Actualité

Soumettre les contrats des agents publics au droit privé

L’introduction dans la fonction publique de contrats de droit privé en lieu et place des contrats actuels de droit public, c’est-à-dire une application du Code du travail pour les contractuels, pourrait être l’une des pistes étudiées par le gouvernement dans le cadre du plan « Action publique 2022 ». Le plan prévoit en effet une rénovation du cadre des ressources humaines au sein de l’Etat et une réflexion sur l’évolution du cadre statutaire de la fonction publique. Si une telle réforme permettrait d’instaurer un droit commun de l’emploi qui dépasserait l’opposition entre agents publics et salariés, elle devrait être menée prudemment. L’introduction de contractuels de droit privé en primo nominations aurait ainsi un coût pour les finances publiques. L’objet de cette note vise à en détailler les possibilités, la méthode envisageable et ses conséquences.

Les contrats passés par les employeurs publics avec leur personnel se rangent dans trois catégories : les fonctionnaires titulaires, qui sont évidemment sous statut public, les agents contractuels liés par des contrats soumis au droit public, et les agents engagés sous contrat de droit privé. Les agents contractuels sont aujourd’hui au nombre d’environ un million dans les trois fonctions publiques (940.200 en 2015, derniers résultats INSEE[1]).

  • Nous prenons d’emblée comme hypothèse de travail, et quelles que soient nos propres réserves sur le sujet, que le gouvernement n’a pas l’intention de modifier, et encore moins de supprimer, le statut de la fonction publique. Les fonctionnaires titulaires resteront donc gouvernés par ce statut, tous les non-titulaires ayant vocation à voir leur emploi soumis au droit privé, c’est-à-dire au Code du travail. Deux questions peuvent être discutées :
    • Les contrats en cours seront-ils concernés ? La négative simplifierait bien entendu le régime de la période transitoire, tant sur le plan juridique que sur le plan budgétaire ;
    • La soumission au Code du travail doit-elle être intégrale ? À ce sujet, signalons que le Code du travail prend déjà soin à l’occasion de chacun de ses livres, d’en déterminer le champ d’application et qu’il n’y a pas étanchéité complète entre les régimes suivant la qualité, publique ou privée, de l’employeur[2].
  • Nous formulons ensuite comme hypothèse de travail que la réforme aura lieu à droit du travail constant. Il est évident que la réforme en cours dont les modalités sont de mieux en mieux connues, pourrait permettre de limiter l’usage de clauses exorbitantes du droit contractuel commun afin de préserver les prérogatives de l’employeur public. Dans le cas contraire leur usage serait susceptible d’inhiber l’application complète du droit du travail (recours aux « CDI » de projet, inversion de la hiérarchie des normes, le plafonnement des indemnités prud’homales pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, fusion des IRP « instances représentatives du personnel », etc.).

Le régime juridique actuel des agents contractuels de droit public est de son côté défini, pour ceux de l’État, par le décret 86-83 du 17 janvier 1986, le décret 2014-364 du 21 mars 2104 et le décret 2014-1318 du 3 novembre 2014

Plusieurs problèmes préalables se posent quant au régime juridique des agents contractuels des services publics. Le premier a trait aux cas restreints d’ouverture du régime des agents contractuels par rapport au statut de la fonction publique. Le second concerne l’application de la jurisprudence administrative ayant fixé les règles selon lesquelles il y a lieu de décider selon quels critères les agents contractuels doivent être de droit public ou de droit privé. Nous exposerons dans un premier temps les principales différences entre le droit du travail et le droit public applicable aux agents contractuels des administrations publiques (I) et les scenarii alternatifs prospectifs susceptibles de conduire à la réforme souhaitée (II). Nous renvoyons en annexe (annexe n°1) la faisabilité et les conséquences sur le périmètre envisageable de l’application du droit privé aux agents contractuels.

I. Les principales différences entre le régime des contractuels de droit public et de droit privé

Les textes de référence relatifs aux contractuels des trois fonctions publiques (voir en Annexe 1) constituent un corpus juridique considérable, et qui n’est au surplus pas identique dans les trois fonctions publiques. Il n’est pas envisageable dans le cadre de cette note d’en faire l’examen détaillé.

D’une façon générale, les récentes réformes de ces dispositions générales, intervenues par décrets du gouvernement, montrent que pour les trois fonctions, ce dernier a cherché à améliorer la situation des agent contractuels de droit public en leur reconnaissant des droits étroitement inspirés du droit privé tel qu’il ressort du Code du travail. Néanmoins, il est difficile d’imaginer comment le corpus juridique en question, qui est d’ailleurs très récent, pourrait d’un trait de plume être supprimé et remplacé par une simple référence au droit privé.

La ministre de la fonction publique a édicté le 20 octobre 2016 une « circulaire relative à la réforme du décret 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l’État ». Cette circulaire, spécifique à la FPE, permet de se faire une idée des différences les plus importantes existant avec le droit privé, même si à aucun moment le texte n’effectue cette comparaison.

Nous en signalons ci-dessous les points qui nous paraissent les plus marquants.

