisation du contrat de trois ans a exacerbé l'opinion selon laquelle le cadre de travail des hauts fonctionnaires était devenu moins sécurisé. » « Beaucoup de hauts fonctionnaires ne postulent plus aux postes de secrétaire, car ils jugent la fonction aléatoire et stressante. » [22]

En définitive la réforme australienne du statut des directeurs d'administration a permis d'ouvrir le recrutement en l'élargissant au-delà de la haute fonction publique d'Etat, en en diversifiant les profils (en direction du privé mais aussi des administrateurs territoriaux). Par ailleurs la performance est directement mesurable et les responsables comptables de leurs actions puisqu'ils sont révocables librement par leur ministre et de toute façon en poste pour une durée limitée. Enfin seule la qualité de leur service in fine leur permettra de rester au sein de la fonction publique.

Conclusion

Le renforcement de la responsabilité des directeurs d'administration centrale par la conjonction entre le pouvoir de gestion (par mandat de gestion et non plus par simple délégation de signature), financier et comptable (avec nomination de la DGFiP) sur le modèle canadien mais surtout anglais en supprimant pour ce seul poste la séparation classique française des ordonnateurs et des comptables, pourrait permettre de mieux isoler la responsabilité personnelle de ces hauts fonctionnaires de celle de leurs ministres de tutelle. Elle permettrait en outre de renforcer leur mise en cause lors des auditions auprès du Parlement, sans que la responsabilité ministérielle ne fasse écran. Le contrat triennal permettrait d'autre part, d'éviter le « mandarinat » de certains directeurs d'administration sur plusieurs décennies, tout en « personnalisant » le poste, de façon à ne pas attacher seulement la responsabilité à la fonction mais également à la personne. Avec la mise en place d'une révocation ad nutum (par exemple en exigeant la remise d'une lettre de démission en blanc) et l'absence de détachement « dans le poste », le candidat à la direction générale de son administration saurait que son retour éventuel à l'issue de ses fonctions au sein de l'administration ne saurait lui être garantie. Enfin, en contractualisation la fonction, celle-ci deviendrait éligible pour des personnes issues du privé. Une réforme profonde capable de responsabiliser l'administration et qui pourrait constituer une première étape vers la suppression du statut de la fonction publique pour les fonctions non régaliennes de l'Etat… en la matière ne dit-on pas que l'exemple doit d'abord venir d'en haut ?

[1] Se reporter par exemple au compte rendu du Colloque de la Fondafip : « Quel comptable pour les comptes publics au XXIème siècle ? » juillet 2010, 53 p. Ainsi que du même institut, « Pour une conception du contrôle interne et de l'audit interne dans la gestion financière de l'Etat », 9 décembre 2010, 43 p.

[2] Dont les activités d'ordonnancement des dépenses sont suivies et contrôlées par la direction du Budget, Sébatien Kott, « Du contrôle des dépenses engagées au contrôle financier central 1890-2005 », issue de sa thèse sur le contrôle des dépenses engagées, Le contrôle des dépenses engagées, évolution d'une fonction, CHEFF, 2004.

[3] Modification des articles 24 et 47-2 de la constitution, et le règlement de l'Assemblée nationale (articles 47-1, 98-1, 146-2… 146-7).

[4] Article 57 de la LOLF du 1er août 2001.

[5] Lire en particulier, Alan Gilmore, La loi fédérale sur la responsabilité : Une bataille inutile au sujet de la responsabilité des sous-ministres, The Sussex Circle, Printemps/Eté 2007, p.15 et suiv, mais aussi L'agent de la comptabilité : qu'en retient donc les Canadiens, The Sussex Circle, Automne 2006, p.19 et suiv.

[6] Rapport du Comité permanent des comptes publics, mars 2007, l'hon. Shawn Murphy, député Président, 14 p.

[7] Se reporter au document « Administrateurs des comptes : lignes directrices concernant leurs rôles et leurs responsabilités, et leur comparution devant les comités parlementaires ».

[8] Revue Parlementaire Canadienne, Automne 2007, Brian Glicksman, Ex-Agent des comptes du Trésor du Royaume-Uni (Directeur général du Trésor), Le rôle de l'administrateurs des comptes vu du Royaume-Uni.

