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Niches fiscales 2009 : Encore un effort dans la présentation des chiffres

Nous avons eu l'occasion de dire dans un précédent article, combien l'administration avait fait d'efforts de présentation des niches fiscales dans la dernière livraison des Voies et moyens tome II [1]. Cependant, force est de constater qu'au-delà des larges effets de périmètres pratiqués, véritables coups de baguette magique pour faire disparaître avec maestria des niches dont les volumes s'élèvent toutefois à quelques 10,351 milliards €, il existe également un certain problème de chiffrage, donc de transparence qui se conjoint d'abord avec un problème de pédagogie.

Une présentation chiffrée assez peu précise

En effet, si en introduction il est indiqué que « L'annexe des Dépenses fiscales (…) a été profondément renouvelée afin d'accroître la lisibilité et la quantité des informations disponibles », la méthode adoptée de présentation des chiffres pour tous les tableaux ne se trouve présentée qu'en page 37. Et malheureusement, sa précision laisse encore largement à désirer… En effet, les dépenses fiscales sont généralement chiffrées au million d'€ près voire à la dizaine ou à la centaine de millions près lorsque la niche est évaluée en milliards. On peut effectivement penser qu'une méthode plus précise n'apporterait pas d'éléments décisifs par rapport aux ordres de grandeurs en cause.

Ce qui est moins pertinent en revanche c'est l'usage du « ε » qui représente pour les budgétaires une dépense inférieure à 500 000 € et la mention « nc » : non chiffrable. A l'usage, ce manque de précision peut être déterminant. Nous en voulons pour preuve la présentation du « bilan des mesures législatives impactant le coût des dépenses fiscales depuis le précédent PLF », en clair, les variations de volume des niches fiscales créées ou supprimées depuis le projet de lois de finances 2008. Or ici la simple addition ou soustraction du montant des créations, suppressions, réductions et augmentations n'est d'aucune utilité, qu'on en juge :
- les suppressions/réductions votées et les réductions proposées représentent un montant de 402 millions €
- les créations/augmentations votées et les augmentations proposées représentent un montant de 64 millions € le tout permettant de définir un solde logique de 338 millions €.

Or si l'on additionne les volumes des niches du premier groupe, les chiffres présentés correspondent bien aux chiffres détaillés, et l'on en déduit que selon un principe de prudence comptable, la mention d'un « nc » pour l'une d'entre elles a été évalué à 0 pour l'exercice 2009. Au contraire lorsque l'on s'intéresse au deuxième ensemble, celui des créations/augmentations, la simple addition des montants présentés donne 39 millions €, or le total présenté est de 64 millions… manque donc 25 millions à l'appel, que l'administration a dû chiffrer mais qu'elle n'a pas jugé bon de présenter même en ordre de grandeur en se réfugiant derrière 8 niches non chiffrables et 6 niches inférieures à 500 000 €. Lorsque la marge d'incertitude concerne 39% des montants présentés, il serait bon que Bercy prenne des risques en donnant quand même une idée des volumes impliqués en présence. La sincérité et la transparence des évaluations gagneraient ainsi en pertinence.

De même dans le tableau synthétique récapitulant les volumes de niches par type d'impôt, les dépenses fiscales (au périmètre 2009) sont appréciées pour l'impôt sur le revenu à 34,787 milliards € pour 2008 et 36,377 milliards € pour 2009. Nos propres chiffres quelque peu inférieurs de 0,03% (34,775 et 36,365 milliards) témoignent de l'incapacité pratique à chiffrer le vrai montant des dépenses non chiffrables ou inférieures à 500 000 € à partir des données fournies dans les annexes. Les vrais évaluations de Bercy ne sont donc pas toutes rendues publiques et c'est bien dommage.

Une présentation qui laisse des niches de côté en chemin

Il arrive malheureusement que certaines niches passent à la trappe. C'est ainsi par exemple que les réductions d'impôts ne sont pas comme affirmé, de 4,273 milliards sur l'IR en 2008 et de 4,480 milliards en 2009, mais respectivement de 4,539 milliards en 2008 et de 4,761 en 2009. Pourquoi minorer ces niches de 266 millions et de 281 millions d'€ ? Tout simplement parce que pour chaque année, s'est glissée une erreur dans la computation des niches : dans les deux cas les niches de réduction des impôts issus du barème de l'IR dans les DOM ont été omises pour un montant de 265 et 280 millions, auxquels on doit ajouter l'omission de la niche de réduction du taux d'imposition des plus-values réalisées lors de la cession de participations substantielles par des contribuables domiciliés dans les DOM, à chaque fois pour 1 million d'€. Pourquoi une telle amnésie sur les niches des domiens ? Mystère !

[1] document annexé au Projet de loi de finances 2009 qui présente le montant et les évolutions des niches fiscales