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Grève : des syndicats aux revendications contradictoires

Les 8 centrales syndicales unies pour la grève d'aujourd'hui (CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, Solidaires, UNSA) font une dizaine de demandes au gouvernement et au patronat (voir encadré). Parmi ces revendications, deux sont particulièrement contradictoires. Comment demander, en effet, tout à la fois le renoncement aux suppressions d'emplois dans la fonction publique et, par extension, dans tout le secteur public, et l'amélioration des salaires ?

Plus d'emplois publics ou d'emplois relevant de missions de service public voudra toujours dire plus de dépenses publiques et donc plus d'impôts, de cotisations sociales et de dette publique. A court ou à moyen terme, l'augmentation ou la non diminution de la masse salariale du secteur public ampute d'autant salaires nets et pouvoir d'achat après impôts des salariés.

Les demandes des syndicats au gouvernement :

- Revalorisation du smic, des minima sociaux, des pensions et des retraites.
- Conditionnement de toute aide et exonération de charges pour les entreprises à des contreparties mesurables en termes d'emploi, de qualification et de rémunération.
- Prolongement de l'indemnisation des demandeurs en fin de droit. Les syndicats souhaitent que le gouvernement "donne à Pôle Emploi les moyens nécessaires à l'accompagnement personnalisé des demandeurs d'emploi".
- Suppression du bouclier fiscal et du dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires
- Renoncement aux suppressions d'emplois dans la fonction publique.

Les demandes des syndicats au patronat :

- La répartition et la distribution des richesses produites dans les entreprises.
- L'amélioration des salaires et la réduction des inégalités.
- Un accès facilité pour tous au chômage partiel.
- L'amélioration de la durée et du niveau d'indemnisation du chômage.

La Cour des Comptes vient de pointer qu'à elles seules, les dépenses de l'Etat ont crû de 3,4% en 2008, alors que l'objectif était de 1,9%. De son côté, le rapport Cotis sur le partage de la valeur ajoutée soulignait récemment la faible croissance des salaires nets en France alors que les prélèvements sociaux sur les salaires superbruts ont augmenté de 15% sur une période de quarante ans : « les cotisations ont pris une part croissante dans la rémunération globale des salariés, ce qui a contribué à réduire le dynamisme du salaire net par tête ». Cette hausse des prélèvements obligatoires induit une hausse des transferts sociaux mais aussi une hausse des effectifs.

Un crainte qui taraude les syndicats, plus présents dans le secteur public que dans le privé, est que le principe du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite s'applique peu à peu à tout le secteur public français. Pour l'instant, les hôpitaux publics (dont 70% des dépenses concernent la masse salariale) ne sont pas visés par cette règle et continuent même à embaucher. Tandis qu'à la Sécurité sociale, la formule qui prévaut est pour l'instant celle du « non remplacement partiel » des départs en retraites.

La part de l'emploi public en France est parmi les plus élevées au monde avec près de 7 millions de personnes (chiffres INSEE), soit 27% de la population active occupée, 120 milliards de masse salariale pour l'Etat chaque année, 60 milliards pour les collectivités locales… Connaissant ces chiffres, nos huit centrales ne peuvent prétendre, d'autant plus en temps de crise, ne pas comprendre l'urgence de la réduction des effectifs de la sphère publique.