  1. Les agents contractuels de l’État bénéficient aux termes du décret du 3 mai 2012 (pris en vertu d’une loi du 12 mars 2012), d’un accès réservé à l’emploi titulaire. On peut douter qu’il en serait de même sous un régime de droit privé. On notera toutefois qu’il s’agit d’un régime transitoire prenant fin en avril 2018.
  2. Le régime du Code du travail en matière de CDD est foncièrement différent dans ses conditions de fond et de durée. Les agents contractuels peuvent rester en CDD pendant deux périodes successives de trois années, après quoi tout renouvellement doit se faire en CDI de droit public, alors que les salariés de droit privé ne peuvent rester en CDD que pendant une durée maximale variant de 9 à 24 mois selon les cas (sauf 36 mois pour les seniors et les contrats d’usage) avant de devenir « CDIsables ».
  3. En matière d’IRP « instances représentatives du personnel », les administrations ont l’obligation d’organiser des commissions consultatives paritaires (CCP) dédiées à leurs contractuels[3], compétentes en matière de licenciement et de sanction, dont la nature et le rôle ne peuvent pas être facilement comparés à celui des IRP des salariés selon le Code du travail.
  4. En matière de rémunération, celle des agents contractuels est généralement libre (avec application du smic comme salaire minimum). Les contrats peuvent notamment faire référence aux règles applicables aux titulaires de la fonction publique ou non (et ne comporter qu’une rémunération globale[4]). En cas d’option ouverte de passage de contrats de droit public à des contrats de droit privé, les agents resteront toujours affiliés à la retraite de base du régime général, mais la retraite complémentaire ne sera plus l’IRCANTEC mais l’AGIRC ou l’ARRCO, ce qui devrait multiplier les carrières complexes (multi-affiliations). D’une façon générale si des options de transfert sont ouvertes pour des passages de statutaires à contractuels de droit privé, cela conduira mécaniquement à un mécanisme « d’échelle de perroquet » avec potentiellement des effets inflationnistes[5] (dans le cas de Pôle emploi « les salaires et charges sociales par agent ont progressé de plus de 18% entre 2009 et 2011 »)[6]. Enfin il existe dans les décrets applicables des dispositions particulières concernant les rémunérations. Leur adaptation sera nécessaire.
  5. Les règles gouvernant les congés sont très précisément énoncées dans les décrets. Faudra-t-il les conserver, et donc exclure le Code du travail sur ce point, ou les adapter ?
  6. Le droit public applicable aux agents connaît le temps partiel, choisi par l’agent, ou de droit dans certains cas, et le temps incomplet, choisi par l’administration dans la limite de 70% du temps complet, alors que le Code du travail ne connaît que le temps partiel. De plus, ce dernier ne peut être inférieur à 24 heures par semaine.
  7. En matière de sanction, le droit public des agents connaît la suspension de fonction, mesure transitoire et provisoire, dont l’équivalent du droit privé pourrait être la mise à pied, mais les règles sont différentes. Notamment, la suspension de fonction administrative n’entraîne pas suspension de salaire, alors que la mise à pied disciplinaire suspend le paiement du salaire, et la mise à pied conservatoire peut justifier une retenue sur salaire.
  8. Les règles applicables aux agents de droit public en fin de contrat se sont rapprochées de celles du droit privé dans les décrets récents. Néanmoins, compte tenu de ce que les tribunaux administratifs, compétents pour les premiers, n’ont ni la même composition ni la même jurisprudence, des disparités importantes existeront naturellement si les conflits sont désormais confiés aux conseils des prud’hommes. Au plan du droit, l’administration a probablement à l’heure actuelle une liberté plus grande pour licencier. L’insuffisance professionnelle est reconnue expressément, et d’autre part « l’intérêt du service » permet le licenciement (à condition d’entraîner une suppression de poste), lorsqu’il s’agit d’une restructuration ou d’une mesure d’économie, ce qui est loin d’être le cas en droit privé ! De même, sont des motifs valables de licenciement le remplacement d’un agent par un fonctionnaire, ou encore le refus d’accepter des modifications substantielles au contrat de travail.
  9. L’indemnité de licenciement est moins avantageuse pour les agents de droit public. Outre qu’elle ne soit pas due si le licenciement a pour motif une sanction disciplinaire (ce qui semble plus que la faute privative dans le droit privé), ou lorsque l’agent retrouve du travail dans le secteur public, son montant est de la moitié de la rémunération de base pour les 12 premières années d’ancienneté, et du tiers pour les années suivantes, sans jamais pouvoir excéder douze fois cette rémunération.
  10. En 2012 et suite à la jurisprudence administrative, a été instituée l’obligation de reclassement de l’agent licencié, dont le pendant dans le privé est l’article 1233-4 du Code du travail. Les deux régimes se rapprochent nettement.
  11. La protection sociale est celle du régime général de la Sécurité sociale, et celle de l’Ircantec pour ce qui est de la retraite complémentaire. Nous avons vu plus haut que le passage à des contrats de droit privé devrait aboutir à lui substituer l’ARRCO ou l’AGIRC.
  12.  En matière de chômage, les agents contractuels de droit public sont indemnisés dans les mêmes conditions que les salariés du secteur privé. Ce sont les administrations qui assurent le financement (régime de l’auto-assurance et de la délégation de gestion pour l’État[7], auto-assurance, délégation de gestion ou adhésion révocable ou irrévocable pour les collectivités territoriales). Le régime des cotisations sera donc à revoir pour les contractuels de l’État qui n’ont pas la faculté d’adhérer à Pôle emploi, sauf en cas de réforme du financement de Pôle emploi et inclusion d’une cotisation obligatoire des personnes publiques (ce qui reviendrait à mettre en place un régime d’adhésion irrévocable universel à l’assurance-chômage quelle que soit la nature de l’employeur).
  13. Comme on l’a indiqué, la compétence juridictionnelle sera évidemment amenée à changer, de la juridiction administrative au conseil des prud’hommes. Les salariés du secteur public sous contrat pourraient en attendre une accélération de la justice professionnelle à leur endroit.

