Actualité

Réforme de la constitution : le Parlement toujours godillot

La France est le pays occidental où les dépenses publiques rapportées au PIB atteignent le niveau le plus élevé : 54 %. A la source de cette dérive, se situe un véritable dysfonctionnement du contrôle de la dépense publique dans notre pays.

Le Parlement a seul le pouvoir de sanction sur les dépenses -il vote le budget- mais ses moyens d'enquête sont dérisoires. Dans la plupart des grandes démocraties, les chambres sont dotées d'organes à leur service qui leur permettent de contrôler efficacement les dépenses publiques et… de couper en cas d'inefficacité ou de dérapage. Le NAO britannique par exemple garde pour chaque rapport en fil rouge ces questions : à quoi sert cette administration, cette direction ou cet office ? Doit-on le pérenniser ou le supprimer ? En France, rien de tout cela à part les très médiatiques rapports de la Cour des Comptes qui n'ont le plus souvent pas d'impact sur le terrain et qui évaluent plus la légalité que l'efficacité de la dépense. Pour les observateurs de la dernière campagne présidentielle, le message de Nicolas Sarkozy était limpide : dès l'élection, les pouvoirs de contrôle des administrations et d'évaluation de la dépense publique de notre Parlement seraient confirmés et renforcés. Nos parlementaires, auraient enfin à leur service un organe de contrôle qui fonctionnerait comme le NAO (National Audit Office) britannique ou le SNAO suédois. Conscients de l'importance de cette réforme, les membres de la commission Balladur sur la modernisation des institutions de la Ve République ont proposé de modifier l'article 24 de la constitution en stipulant : « Le Parlement vote la loi, contrôle l'action du Gouvernement et concourt à l‘évaluation des politiques publiques » et précisant que cette mission de contrôle des dépenses devrait être dorénavant « expressément dévolue au Parlement ».

Le Gouvernement s'est engagé à rééquilibrer les pouvoirs exécutif et législatif et à entériner 70 à 80 % des propositions du comité Balladur. Il l'a fait en partie dans le projet de loi constitutionnelle de réforme des institutions de la Ve République présenté mercredi 23 avril en conseil des ministres en ce qui concerne la maîtrise d'une partie de son ordre du jour par le Parlement. En revanche, dans le même projet, la mention du rôle du Parlement en matière de contrôle et d'efficience de la dépense publique ne figure plus. Tout juste est-il ajouté un article stipulant que la Cour des Comptes « contribue à l'évaluation des politiques publiques ». Le contrôle de l'efficacité de la dépense publique ne serait-il plus l'apanage du Parlement ? La France serait bien la première démocratie où ce rôle serait dévolu quasi exclusivement à une juridiction dont les membres ne sont pas élus. Le Parlement godillot se révoltera-t-il ?