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RGPP : où est passé le Parlement ?

Ce devait être la révolution de ce printemps : la RGPP ou « Révision générale des politiques publiques » allait époustoufler. Depuis des mois, des armées de cabinets d'audits et de hauts fonctionnaires travaillaient à cette annonce des résultats de la deuxième salve d'audits lancée par le Gouvernement.

Le 4 avril, le Président de la République est lui-même intervenu pour annoncer un chiffrage des économies attendues. Bilan : 174 pages de rapport et 7 milliards d'économies annoncées d'ici 2011. Assurance maladie, politique du logement, politique de développement des entreprises, modernisation du ministère de l'Intérieur : tout est passé au crible mais sans chiffrage spécifique par domaine. On attendait du Président qu'il donne de grands axes stratégiques de réformes ambitieuses qui permettent de réduire les fameux « 54% du PIB » de dépenses publiques qui distinguent la France en Europe et dans le monde comme dit très bien le préambule du rapport RGPP. On a eu une charge de cavalerie qui ressemble fortement aux audits de modernisation de l'Etat du gouvernement précédent. Mêmes annonces, mêmes fourchettes d'économies mais toujours environ 50 milliards de déficit annuel. Rien de très nouveau sous le soleil de la réforme de l'Etat. Si on mettait bout à bout les promesses de ces 20 dernières années en matière de coupe dans le budget, on aurait déjà atteint l'équilibre budgétaire depuis longtemps.

La stratégie du gouvernement n'est pas plus claire que celles de ses prédécesseurs. Quid de ce qu'a fait la Suède en ne gardant qu'un très petit nombre d'agents sous contrat public ? Quid de l'exemple du Canada qui est aussi cité dans le rapport RGPP ? Tous ces pays ont profondément réformé et réduit leurs fonctions publiques respectives en embauchant les personnels publics sous contrat de droit privé.

Les intentions du gouvernement français sont bonnes mais le non remplacement d'un départ à la retraite sur deux seulement dans la fonction publique de l'Etat suffira-t-il ? On sait bien que c'est surtout dans la fonction publique territoriale que les effectifs explosent (avec + 50% en 30 ans). Quant au rôle du Parlement, on le cherche encore. Alors que le Premier Président de la Cour des Comptes est chargé de « réfléchir à la constitution d'un grand organisme d'audit des politiques publiques », le Parlement est le grand absent des RGPP. Même si nos députés vont, comme sur le rapport Attali, organiser des réunions de réflexion sur la revue générale des politiques publiques, il ne semble pas que le renforcement du rôle du Parlement en matière de contrôle de la dépense publique soit vraiment d'actualité. Grave erreur car toutes les grandes démocraties se sont appuyées pour réformer sur un Parlement devenu maillon fort du contrôle de la dépense publique et de la réforme de l'Etat. Quand le National Audit Office anglais, référence incontestable en termes d'organisme d'audit des dépenses publiques rattaché au Parlement fait un rapport, il chiffre toujours les économies à réaliser et les députés suivent la mise en œuvre des réformes. L'équilibre budgétaire est encore loin et ne pourra se faire avec des charges de cavalerie successives orchestrées par nos budgétaires. Il se fera avec un Parlement fort garant et responsable de l'efficacité des politiques publiques. La prochaine réforme institutionnelle du début d'été pourrait être l'occasion de rééquilibrer notre démocratie notamment en dotant notre Parlement d'un organisme de contrôle de la dépense publique ancré fortement dans sa structure. Ceci permettrait qu'audits de modernisation de l'Etat, RGPP, rapports de la Cour des Comptes, rapports spéciaux de la commission des Finances ne restent plus lettres mortes sur les étagères de la République.