II. Eléments exploratoires d’introduction de contrats de droit privé au sein de la sphère publique

Le recours massif à des contrats de droit privé au sein même des services publics ne pourra avoir lieu sans que la loi n’introduise une délimitation stricte de leur usage en lieu et place des contrats actuels de droit public. Faire l’inverse, nécessiterait d’introduire une modification des articles 3 et 4 des dispositions générales du statut général de la fonction publique, ce que l’actuel gouvernement ne semble pas pour l’heure envisager[8].

Les primo CDI de droit public introduits définitivement dans la FPE

À cette fin, les pouvoirs publics peuvent s’appuyer sur l’introduction pour la fonction publique de l’État par l’article 36 de la loi du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi des titulaires dite loi « Sauvadet », de l’introduction à titre expérimental pour les administrations de l’État, de l’autorisation de recruter directement en CDI (« primo recrutement ») de droit public sur le fondement de l’article 4-1° de la loi du 11 janvier 1984. Cette expérimentation qui devait s’achever le 13 mars 2016 a été pérennisée et généralisée par l’article 35 de la loi n°2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires mais uniquement dans la mesure où l’on constate une absence de corps de fonctionnaires. Un tel dispositif existait cependant déjà s’agissant des emplois permanents à temps incomplet, ainsi que dans la fonction publique hospitalière.

Ce critère est cependant « mobile ». Il appartient aux pouvoirs publics et au législateur de faire en sorte d’accélérer la fusion des corps au sein de l’administration de l’État, en promouvant la mise en place de corps interministériels uniques, permettant de dégager des espaces où les critères relevés par la phase d’attribution trouveraient à s’appliquer :

  • Constatation de l’absence de corps permettant de recruter sous statut ;
  • Métiers particuliers en tension ou concurrentiels avec le secteur privé.

Il n’y a pas de mouvement symétrique pour l’heure dans la fonction publique territoriale et celui-ci devrait en conséquence être introduit par un vecteur législatif adapté, en passant directement à des contrats de droit privé. En effet, les comparaisons effectuées plus haut (supra) permettent de mettre en exergue que les filières (10) et les cadres d’emplois (53)[9] qui régissent la FPT contrairement à la logique de corps (700 en 2005, 305 en 2014, 304 en 2016) qui prévaut dans la FPE[10] et dans les administrations parisiennes[11], sont sans doute plus adaptées au déploiement de primo-recrutements en CDI. Les collectivités territoriales ont recours proportionnellement à l’État et à ses organismes à davantage de contractuels (19% contre 18%). Par ailleurs, les cas de recours à des contractuels sur emplois permanents dans la FPT sont beaucoup plus larges que dans la FPE, puisqu’ils comprennent :

  • Les cas où il n’existe pas de cadre d’emploi de fonctionnaire susceptible d’assurer des fonctions correspondantes (symétriques pour la FPE de l’absence de corps) ;
  • En l’absence de recrutement effectif dans les conditions prévues par la loi de fonctionnaire de catégorie A, permettant ainsi de constater que les besoins des services ou la nature des fonctions le justifient (équivalent des métiers en tension) ;
  • Pour les emplois de secrétaires de mairie des communes de moins de 1.000 habitants ;
  • Pour les emplois à temps non complet des communes de moins de 1.000 habitants ou des groupements de communes inférieurs à ce seuil, lorsque la quotité de temps de travail est inférieure à 50% ;
  • Pour les emplois des communes de moins de 2.000 habitants ou des groupements de moins de 10.000 habitants en cas de restructuration extérieure (décision préfectorale).

Il en ressort d’ailleurs que les « CDIsation » au bout de 6 ans mis en place pour les éligibles par la loi Sauvadet ne sont pas anecdotiques puisqu’ils représentaient 19.200 CDD transformés en CDI dans la FPT contre 8.600 transformations dans la FPH (la FPE n’est pas connue). Ces vagues sont à comparer aux 13.300 agents contractuels titularisés dans la FPE (sur 23.800 postes ouverts pour 38.000 éligibles) contre 19.000 agents contractuels titularisés dans la FPT sur 42.800 éligibles.

La mise en place d’une expérimentation de primo-recrutement en CDI de droit privé dans des collectivités en pleine restructuration pourrait permettre une introduction beaucoup plus massive que celle des CDI de droit public aujourd’hui mis en place dans la FPE (300 contrats signés en juillet 2015).

Plusieurs scenarii peuvent être envisagés, soit séparément, soit conjointement :

  • Mettre en place une contractualisation de droit privé pour les nouveaux entrants ;
  • Mettre en place une option pour les contractuels de droit public (CDD comme CDI, primo ou ex-CDD de 6 ans) de basculer sur des CDD ou CDI de droit privé ;
  • Mettre en place une option permettant de basculer des titulaires sur des CDI de droit privé.

Il semble cependant que seules les deux premières options permettent de limiter tout effet inflationniste à court terme pour les finances publiques (sans compensation pécuniaire de la sortie du statut, sauf bien évidemment dans le scenario 2, la possible intégration d’une part plus importante de primes dans la rémunération de base). En effet l’attractivité du contrat de droit privé est certain pour les contractuels de droit public mais plus relatif pour les statutaires de la fonction publique.

