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Peut-on déterminer le coût des OPEX ?

La carte ci-dessous précise les déploiements opérationnels récents des armées françaises qui concernent :

  • les OPEX essentiellement sur les continents africain (pays francophones) et asiatique (Proche-Orient) ;
  • les mesures de réassurance OTAN : Pays Baltes, Atlantique Nord ;
  • les missions sur le territoire national, notamment « Sentinelle » et dissuasion nucléaire ;
  • les forces de présence à l'étranger : Sénégal, Côte d'Ivoire, Gabon, Djibouti et Emirats-Unis ;
  • les forces de souveraineté dans les DOM/COM : Antilles, Guyane, La Réunion (incluant Mayotte), Nouvelle-Calédonie, Polynésie française.

Plus précisément, il y a lieu de présenter de façon détaillée les données concernant les OPEX actuelles qui mobilisent plus de 7.200 personnels des forces armées, auxquels il convient de rajouter ceux relevant de différents départements ministériels (exemple : Intérieur (police nationale et gendarmerie), Affaires étrangères (coopération militaire technique)) projetés dans les pays étrangers dans lesquels se déroulent ces interventions.

C'est ainsi que les théâtres d'OPEX qui concernent essentiellement le continent africain (notamment francophone) sur lequel sont projetés plus de 4.800 militaires, sont présentés dans le tableau ci-dessous :

Ce tableau met en évidence la durée des OPEX qui se déroulent sur plusieurs années, voire des décennies. D'ailleurs, l'historique des OPEX engagés par la France depuis les années 1960, démontre leur caractère répétitif et durable comme l'attestent les exemples suivants.

Sur le continent africain : 

  • Tchad (pays intégré depuis 2014 dans le cadre de l'OPEX Barkhane) = interventions dès 1965, puis 1972, 1978, 1984, 1987, 2006… au début dans un cadre d'accord de défense binational et élargies de façon ponctuelle au milieu des années 2000 dans le cadre de l'UE – soit plus de 50 ans d'intervention ;   
  • Centrafrique =  interventions dès 1965, puis 1978-1998, 2003-2018 au début dans un cadre d'accord de défense binational, puis élargies au sein d'une force inter-africaine (CEMAC - MISAB), de l'ONU et l'UE – soit plus de 50 ans d'intervention ;
  • Côte d'Ivoire = interventions dès 1999 puis dès 2002 essentiellement dans un cadre d'accord binational, puis élargies au sein d'une force inter-africaine (CEDEAO – MICECI) et de l'ONU - soit plus de 15 années d'intervention ;
  • République démocratique du Congo (ex-Zaïre) = interventions en 1977, 1978, 1999, 2003, 2006... dans un cadre d'accord de défense binational, puis de l'ONU et de l'UE, soit près de 50 ans d'interventions.

Au Proche Orient : Liban, dès 1978, opération « Hippocampe » suivie des interventions (1982 – 1984) de la force multinationale intérimaire (FMI = France, États-Unis d'Amérique et Italie) puis de la force multinationale de sécurité à Beyrouth (FMSB = France, États-Unis d'Amérique, Italie et Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord) avec en parallèle la participation à la FINUL – soit 40 années d'intervention.

Dans les Balkans (ex-Yougoslavie, Kosovo, Albanie) : de 1991 à 2015 au sein de forces de l'ONU, puis de l'OTAN et finalement de l'UE, soit plus de 20 années d'intervention.

Ces OPEX qui, il faut le souligner, n'ont pas abouti, dans la majeure partie des cas, à une situation de paix, ont un coût financier comme le présente le graphique suivant :

Conclusion

Ces éléments mettent en évidence la durée relativement longue des OPEX et leur caractère répétitif dans certains pays (notamment sur le continent africain) – ce qui pose la question du processus de sortie de crise qui ne peut être résolue que dans un cadre international, notamment en ce qui concerne les actions de développement économique, social, écologique et culturel.

Seules 2 OPEX engagées dans un cadre multinational sur la base d'une résolution du conseil de sécurité de l'ONU avec un volume significatif de moyens, ont duré quelques mois et qui sont les suivantes :

  • la 1ère guerre du Golfe de août 1990 à février 1991, soit 7 mois ;
  • l'intervention en Libye de mars à octobre 2011, soit 5 mois.

Il est à noter que le ministère des armées a provisionné dans le cadre de la LFI 2018 650 millions d'euros pour les OPEX. Mais ce montant paraît non sincère en matière budgétaire, comme d'ailleurs le souligne le sénateur Dominique de Legge, dans son rapport général n° 108 (2017-2018) fait au nom de la commission des finances du Sénat et déposé le 23 novembre 2017.  

Cependant, la durée des OPEX peut être un élément permettant de « socler » dans un cadre interministériel de façon relativement précise leur budget annuel auquel participent non seulement les forces armées du ministère des armées mais aussi :

  • des unités de sécurité comme la police nationale, la gendarmerie nationale, la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, le bataillon de marins-pompiers de Marseille, les unités militaires d'instruction et d'intervention de la sécurité civile ;
  • des détachements du service militaire adapté (SMA) relevant du ministère des Outre-mer ;
  • des équipes techniques de  la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) et de la Direction de la coopération internationale (DCI) du ministère des affaires étrangères.

Ainsi, il s'agit d'évaluer dans un cadre interministériel le plus précisément possible lors de l’année A-1 le budget des OPEX sous le contrôle du Parlement sur la base des données de renseignement relatives à l'évolution des dispositifs opérationnels un projet de budget des OPEX pour l'année A. Il conviendra de distinguer les dépenses suivantes :

  • d'exploitation (en anglais = operational expenditure) qui concernent les charges courantes de fonctionnement et d'entretien (confer le graphique chiffré présenté supra) ;
  • d'investissement (en anglais = capital expenditure) qui sont notamment des achats de matériels qui peuvent représenter une valeur positive pour le patrimoine des forces sur le long terme (ex = véhicules ARAVIS du Génie, VAB ULTIMA de l'Infanterie).

Cette proposition de procédure vise à respecter l'objectif de sincérité budgétaire des OPEX plusieurs fois rappelé par la Cour des comptes (confer son rapport du 14 novembre 2016 à titre d'exemple) et à mettre en adéquation le budget devant être établi dans un cadre interministériel avec la participation de l'ensemble des ministères et collectivités aux OPEX.