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Banque de France : des résultats en trompe-l'œil

Un article des Echos relève l'excellente performance de la Banque de France et son bénéfice historiquement élevé de 2,5 milliards d'euros, obtenu notamment grâce « à la maitrise de ses charges ». A y regarder de plus près, la réalité est loin d'être aussi flatteuse pour la Banque.

Le rapport annuel élude toutes les questions liées à la restructuration de la Banque

En 2005, un « rapport particulier » de la Cour des comptes dénonçait des avantages sociaux considérables, des salaires anormalement élevés et des sureffectifs à tous les niveaux. Difficile de savoir ce qu'il en est aujourd'hui : le rapport annuel, qui comptait 255 pages en 2001, ne compte plus en 2008 que 31 pages ! Mieux vaut en dire le moins possible. Ainsi on ne trouve pas un mot sur les effectifs, et pas un mot sur la stratégie immobilière. Pas un mot non plus sur les missions « non fondamentales », qui occupent pourtant plus de la moitié des effectifs de la Banque.

La Banque de France a des charges de personnel 13 fois plus élevées que la Banque du Canada

Sur la période 2002-2008, les effectifs de la Banque de France ont diminué de 16%. Dans le même temps, ceux de la Banque d'Angleterre baissaient de 20%, et ceux de la Bundesbank de 27%. Malgré cette coupe dans les effectifs, les charges de personnel ont augmenté de 2% en France sur 6 ans, alors qu'elles ont baissé de 20% en Allemagne sur la même période. La rémunération moyenne, charges comprises, s'élève à plus de 107 000 euros par an et par agent, soit environ 40% de plus qu'en Angleterre et 30% de plus qu'en Allemagne.

France
Effectifs 12693 1752 1300
Charges de personnel (millions d'€) 1362 136 101
Dépenses de fonctionnement (millions d'€) 2010 218 235
Sources : Rapports annuels 2008

Les autres charges de fonctionnement ont augmenté de 22% par rapport à 2007. Au total, il ressort que la Banque de France gaspille chaque année 1,7 milliard d'euros en dépenses de fonctionnement par rapport à ses homologues britannique et canadienne. En outre, le rapport annuel de 2008 laisse apparaître un « trou » de 5,7 milliards d'euros dans le financement du régime spécial de retraite.

Les revenus vont mécaniquement chuter en 2009

Il est important de garder en tête que les revenus d'une banque centrale dépendent essentiellement de la quantité de monnaie en circulation et du taux d'intérêt monétaire en vigueur. Ces deux facteurs sont totalement indépendants de la volonté et de la gestion de la Banque de France, puisqu'ils répondent à des objectifs de politique monétaire décidés au niveau de la Banque Centrale Européenne (BCE).

Il ressort que le bénéfice de 2008 a en fait un caractère exceptionnel. Il s'explique par des conditions extrêmement favorables à l'institut d'émission : des taux d'intérêts historiquement élevés (plus de 4% sur l'euro et le dollar en moyenne sur l'année), et une forte augmentation de la masse monétaire en fin d'année pour faire face à la crise financière. Les taux directeurs en Europe et aux Etats-Unis ont considérablement baissé ces derniers mois. Ils sont aujourd'hui respectivement de 1,25% et 0,25%, et seront probablement inférieurs à 1% en moyenne sur l'année 2009. Par conséquent, il y a fort à parier que les revenus ne suffiront pas à couvrir les charges, et donc que la Banque de France sera déficitaire en 2009.