Quels sont les éléments d’attractivité qui permettraient une préférence pour un contrat de droit privé en primo recrutement ou un basculement vers des contrats de droit privé sur base volontaire ?

  1. Intégrer les contractuels de droit privé dans les instances représentatives de concertation mais leur octroyer des moyens spécifiques : Les contractuels de droit privé devront disposer de représentants syndicaux spécifiques. L’administration est aujourd’hui dans l’obligation d’accorder des moyens matériels communs (mise à disposition d’un local) dès lors que l’effectif de la collectivité ou de l’établissement dépasse le seuil de 50 agents. Des moyens qui deviennent spécifiques pour chaque syndicat lors de l’atteinte du seuil de 500 agents (mise à disposition d’un local syndical ou à défaut attribution d’une subvention couvrant les frais de location et d’équipement). S’agissant de l’accès aux TIC (technologies de l’information et de la communication), les contractuels de droit privé désormais dépendants sur ce point de la jurisprudence de la Cour de cassation, disposeront d’avantages supérieurs à ceux de leurs collègues contractuels de droit public puisque celle-ci « rejette systématiquement la différence de traitement entre organisations syndicales selon la représentativité », ce qui n’est pas le cas du Conseil d’État[12].
  2. Développer une négociation spécifique pour les contractuels : à l’heure actuelle les contractuels sont largement exclus malgré la mise en place des CCP (commissions consultatives paritaires) des négociations[13] ayant lieu au sein des Conseils supérieurs des trois fonctions publiques et du Conseil commun. Bien souvent, ce sont des représentants syndicaux titulaires qui se chargent de négocier « pour le compte » des contractuels de droit public, ce qui induit une structuration de la négociation qui ne se révèle pas optimale au regard de leurs intérêts propres (notamment s’agissant des conditions de titularisation par exemple). Par ailleurs, la fonction publique statutaire de carrière étant de principe et la fonction publique contractuelle d’emploi étant supplétive, cette structuration juridique impulse un tropisme vers une progression incrémentale en direction des droits et obligations de la fonction publique statutaire de plein exercice. L’introduction de contrats de droit privé, permettra d’aboutir à une délimitation autonome du principe de concordance géographique et professionnelle (inspirée du droit privé) entre le niveau de représentativité exigé et le champ de l’accord négocié et imposé, spécifique aux contractuels.

La question est cependant posée de savoir s’il faudra appliquer le droit privé jusqu’au bout, avec la délimitation de branches spécifiques pour les contractuels de droit privé. L’exemple de Pôle emploi qui dispose d’une branche spécifique et d’une convention collective particulière (bien qu’il n’y ait pas en droit privé de recouvrement parfait entre les deux champs (plusieurs conventions collectives pouvant s’appliquer au sein d’une même branche et inversement), ne doit pas faire illusion, il s’agit d’un opérateur de l’État bien délimité. L’idée serait sans doute plutôt, étant donné l’éclatement actuel des contractuels et leur nature supplétive, de considérer qu’il existe trois branches de contractuels de droit privé recoupant la fonction publique à trois versants. Par ailleurs des conventions collectives devraient intervenir en fonction de métiers exercés dans les services, sachant qu’un accord de collectivité, de service ou d’établissement pourrait intervenir à l’instar en droit privé de l’accord d’entreprise ou d’établissement.

  1. Un aménagement du principe général de faveur : suivant les modifications du droit du travail encore à l’étude, il pourra être mis en place une modulation du principe de faveur afin de conserver l’emploi. En effet, en cas de restructuration du service, il peut il y avoir rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur pour « nécessité de service », de façon unilatérale en cas de suppression de poste pour les contractuels de droit public. Cette « insécurité » étant compensée par l’exercice d’un principe de faveur[14]. Pour les contractuels de droit privé, la lecture du principe de faveur sera bien différente et à jour de la loi du 4 mai 2004 qui permettra d’introduire une modification spécifique de la hiérarchie des normes, et la possibilité de conclure des accords de maintien dans l’emploi, contre une réévaluation temporaire des conditions salariales et du temps de travail. Cette flexibilité sera sans doute préférée par les personnels contractuels, à la précarité qui est aujourd’hui la leur.
  2. Les effets des accords collectifs : À l’heure actuelle, les conditions de validité des protocoles d’accords signés par l’administration et les représentants des organisations professionnelles sont très faibles puisqu’ils n’ont pas de valeur normative[15]. Cela impose pour les fonctionnaires et les contractuels de droit public d’en passer obligatoirement par la loi afin de modifier les conditions d’emploi des fonctionnaires et des agents contractuels en conséquence. Corrélativement, « Il s’en suit que l’État peut fort bien exécuter un tel protocole alors même que ce dernier n’a pas été validé (cas de la négociation PPCR par exemple), ou bien, en sens inverse, peut tenir en échec l’application d’un tel accord en raison de l’absence de valeur juridique du produit de la négociation. » L’autorité administrative n’étant débitrice que d’une obligation politique et non juridique[16]. Sur ce point, la rénovation du dialogue social entamée par la loi du 5 juillet 2010 n’a pas fait évoluer la situation sur ce point.

