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Arrêts maladie - Des fonctionnaires plus contrôlés dès 2010 ?

Un amendement déposé par le sénateur Alain Vasselle (Oise) au PLFSS 2010 devrait relancer le débat sur le contrôle des arrêts maladie dans la fonction publique. Le sénateur propose à titre expérimental que certaines administrations transfèrent aux caisses primaires d'assurance maladie le contrôle médical et administratif des arrêts de travail de moins de 6 mois des fonctionnaires.

Les administrations seront tenues de donner suite aux conclusions des contrôles. Une expérimentation qui vaudra aussi bien pour la fonction publique d'État, qu'hospitalière ou locale. L'amendement précise : « la mise en œuvre de cette expérimentation d'une durée de deux ans sera suivie en vue de son éventuelle généralisation en 2012 ». Forces précautions sont donc prises pour éviter de déclencher l'ire des syndicats de fonctionnaires. Cet amendement constituera une avancée par rapport à la situation actuelle. En effet, contrairement aux salariés du privé, il n'y a pas de différence entre l'employeur et l'assureur dans la fonction publique, et la confidentialité des motifs d'arrêt maladie vis-à-vis de l'employeur rend difficile de contrôler les arrêts. En pratique les contrôles sont peu efficaces et ne permettent pas de débusquer les abus car le fonctionnaire est obligatoirement prévenu bien à l'avance.

Le renforcement des contrôles, initialement prévu par le gouvernement dans le PLFSS, avait été retiré pour figurer à l'ordre du jour des négociations sur la santé et la sécurité au travail avec les syndicats de la fonction publique qui se tiennent ces jours-ci. Devant le refus catégorique des syndicats de négocier sur ce point, la proposition revient par voie d'amendement. Le gouvernement ne désespère pas d'agir sur ce dossier chaud, s'appuyant sur les chiffres de l'Assurance-maladie qui estime à 10% les arrêts maladie non justifiés. Eric Woerth a déclaré cet été dans la presse : « Ce n'est pas un problème de justice. Plus on est dans un pays où il y a des droits, plus il y a de contrôles, c'est normal ». Le gouvernement entend par ailleurs, pour lutter contre le déficit de la Sécurité Sociale, s'attaquer au contrôle des arrêts maladie du secteur privé en ouvrant la possibilité d'envoyer un médecin de ville, et non plus seulement un médecin conseil de l'assurance-maladie, au domicile du salarié en arrêt. S'agissant des fonctionnaires, le gouvernement s'appuierait sur une convention signée entre l'État et l'assurance-maladie, désignant certaines CPAM pour participer à cette expérimentation qui au final devrait concerner plus de 170 000 agents de la fonction publique d'État. En revanche, les collectivités locales devront chacune délibérer sur cette question. On peut craindre que certaines municipalités hésitent à lancer des contrôles au nom de la préservation d'une certaine paix sociale.

L'iFRAP qui s'est penché sur ce sujet, en se procurant, non sans mal, les bilans sociaux d'un certain nombre de ministères et de collectivités locales, a publié un palmarès de l'absentéisme qui montre qu'en 2004 pour les seuls arrêts maladie, le taux d'absentéisme est de 5,5% dans le privé, 7,3% dans la fonction publique d'État, 11% dans la fonction publique hospitalière et 11,3% dans la fonction publique locale. Or, 1% d'absentéisme coûte 1% de masse salariale, selon l'association nationale des DRH. On voit donc à l'échelle des effectifs des trois administrations publiques ce qu'une maîtrise de l'absentéisme permettrait de dégager comme économies. Rapporté à la masse salariale de la fonction publique c'est un surcoût de 4 à 5 milliards d'euros pour le contribuable. D'autres enquêtes évaluent à 13 jours les arrêts maladie dans la fonction publique d'État contre 12 dans le privé, et 22 jours dans la fonction publique hospitalière et territoriale, ces derniers chiffres comprenant également les arrêts pour maternité, estimés par ailleurs à 4 jours en moyenne par agent et par an. Les données publiées sur ce sujet sont malheureusement parcellaires, l'INSEE ne publiant plus d'étude sur ce sujet depuis 1990. Un rapport d'évaluation dont la publication est prévue à l'issue de l'expérimentation permettra sans doute de mieux comprendre ce phénomène.

Car a priori les arrêts maladie devraient être équivalents, voire inférieurs à ceux du privé : en effet, les conditions de travail y sont généralement meilleures et surtout la qualification moyenne des emplois y est nettement plus élevée que dans le privé, ce qui selon toutes les études sanitaires publiées sur le sujet, va de pair avec une moindre fréquence des arrêts maladie. Pourtant c'est l'inverse que l'on constate : une situation qui s'explique par l'absence d'une gestion réelle des ressources humaines. Rappelons-nous le rapport confidentiel sorti dans la presse au printemps sur les arrêts maladie des professeurs d'école qui révélait notamment un pic des absences au mois de mai, concentrées autour des week-ends, posant la question récurrente de la gestion des remplacements, surtout pour de courtes durées. Une réponse à ce problème lancinant de l'absentéisme a bien été proposée par le député de Jean-Luc Warsmann dans son rapport sur l'optimisation de la dépense publique avec la mise en place d'une prime d'assiduité pour les fonctionnaires n'ayant bénéficié d'aucun arrêt de travail. Une solution excessive qui souligne le problème de la gestion du personnel au sein de la fonction publique. La solution apportée par le sénateur Vasselle est un début de réponse. Mais il faudra s'assurer que les médecins conseils de la Sécurité Sociale eux-mêmes jouent le jeu, et permettre que cette solution soit rapidement généralisée.