[9] Se reporter en particulier à http://www.hm-treasury.gov.uk/psr_governance_dao_letters.htm, mais aussi au document de référence sur le droit budgétaire britannique, Managing Public Money, HM Treasury, 2007, chap.3, p.17 et suiv.

[10] En particulier, Holding Government to Account, 150 years of the Committee of Public Accounts, 1857-2007.

[11] Comme dans l'affaire du barrage de Pergau en Birmanie, où le directeur d'administration centrale a été inquiété pour sa régularité comptable dans la délivrance d'une aide à la construction conditionnelle à la livraison d'armement.

[12] En particulier §18 Disciplinary and grievance procedures, du contrat type d'emploi des directeurs d'administration centrale britanniques : Draft Model Contract of Employment : Indefinite Period.

[13] Ibid, §14 Notice : 14-a « Because of the Power of the Crown to dismiss a twill, you are not entitled to a period of notice terminating your employment ».

[14] Cf. notamment, Civil Service Management Code, 4.5 Dismissal, Discipline and Grievance : Rules and Code of Practice, en en particulier l'Employment Act de 2002 et l'Employment Act (Dispute Resolution) Regulations de 2004.

[15] The Telegraph, Whitehall mandarins face sacking threat under Conservative Plans. Par ailleurs, dans l'ensemble de la fonction publique du Royaume-Uni, si l'emploi à vie existe, il ne représente que 18% des fonctionnaires. 60% démissionnent pour ensuite se tourner vers d'autres carrières. Cf. Civil Service Statistics, mis à jour février 2010.

[16] En particulier le travail du Think Tank The Reform, Andrew Haldenby, Lucy Parsons, Greg Rosen, Elizabeth Truss, Fit for purpose, mars 2009, 40 p.

[17] Deux propositions en ce sens ont été faites, notamment la possibilité pour le PAC de se réunir de façon permanente même entre deux cessions parlementaires, et d'autre part, de pouvoir recourir aux services de conseillers extérieurs privés. Cf. en ce sens, Committee of Public Accounts : Proposed Changes to Standing Order n°.148, 27 juillet 2010. Ce qui alignerait d'ailleurs le statut du PAC sur celui de l'ensemble des autres comités spécialisés (Select Committees).

[18] Lire en particulier le compte rendu critique de la revue de l'ENAP, Téléscope, hiver 2009, p.35-49 « Un trop fort mouvement de balancier ou l'angoisse existentielle des hauts fonctionnaires australiens », Anne Tiernan, Patrick Weller.

[19] Par contractualisation « sèche » on entend le fait de formellement quitter la fonction publique d'Etat pour entrer dans un poste hors classe contractuel, sans se faire « détacher dans le poste » selon la méthode française, qui aurait sinon permis de contourner le caractère à durée déterminée de la fonction.

[20] Voir par exemple, Andrew Podger, « What Really Happens : Department Secretary Appointments, Contracts and Performance Pay in Australian Public Service », The Australian Journal of Public Administration, vol 66, n°2, pp.131-147, 2007, ainsi que Peter Shergold « What Really Happens in the Australian Public Service : An Alternative View », ibid, p.367-370.

[21] Dans l'affaire Paul Barratt par exemple, alors qu'aucune faute n'avait été caractérisée, le juge a confirmé la mise à pied avalisée par le Premier ministre. « Si un ministre doutait de son secrétaire, que sa méfiance soit justifiée ou non, ou que le secrétaire ait mérité ou non un tel jugement, le système ne pouvait fonctionner harmonieusement et le Premier ministre était en droit de mettre un terme à la nomination. »

[22] Le modèle de Westminster repose en effet sur la fonction de « conseil » de la haute fonction publique en direction du ministre et en particulier du Directeur d'administration centrale (permanent secretary). En conséquence au Royaume-Uni par exemple, seuls les Cabinet Ministers disposent d'un personnel de cabinet, tandis que les Ministers of State et les Junior Ministers ne peuvent appointer leurs propres personnels de Cabinet. Ce modèle se retrouve également en Australie. Dans ces conditions, le principe de « conseil » de la haute administration auprès des ministres selon le modèle de Westminster, a fait place à la logique française des cabinets ministériels (soit près de 350 personnes en moyenne). Ces derniers d'ailleurs, contrairement à la France, majoritairement recrutés au sein des universités, des think tanks et du secteur privé, ont permis de relayer au plus près des administrations le suivi et l'implémentation des politiques publiques décidées au niveau ministériel.