L’introduction de contrats de droit privé et la faculté offerte à leurs organisations syndicales représentatives de pouvoir conclure des accords collectifs, devrait permettre de changer à leur profit exclusif la force juridique des protocoles d’accords conclus en leur conférant une force normative de droit commun, contrairement aux statutaires et aux contractuels de droit public. Le recours au législateur ne sera alors plus nécessaire. L’administration pourrait par ailleurs s’engager à souscrire à leur égard, une obligation périodique de négocier.

  1. Le niveau de rémunération salariale : L’introduction de contractuels de droit privé en primo-recrutement, devrait sans doute bénéficier d’avantages financiers plus importants, étant donné leur contribution à l’assurance-chômage (affiliation à l’UNEDIC), le niveau de leur contribution à leur système de retraite (régime général, puis complémentaire AGIRC-ARRCO), leur exclusion de la RAFP (retraite par capitalisation des fonctionnaires) et l’absence de garantie à vie de leur emploi. Par ailleurs, il y aura nécessairement une monétarisation de stipulations contractuelles spécifiques en termes de « mobilité » et de clauses de « non concurrence », à l’instar de ce qui se pratique dans le secteur privé. Des critères de performance pourront cependant être contractualisés par l’employeur public, et ouvrir une part arbitrable de primes plus importante à cet égard.
  2. La protection offerte par l’inspection du travail : Contrairement à d’autres pays européens (Italie, Pologne), l’inspection du travail n’a pas de vocation généraliste en France et ne contrôle pas l’ensemble des employés mais uniquement ceux relevant du secteur privé (ou assimilés : activités industrielles et commerciales). Dans l’administration, l’inspection du travail ne peut contrôler que les mesures d’hygiène et les conditions de travail relevant du CHSCT[17]. L’introduction de contrats de droit privé dans l’administration pourra avoir pour corolaire une extension de la compétence de l’inspection du travail à leur égard, ce qui sera plus « protecteur » pour ces derniers vis-à-vis de leur employeur public.
  3. Le recours aux prud’hommes plutôt qu’aux commissions techniques paritaires et à la juridiction administrative : le recours aux prud’hommes devrait permettre une progressive unification juridictionnelle du contentieux des contractuels, sous le contrôle de la chambre sociale de la cour de cassation. Un financement adapté et la participation des représentants des employeurs publics aux structures prud’homales seront nécessaires. Certaines exorbitances du contrat de travail dans le secteur public devraient néanmoins subsister au nom de l’intérêt général.

Quels éléments d’exorbitance du contrat de droit public conviendrait-il malgré tout de préserver pour les nouveaux contrats de droit privé (ces éléments étant dépendants de l’évolution éventuelle du droit privé sous-jacent projeté, CDI de mission, etc.) ?

  1. La fin du contrat de travail : il faut sans doute pour faciliter le principe de mutabilité du service public prévoir de conserver les cas classiques de fin de contrat public : l’intérêt du service. Par ailleurs, il faudra choisir pour le législateur quant au calcul du montant des indemnités en cas de licenciement (qui a l’avantage d’être très encadré dans le secteur public). Une prérogative de puissance publique qui pourrait être retenue, est celle de l’absence d’indemnisation en cas de sanction disciplinaire ou en cas de prise d’un autre emploi dans le secteur public.
  2. Les sanctions disciplinaires : il pourrait y avoir une mitigation des sanctions issues du public et du privé, notamment la suspension de fonction (sans suspension de salaire), mais aussi la mise à pied (du droit privé) avec suspension de la rémunération.
  3. La durée maximale des CDD : elle pourrait être conservée pour la durée maximale exigée en matière de CDD de droit public aujourd’hui applicable, afin de ne pas trop perturber les situations en cours (et à titre transitoire en cas de droit d’option à partir de contrats de droit public) ; soit à proposer un alignement en sens inverse du droit privé sur le droit public. Rappelons par ailleurs que les durées imposées pour couvrir les besoins temporaires d’activité pourraient ne pas être conservées (maximum 1 an renouvelable une fois) afin de donner plus de souplesse à l’employeur public.
  4. L’absence de titularisation sans concours : il semble qu’il faille effectivement couper cette passerelle généralement avancée afin de « déprécariser » les contractuels de droit public. Le respect de l’article 6 de la DDHC « Tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents », impose de réserver le concours aux fonctionnaires de carrière, sauf exceptions (notamment via la VAE ou les dispositifs de « déprécarisation » dans les emplois de cat. B et C.). Le rapport L’Horty (juin 2016) relatif aux discriminations dans l’accès à l’emploi public[18], a bien mis en exergue que les titularisations sans concours représentaient 35% de l’ensemble des recrutements externes (soit un tiers du recrutement des titulaires) en 2013. Plus que de titularisation, il faudrait passer à une logique de « CDIsation » de droit privé, afin de réserver l’entrée par concours aux titulaires (sauf maigres exceptions).

Conclusion

La « professionnalisation » de la fonction publique doit passer par son évolution progressive suivant les secteurs, d’une fonction publique de carrière à une fonction publique d’emploi, tout particulièrement dans les domaines non régaliens[19]. Cette modification profonde devrait pour nous se déployer en deux temps :

  • L’introduction d’abord de contrats de droit privé en lieu et place des contrats actuels de droit public, ce qui devrait permettre une polarisation accrue des différents statuts juridiques de travail. On parviendrait ainsi à mettre en place cette « gamme de statuts » dépassant l’opposition du fonctionnaire et du salarié, pour déboucher progressivement sur un droit commun de l’employé[20].
  • Dans un second temps, une inversion de la logique actuelle devrait permettre à la loi de déterminer précisément les emplois ouvrant droit à une condition statutaire. Il s’agirait ainsi de préciser ce que la loi et la jurisprudence d’origine européenne considèrent comme « l’exercice de prérogatives de souveraineté, ou la participation directe ou indirecte à une prérogative de puissance publique » et assurer une modification des dispositions générales corrélatives (loi Le Pors du 13 juillet 1983)[21].

