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Pédagogisme et formation des maîtres

Meirieu : le Lyssenko de l'Education Nationale

Maître de la biologie soviétique sous Staline et Khrouchtchev, Lyssenko combattit la science, en montrant que ses enseignements sont contraires au marxisme. Selon son analyse, la science progressiste appelle à la transformation de la société et s'oppose à la science réactionnaire -– bourgeoise, fasciste, nazie –, qui justifie le conservatisme et l'inégalité. Philippe Meirieu combat avec le même aplomb au nom du "pédagogisme", une "science" qui n'a rien à envier à celle de Lyssenko.

Le ministre de Robien a lancé début janvier la réforme des IUFM. C'est une excellente nouvelle d'autant plus que l'iFRAP s'est beaucoup battu contre ces instituts de formation des maîtres et leur pédagogisme révélateur de l'idéologie de l'Education nationale. D'abord, en publiant une enquête approfondie en juin 2004, ensuite en étant auditionné par une Commission parlementaire. Alors, peut-on espérer la fin des "référentiels bondissants", des "apprenants", de la "dictée à l'adulte" et des formateurs qui n'ont jamais fait de cours en classe ? Restons optimistes même s'il s'agit d'une petite réforme (mise des IUFM sous la tutelle des Universités, stages plus longs et adaptation de la formation des enseignants aux réalités de l'école). Les IUFM resteront un lieu de formation des maîtres et l'on ne pourra pas s'en débarrasser complètement avant d'en finir avec l'idéologie qui est à l'origine de leur création : le "pédagogisme".

“Il faut encourager l'éducabilité des élèves”

Cette doctrine repose sur le postulat que l'élève doit se trouver au centre de l'enseignement et que c'est à lui de "construire son savoir". L'enseignant ne doit jouer qu'un rôle d'intermédiaire et ne doit surtout pas imposer à l'enfant des "vérités". Qu'il s'agisse de la grammaire, de la littérature ou des mathématiques, on soumet aux enfants des "situations" et c'est à partir des "solutions personnelles élaborées par les élèves que l'enseignant apporte une nouvelle connaissance". Cette méthode qui trouve ses origines dans les idées égalitaristes véhiculées à la fin des années 1960 est employée à l'échelle nationale surtout depuis le début des années 1990 et la création des IUFM par l'ancien ministre de l'Education nationale Lionel Jospin. Parmi les défenseurs inébranlables de cette méthode, on trouve Philippe Meirieu, directeur de l'IUFM de Lyon.

Depuis environ 30 ans, il conseille pratiquement tous les ministres de l'Education nationale. Promoteur du collège unique, c'est un adversaire acharné de l'école privée. Ce qui ne l'empêche pas de mettre ses enfants dans… le privé. Comme les autres gardes rouges de "l'égalitarisme" et du "pédagogisme", Bourdieu, Peretti, Prost, Meirieu a mis ses enfants dans des écoles privées et publiques cotées, loin des influences de la nouvelle pédagogie. Lui-même d'ailleurs est un ancien élève du lycée Henri IV à Paris…

Son credo idéologique est clairement exprimé : "Il faut parier sur l'éducabilité (sic) de tous les jeunes (…), il est temps d'imaginer un même lycée pour tous les jeunes, avec une même qualité de l'enseignement, une même ouverture culturelle et une même reconnaissance pour les voies générales, technologiques et professionnelles. Il est temps, enfin, de remettre en selle et au premier plan l'éducation populaire, de susciter et d'aider toutes les initiatives qui permettent aux jeunes d'apprendre à vivre et à travailler ensemble, ainsi qu'avec d'autres générations… " [1]. Inquiétant de la part de quelqu'un qui a déjà largement contribué à la destruction de notre enseignement. Grâce à lui (et à d'autres) l'école est aujourd'hui dans un état catastrophique et les résultats des élèves français sont parmi les plus mauvais dans les pays de l'OCDE. Grâce à ses méthodes, 60 000 jeunes sortent chaque année "sans rien" du système éducatif. On compte environ 6% d'illettrés et une très grande majorité de jeunes est complètement perdue sur le marché du travail. Devant cette situation, il est donc tout a fait normal de voir les élèves déserter l'école publique. Tous les ans, à chaque rentrée, les écoles privées sont débordées, et faute de places, des milliers de parents n'arrivent pas à inscrire leurs enfants.

Il veut supprimer l'école privée après y avoir mis ses enfants

Mais notre "pédagogiste" ne désarme pas. Préoccupé jour et nuit par "l'éducabilité" de nos enfants, il prône la réforme finale : la suppression de l'école privée. "Observant les évolutions de ces quinze dernières années, j'en suis venu, en effet, à souhaiter l'existence d'un seul et unique système scolaire, intégrant l'enseignement public et l'enseignement privé sous contrat avec l'Etat. (…) J'en suis venu à considérer le choix de l'école par les parents comme un danger majeur pour la cohésion de notre société" [2]. Pour Meirieu, la réponse au succès de l'école privée, c'est sa… suppression.

J'ai rencontré Philippe Meirieu dans son IUFM à Lyon. J'accompagnais un député rapporteur pour la commission de l'Education nationale qui s'est déplacé exprès pour auditionner le gourou des IUFM. Après nous avoir fait attendre un bon quart d'heure, Meirieu, sûr de lui, condescendant, a dressé un constat accablant de la situation de l'école française. La faute à qui ? Au "libéralisme scolaire", à l'école privée, aux médias, aux entreprises, aux "chèques-éducation" qui seraient l'apanage de l'extrême droite (sic). Comme autrefois le "savant" Lyssenko, Meirieu accusait les "réactionnaires", c'est-à-dire tous ceux qui n'étaient pas d'accord avec ses méthodes. En pensant déjà au prochain ministre qui l'appellera à ses côtés…

[1] "Le renouveau par l'école", article publié dans Libération du 8 juin 2006.

[2] Voir son livre Nous mettrons nos enfants à l'école publique…, Editions Mille et une nuits.