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Primaire de la droite : les candidats sont-ils crédibles ?

Il apparaît très clairement de nombreuses convergences entre les différents candidats à la primaire de la droite. Ils sont tous à peu près alignés sur l'abandon des 35 heures ou/et la suppression de l'ISF (NKM mise à part), ou sur le fait qu'il faut baisser les dépenses publiques et les impôts, et c'est heureux. Cela dit, ils ne sont pas tous au même niveau de détail dans leurs programmes respectifs.

Le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux ne suffira pas

Quand on regarde celui de Nicolas Sarkozy, on sent bien que l'on repart sur la base des propositions de la campagne de 2012, tant à propos du 1 sur 2 (un remplacement pour deux départs à la retraite dans la fonction publique) que sur le jour de carence ou sur la baisse des cotisations sociales salariales, ou encore sur le retour aux heures supplémentaires défiscalisées. Et ce, alors qu'on a très largement dépassé le niveau de 2012 en termes d'urgence des réformes. Le 1 sur 2 ne suffira pas. Pour les collectivités locales, par exemple, c'est le gel des embauches qui s'impose pour les prochaines années.

De même pour les baisses d'impôts : 25 milliards d'euros ne suffiront clairement pas non plus. Notre estimation à l'iFRAP est qu'il faut aller plutôt vers 100 milliards de baisse des impôts et cotisations avec 90% de baisse sur les prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises. Nathalie Kosciusko-Morizet annonce certes 100 milliards de baisses d'impôts, mais ne les détaille pas encore. François Fillon annonce de son côté 50 milliards de baisse de la pression fiscale sur les entreprises.

Flou sur les retraites

Si tous les candidats s'accordent pour annoncer des baisses de dépenses, celles-ci ne sont pas tellement documentées à ce stade. On retrouve dans tous les programmes des propositions sur les retraites, que ce soit chez Bruno Le Maire, François Fillon, Alain Juppé ou Jean-François Copé, mais pas de chiffrage des économies dans le temps. On voit bien que les candidats pensent à aligner les régimes de retraite du public sur les modes de calcul du privé, mais on ne comprend pas toujours bien si cela concernera uniquement le flux des nouveaux entrants ou aussi le stock, or la nuance est de taille ! À partir de quelle année on augmentera le nombre de trimestres est par exemple une donnée clé pour évaluer les économies envisagées (rappelons que la réforme de 2010 commence tout juste à porter ses fruits en rééquilibrage).

Sujets sensibles

Pour atteindre les 100 milliards d'euros de baisse des dépenses en cinq ans, il sera nécessaire de programmer 20 milliards de baisses réelles par an et avoir une vraie vision de la réorganisation publique. Comment atteindre un maximum de 50 ou 52% de dépenses publiques par rapport au PIB ? C'est très en amont qu'une telle réduction de la dépense doit se penser et se chiffrer. Dans le passé, beaucoup de gouvernements ont promis d'économiser, tandis que le pourcentage de dépenses publiques dans le PIB ne faisait qu'augmenter. C'est cette vision globale qui devrait se dessiner (on l'espère) dans les prochains mois. On voit bien que les candidats ont d'ailleurs du mal à annoncer la couleur sur des sujets particulièrement sensibles comme la réduction du nombre de strates locales. Alain Juppé et Nicolas Sarkozy préfèrent laisser chaque territoire s'organiser comme il l'entend. Le risque est réel qu'au bout du chemin il n'y ait pas d'économies... quand Bruno Le Maire se prononce pour la fusion des régions et des départements, ou Fillon et Mariton pour le passage de 4 à 2 strates locales.

La délicate question des élus locaux

La difficulté pour tous les candidats est d'assumer qu'il va falloir réduire en France certes le nombre d'agents publics, mais aussi le nombre d'élus. Et s'ils annoncent, pour certains d'entre eux, une baisse du nombre de députés, par exemple à 400 (Le Maire et Fillon), aucun ne parle de réduction du nombre des élus locaux. C'est pourtant bien là que notre nombre d'élus (en vertu du nombre de strates) est exorbitant. Il faudrait passer à une République plus légère et agile. Pourquoi plus de 200 élus au Grand Paris quand le Grand Londres en compte 24 ?

Quoi qu'il en soit, les candidats seront amenés à préciser dans le comparateur leurs chiffrages, leurs objectifs et leur calendrier sur des sujets encore un peu orphelins comme la réforme de fond de l'école (autonomie ? forfait par élève ?) par exemple.

Cette tribune a été publiée dans les pages de l'hebdomadaire Le Point, le jeudi 18 février.