Ce second temps serait toutefois plus inflationniste que le premier sur le plan du pilotage de la masse salariale. L’exemple de Pôle emploi montre par exemple qu’il y aurait modification substantielle du niveau de cotisation et potentiellement variation importante du net versé. Celle-ci pourrait être compensée par une intégration plus poussée des primes dans la rémunération de base des fonctionnaires désormais « contractualisés », et comptabilisée pour la retraite. Pour éviter au maximum un effet « échelle de perroquet », il faudra au préalable procéder par anticipation de même pour les contractuels dès l’étape 1. Une modification substantielle de la maquette budgétaire serait inévitable, notamment sous le poids de la modification des cotisations d’assurance-chômage et retraite. Une unification vers un régime (voire une caisse unique) des retraites publiques et privées de base serait alors envisageable. En sens inverse le bénéfice de la RAFP pourrait être ouverte également à l’ensemble des salariés du privé.


Annexe n°1.  Les problèmes relatifs au cadre d’application des différents régimes

  1. Les cas limitatifs de recours aux agents contractuels

Le principe général figure dans l’article 3 du titre I du statut général de la fonction publique, commun aux trois fonctions (État, collectivités territoriales et fonction hospitalière) : « Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'État, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif, sont, à l'exception de ceux réservés aux magistrats de l'ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l'ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut ».

Les emplois civils permanents des administrations sont donc réservés aux fonctionnaires, sous réserve toutefois des dérogations prévues par le législateur. De telles dérogations ont été prévues par trois lois : celle du 11 janvier 1984 pour l’État, celle du 26 janvier 1984 pour la FPT et celles du 9 janvier 1986 pour la FPH. On notera qu’une circulaire du 22 juillet 2013, spécifique à l’État, a réaffirmé avec force la nécessité de respecter le cadre légal du recours aux agents contractuels, suite à la signature le 31 mars 2011, entre le Gouvernement et six organisations syndicales représentatives (CGT, CFDT, FO, UNSA, CFTC, CFE-CGC), du protocole d’accord portant sécurisation des parcours professionnels des agents contractuels dans les trois versants de la fonction publique.

Nous ne prenons pas comme hypothèse que le gouvernement actuel ait pour intention de remettre en cause l’article 3 du statut de la fonction publique et la limitation des cas de recours aux agents contractuels, bien que ceci soit juridiquement possible pour le législateur. Il faut donc garder à l’esprit que le périmètre légal d’un tel recours s’en trouve diminué d’autant.

Dans ces conditions, la question se pose de savoir si, dans les cas où le recours aux agents contractuels est possible, ces agents peuvent être systématiquement recrutés sous contrat de droit privé. Comme on va le voir, l’application des règles jurisprudentielles actuelles constitue un obstacle auquel il est nécessaire de remédier par une intervention législative.

  1. Les critères jurisprudentiels d’application du régime de droit public aux agents contractuels

Les critères permettant de déterminer si le régime juridique des agents contractuels relève du droit public ou du droit privé sont d’application quelquefois extrêmement difficile, ce qui a donné lieu à de nombreux procès, qui ont souvent nécessité une décision du Tribunal des conflits, lequel a pour mission de résoudre les litiges de compétence. En effet la nature publique ou privée des contrats emporte la compétence, soit des tribunaux administratifs, soit des conseils des prud’hommes, et ce sont les tribunaux qui doivent déterminer leur propre compétence[22]. Il en résulte une incertitude d’autant plus préjudiciable, tant aux agents qu’à l’employeur dont elle affecte à la fois la compétence juridictionnelle et le statut des agents (c'est-à-dire le droit applicable, soit le droit public, soit le Code du travail dans toutes ses dispositions).

En 1996 un arrêt du Tribunal des conflits (Berkani, du nom du salarié concerné – il s’agissait en l’occurrence d’un aide de cuisine du CROUS de Lyon), a décidé que « tous les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public administratif sont des agents contractuels de droit public quels que soient la nature et les conditions de leur emploi ». L’arrêt Berkani est en fait assez loin d’avoir résolu le problème. Il y a tous les cas où il est difficile de déterminer si la mission relève d’un service public[23], ceux où la détermination de l’identité ou de la qualité de l’employeur (qui peut n’être qu’un simple mandataire) est ambigüe, ceux des fonctionnaires détachés, des salariés repris par l’administration, ou encore des employeurs à double statut de SPA et de SPIC… Selon une enquête réalisée par M. Vericel, P. Comte, J-A Bas, F. Debord, J-L D’Herve, et al. « La répartition des compétences entre juridictions administratives et judiciaires à l’égard des litiges touchant les personnels des services publics [24]» en 2002, soit six années après l’arrêt Berkani, nombre d’administrations et d’organismes exécutant une mission de service public n’avaient pas tenu compte de la règle posée par cet arrêt, et prétendaient appliquer le droit privé en dehors de toute détermination de la loi.

