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Passer du "toilettage" à la réforme de l'Etat

“Il faut aller plus loin dans les remises en cause de l'organisation de l'Etat que ne le font les audits". Voilà en substance ce que dit le rapport de la commission des finances du Sénat signé de son Président Jean Arthuis au sujet des audits de modernisation de l'Etat lancés en 2005 par Jean-François Copé, Ministre du Budget. Dans ce rapport paru fin octobre 2006, les critiques pleuvent : "travaux de qualité inégale", "préconisations chiffrées pour moins de la moitié des audits des premières vagues contrairement au principe posé par la circulaire relative aux audits de modernisation qui prévoyait une évaluation précise des gains de productivité espérés", "absence de tableau de bord gouvernemental de l'avancement des audits et de leurs résultats". Bref, le constat est sévère sur la portée concrète que peuvent avoir ces audits de modernisation.

Auto-évaluation

Un des reproches du rapport du Président Arthuis repose sur le fait que ce sont les propres corps d'inspection des ministères qui ont procédé à ces audits alors que "les administrations ne devaient pas pratiquer uniquement l'auto-évaluation". De surcroît, le rapport souligne que "si la gestion administrative de la paye des personnels fait l'objet d'un audit encore en cours, aucun audit transversal n'a encore été consacré aux règles de rémunération, de temps de travail, de gestion des corps et des carrières, à la démographie du personnel de la fonction publique de l'Etat. Il y a là une lacune regrettable alors que la masse salariale constitue le premier poste budgétaire de l'Etat et que son inflation n'est aujourd'hui pas maîtrisée". Le Président de la commission des Finances du Sénat a souligné la nécessité d'une "mise sous tension"des administrations concernées, "le Parlement devant y prendre largement sa part". Il a appelé à résoudre les difficultés de passage de relais entre l'équipe d'audit et l'administration chargée de la mise en œuvre.

A quand le grand soir de la réforme de l'Etat ?

En définitive, le Sénat met en exergue le fait que la réforme de l'Etat à la française n'a pas l'ampleur de celle réalisée au cours des années 1990 au Canada, et qu'elle ne permet pas de "grand soir" de la dépense publique. S'il considère que la démarche en cours a un effet modérateur sur l'évolution de la dépense publique, il rappelle qu'au mieux, selon les prévisions du ministère délégué au Budget et à la réforme de l'Etat, les gains de productivité liés aux audits pourraient atteindre 6 à 7 milliards d'euros, sur une période de l'ordre de 6 ans. Ces gains étant à mettre en perspective avec l'inflation de certains postes de dépense tels les dépenses de pension qui devraient passer entre 2006 et 2009 de 31 milliards d'euros à 36 milliards d'euros. Conclusion du rapport du Sénat : "les audits de modernisation ont indéniablement un effet modérateur sur l'évolution des crédits du budget de l'Etat, mais leur impact reste trop marginal pour provoquer une diminution de la dépense publique, préalable indispensable à une réduction du taux des prélèvements obligatoires dont notre pays a besoin".