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La forte hausse du Smic a provoqué une augmentation du nombre de pauvres en France

Cette étrange affirmation est exacte. Mais c'est une version tronquée qui a été propagée par de nombreux responsables politiques et associatifs : « 2001-2006, forte augmentation du nombre de pauvres en France ». Il existe en effet un lien mathématique entre le Smic et le calcul du seuil de pauvreté.

Le revenu médian est défini de façon simple : la moitié des ménages ont des revenus supérieurs à ce médian, et l'autre moitié des ménages des revenus inférieurs. Pour la France, en 2005, en arrondissant le nombre de ménages à 30 millions, cela donne :

15 millions de ménages ont des revenus < à 2 100 €
Revenu médian = 2 100 €/mois
15 millions de ménages ont des revenus > à 2 100 €

En Europe, un ménage est classé comme pauvre si son revenu est inférieur à 50 % (ou à 60% selon les auteurs) du revenu médian des ménages du pays. Selon la règle des 50 %, environ 1,6 million de ménages sont classés comme « pauvres » en France en 2005, mais 3 millions en prenant un taux de 60%.

Chaque année, l'augmentation du Smic prend en compte l'inflation et la croissance de l'économie, et bénéficie souvent du fameux « coup de pouce » supplémentaire. Résultat : de 1993 à 2005, la proportion de Smicards parmi les salariés est passée de 8,2 à 16,8 %. Sur la période 2001-2005, la progression a été particulièrement rapide, notamment pour aligner les neuf Smic-35 heures sur le plus favorable. Données avec le taux de 50% :

Données 2005 avec le taux de 60% :

3 millions de ménages ont des revenus inférieurs à 1 050 € Seuil de pauvreté = 1050 €/mois 12 millions de ménages ont des revenus inférieurs à 2100€ et supérieurs à 1050€ Revenu médian = 2100 €/ mois 15 millions de ménages ont des revenus supérieurs à 2100 €

Quand le Smic augmente plus vite que la richesse nationale, une partie des nombreux ménages dont les revenus étaient légèrement inférieurs au revenu médian voient leurs revenus dépasser ces 2 100 €. Le revenu médian va alors mécaniquement augmenter, par exemple à 2 200 €, et le seuil de pauvreté passe à 1 100 €. Ce relèvement du « seuil de pauvreté », ne fait pas augmenter la pauvreté « réelle ». On se borne à étendre la qualification de « pauvres » à des personnes dont les revenus sont, par exemple, indexés sur l'inflation et dont le niveau de vie est inchangé. Définir la pauvreté statistique en référence à un niveau de revenu (50 % du médian) plutôt qu'en référence à un niveau absolu (N euros) présente des avantages, mais à condition que cet indicateur ne soit pas utilisé pour manipuler l'opinion quand il donne des résultats visiblement erronés.