Dans ces conditions, la proposition suggérée dans la conclusion de l’étude précitée reste encore semble-t-il tout à fait judicieuse. Elle consiste à appliquer « le droit privé du travail et de la compétence prud’homale à la totalité des personnels employés par l’État et les autres personnes publiques gérant un service public administratif et n’ayant pas la qualité de fonctionnaires ». Les auteurs de cette étude rappellent à ce sujet que cette solution, en dehors de sa simplicité et de la certitude qu’elle apporte, aurait le mérite d’être clairement favorable aux agents non titulaires dans la mesure où le droit administratif est moins protecteur que le Code du travail, surtout depuis qu’il est fait interdiction à l’État de conclure des contrats à durée indéterminée : avantages liés aux CDI, aux indemnités de chômage, bénéfice des accords collectifs et de l’existence d’IRP. Ce serait une justice à accorder à ces agents qui ne se trouvent protégés ni par le statut de la fonction publique ni par le code du travail.

La mise en œuvre de cette solution nécessiterait une intervention du législateur, car comme on l’a vu, il s’agit de l’imposer aux tribunaux qui, en l’état actuel de leur jurisprudence, appliquent la règle dégagée par l’arrêt Berkani et se déterminent souverainement, par l’intermédiaire de la compétence juridictionnelle, en fonction du critère trop incertain et non protecteur de la mission de service public exercée par l’employeur.

En pratique, il faudrait intégrer la règle d’application du droit privé dans les articles du Code du travail déterminant le champ d’application de chacun des livres de ce code, en élargissant par conséquent cette application à tous les agents contractuels des administrations.


Annexe 2. Textes de référence relatifs aux contractuels des trois fonctions publiques :

Pour la FPE :

- Décret n°86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat.

- Décret n° 2014-1318 du 3 novembre 2014 modifiant le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État

- Décret n° 2014-364 du 21 mars 2014 modifiant le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État

- Décret n° 2012-631 du 3 mai 2012 relatif aux conditions d’éligibilité des candidats aux recrutements réservés pour l’accès aux corps de fonctionnaires de l’Etat des catégories A, B et C et fixant les conditions générales d’organisation de ces recrutements en application de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique (FPE).

Pour la FPT :

- Décret n°88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale

- Décret n° 2015-1912 du 29 décembre 2015 portant diverses dispositions relatives aux agents contractuels de la fonction publique territoriale

- Décret n° 2012-1293 du 22 novembre 2012 pris pour l’application du chapitre II du titre Ier de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique (FPT).

Pour la FPH :

- Décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

- Décret n° 2015-1434 du 5 novembre 2015 portant diverses dispositions relatives aux agents non titulaires de la fonction publique hospitalière

- Décret n° 2013-121 du 6 février 2013 pris pour l'application du chapitre III du titre Ier de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.


[1] INSEE mars 2017 https://www.insee.fr/fr/statistiques/2663284, avec un turn over important (244.800 entrées, pour 182.200 sorties, soit un solde positif de 62.600, mais en diminution de près de 24% par rapport à 2014).

[2] La formule généralement retenue est la suivante : « Les dispositions du présent livre sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés. Elles sont également applicables au personnel des personnes publiques employé dans les conditions du droit privé, sous réserve des dispositions particulières ayant le même objet résultant du statut qui régit ce personnel ». Mais des formules différentes existent aussi, faisant par exemple référence aux établissements industriels et commerciaux, et même aux établissements publics administratifs « lorsqu’ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé ».

[3] Pour une perspective cavalière sur la convergence d’ensemble des instances représentatives du personnel dans le secteur public et le secteur privé, voir K. Pagani, Convergence du cadre du dialogue social dans le secteur public et le secteur privé, La semaine juridique édition sociale (SJS), n°21, 31 mai 2016, Étude de doctrine n°1182.

[4] Si le législateur retient une option de passage de contrats de droit public à des contrats de droit privé, lorsque la présence de grilles est attestée, cela signifierait un bouleversement de l’évolution de carrière des agents contractuels (plus de référence au point de fonction, modification ou absence de progression indiciaire) par rapport à leurs collègues statutaires, etc. Mais surtout, incorporation de nombreuses mesures catégorielles au sein de la rémunération fixe et/ou une part catégorielle plus arbitrable par le manager en fonction de la performance individuelle et collective.

[5] Voir en particulier le rapport de la Cour des comptes de juillet 2015, Pôle emploi à l’épreuve du chômage de masse, p.10.

[6] Il n’y a pas d’accords de branche ni de conventions collectives pour les agents contractuels publics. Il faudra donc tout organiser à ce sujet si l’on veut se conformer à l’ensemble du Code du travail, à moins d’en exclure certaines dispositions. À l’heure actuelle c’est d’ailleurs le cas pour ceux des agents qui sont déjà sous contrat de droit privé.

