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Sécuriser les licenciements : négociations difficiles en vue

Laurence Parisot, la présidente du Medef, vient de signer une lettre aux syndicats où elle exprime son souhait de négocier pour adapter le droit du licenciement aux « mutations de l'économie ».
En clair il s'agit, après avoir l'année dernière inventé la rupture conventionnelle, de trouver le moyen de sécuriser les licenciements en évitant qu'ils soient remis en cause par des procès qui ne connaissent leur épilogue que des années après les faits.

Ce n'est évidemment pas le moment idéal pour engager de telles négociations avec les partenaires sociaux, qui exigent en contrepartie une vraie sécurisation des parcours professionnels que les entreprises sont bien en peine d'offrir par les temps qui courent.

A vrai dire on se demande comment il faudrait faire pour sécuriser les licenciements. Car il serait impensable et illégal d'interdire a posteriori le recours aux tribunaux. Le seul moyen serait de réduire la compétence des tribunaux en modifiant la définition du licenciement économique comme l'iFRAP l'a souvent préconisé. Autrement dit il s'agit bien d'ouvrir la faculté de licencier à des cas où les difficultés économiques ne se sont pas encore manifestées mais sont prévisibles. Ce qui nécessite de modifier la loi.

Paradoxalement on peut même se demander si un retour vers l'autorisation de licenciement honnie ne serait pas meilleur que la situation actuelle. Car l'administration avait tendance à ne pas mettre son veto, n'étant pas en mesure de se prononcer. En réalité l'administration était mise dans la même situation que l'entrepreneur lui-même, en étant contrainte de prendre une décision qui est toujours un pari sur l'avenir.

Le droit anglais procède de ce pragmatisme des affaires, en stipulant que la compétence des tribunaux se borne à déterminer si, dans les circonstances et au moment où la décision de licencier a été prise, cette décision était raisonnable. On est loin par exemple de l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux qui vient de condamner ces jours-ci Arena (qui avait perdu 23% de son chiffre d'affaires) pour avoir délocalisé une partie de sa production en Chine. Mais elle l'a fait quatre années après les faits, en se fondant sur des observations postérieures à la délocalisation.

A ce compte-là n'importe qui pourra toujours après coup venir contester l'intérêt de décisions que l'entrepreneur se doit de prendre dans l'instant. Rien de pire que de donner aux tribunaux le droit de juger d'une action de façon complètement déconnectée des réalités des affaires.