[7] Voir convention de gestion conclue entre l’État et Pôle emploi, le 2 septembre 2011. Premier avenant, approuvé par délibération du CA de Pôle emploi n°2013-55 du 18 décembre 2013, Deuxième avenant approuvé par la délibération du CA de Pôle emploi n°2016-34 du 14 septembre 2016. Régime général pour les collectivités territoriales et les EPH, voir http://www.pole-emploi.fr/employeur/la-convention-de-gestion-@/article.jspz?id=61285

[8] Et même passer à une logique inverse, comme le recommandait le rapport SILICANI, à savoir, délimiter les secteurs de l’administration relevant par nature d’une logique statutaire, en tirant les conséquences de la définition des « emplois de souveraineté » au sens de la loi n°2005-843 du 26 juillet 2005 : c’est-à-dire les emplois « dont les attributions soit ne sont pas séparables de l’exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l’exercice de prérogatives de puissance publique de l’État ou des autres collectivités publiques. » cité par J-M SAUVE, communication introductive au Colloque inaugural Dynamiques normatives et jurisprudentielles, vendredi 17 janvier 2014, Conseil d’État, p.4. Pour ces dernières prérogatives le statut et les contrats de droit public seraient seuls autorisés.

[9] http://www.collectivites-locales.gouv.fr/filieres-et-cadres-demplois

[10] Consulter la note de la Fondation iFRAP, T. Schnapper, Fonction publique, pourquoi il faut réduire le nombre de corps, http://www.ifrap.org/fonction-publique-et-administration/fonction-publique-pourquoi-il-faut-reduire-le-nombre-de-corps ,  de Terra Nova, Maya Bacache-Beauvallet, Où va le management public (2016), http://tnova.fr/system/contents/files/000/001/121/original/20012016_-_Ou_va_le_management_public.pdf?1453309144

[11] https://solidaires.org/+VILLE-DE-PARIS-une-collectivite-territoriale-a-part-entiere+

[12] Voir en particulier, CE, 29 janvier 2003, n°238069, syndicat des fonctionnaires autonomes de Midi-Pyrénées-PTT-FNSA, inédit. Sur la position de la Cour de cassation, Cass, soc, 21 septembre 2011, n°10-19.017

[13] Et non des « concertations » avec leur employeur au niveau des CCP (commission consultatives paritaires) et des CTC (comités techniques centraux).

[14] Article 8 bis de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983, portant dispositions générales : « Une négociation dont l’objet est de mettre en œuvre, à un niveau inférieur, un accord conclu au niveau supérieur ne peut que le préciser ou en améliorer l’économie générale dans le respect des stipulations essentielles. »

[15] E. Aubin, La fonction publique : le droit applicable aux trois fonctions publiques, Gualino, Paris, 2015, p.272-273.

[16] Rappelons que le rapport Fournier, Livre blanc sur le dialogue social, 2002, mettait déjà en exergue trois vecteurs permettant de remédier pour l’ensemble de la fonction publique à ce problème :

1)Le basculement d’agents d’une situation statutaire à un régime contractuel ;

2)Le développement de la conclusion d’accords avec possibilité d’homologation ;

3)Un partage entre une situation statutaire pour le déroulement de carrière et le recours aux conventions collectives pour la détermination des règles de gestion et de fonctionnement.

[17] Rappelons que celui-ci a été introduit dans la loi du 5 juillet 2010, qui a par exemple imposé la mise en place, à l’instar du secteur privé, d’un CHSCT dès le seuil de 50 agents, contre 200 auparavant avec les CHS (comités d’hygiène et de sécurité).

[18] https://www.fonction-publique.gouv.fr/rapport-de-yannick-lhorty-sur-discriminations-dans-lacces-a-lemploi-public, voir également notre note, http://www.ifrap.org/fonction-publique-et-administration/les-cddcdi-sont-deja-la-norme-dans-la-fonction-publique

[19] Résumé de la décision CJCE, 9 septembre 2013. C-285/01 « soit ne sont pas séparables de l’exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l’exercice de prérogatives de puissance publique de l’État ou d’autres collectivités publiques. »

[20] Cette approche devrait être intéressante pour les contractuels de droit public tant au niveau individuel que collectif, nonobstant la préservation de dérogations plus favorables à l’administration (prérogatives de puissance publique), et bénéficier de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation. Une modification de la composition des prud’hommes serait alors nécessaire.

[21] L’analyse devrait montrer que celles-ci sont particulièrement faibles pour les collectivités territoriales où elles ne peuvent relever que du pouvoir de police délégué par le maire (police municipale) et l’État civil (modification du titre III, loi du 26 janvier 1984). Elle permettrait également de constater qu’au niveau de l’État, les services les plus « régaliens » (Diplomatie, Défense, Renseignement) ont déjà recours à un niveau élevé de contractuels, ce qui devrait déboucher sur une isolation des fonctions et surtout des services réservés (via l’énonciation exhaustive des corps interministériels uniques ou spécialisés sanctuarisés) où la contractualisation resterait de droit public. Ces conditions étant satisfaites, ce n’est que dans ce périmètre que la plénitude des articles du statut général s’appliquerait, le contrat restant supplétif (modification du titre II, loi du 11 janvier 1984). Pour les autres segments, c’est un droit du travail « modifié » qui s’y exercerait, le CDI de droit privé devenant le contrat de droit commun. Pour la FPH enfin (titre IV, loi du 9 janvier 1986), le secteur statutaire devrait lui aussi se révéler quasiment inexistant, et là encore rigoureusement défini en modifiant à due concurrence la loi.

[22] La compétence juridictionnelle relevant de l’ordre public, toute clause attributive de compétence insérée dans les contrats est de nul effet.

[23] Il a fallu là encore, en 2001, aller jusqu’au Tribunal des conflits pour décider que la gestion du patrimoine privé (coupe de bois) de la ville de Strasbourg n’était pas un service public…

[24] https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01063883/